qu'évoque pour vous Raymond Aubrac aujourd'hui ?

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tisiphoné
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Raymond Aubrac était un agent communiste

Message par tisiphoné » 15 avril 2012 17:23

Dernier message de la page précédente :

dinosaure a écrit : Vous êtes idiot ou dégueulasse.

Idiot si vous ignorez que Raymond Aubrac fondateur du réseau "Libération Sud"n'a jamais été communiste.
Dégueulasse si vous le savez et tentez de salir sa mémoire.

Je vous laisse choisir votre camp.
"Raymond Aubrac était un agent communiste"
L'historien du communisme, Stéphane Courtois, décrit la face cachée du résistant, décedé aujourd'hui.

Directeur de recherches au CNRS, l'historien Stéphane Courtois est un spécialiste du communisme. Elève d'Annie Kriegel, il a été le maître d'oeuvre du Livre noir du communisme. Ses derniers livres sont "le Bolchevisme à la française" (Fayard) et, sous sa direction, "Sortir du communisme, changer d'époque" (PUF). Historien engagé, mais grand connaisseur des archives, il nous décrit la face cachée d'un personnage aujourd'hui encensé. (On pourrai également lire son article sur le site de Causeur)

Qui était vraiment Raymond Aubrac ?
Un agent soviétique, mais pas au sens où il aurait travaillé pour les services d'espionnage de l'Union soviétique. Il était plutôt un membre important du réseau communiste international, un sous-marin communiste si l'on veut ; en tout cas, beaucoup plus qu'un agent d'influence. Un homme comme lui avait évidemment un correspondant à Moscou.

En a-t-on des preuves ?
Nous n'avons pas de documents, comme par exemple dans le cas de l'ancien ministre radical Pierre Cot. Toutefois, l'ancien dissident tchèque Karel Bartosek avait découvert dans les archives du PC à Prague des documents qui montrent qu'Aubrac y était reçu par Klement Gottwald, le chef historique du PC tchécoslovaque, qui fut aussi un agent du Komintern.

Mais Aubrac a toujours expliqué qu'il n'avait jamais été membre du PCF ?
(Rire). C'est exact, formellement, mais tout cela est cousu de fil rouge. Il faisait partie de ce qu'on appelle les "hors-cadres", des gens de haut niveau dont le PCF n'avait pas besoin qu'ils prennent leur carte. Ils leur étaient plus utile à l'extérieur. Aubrac était un ingénieur, sorti de l'Ecole des Ponts et Chaussées, et le PCF ne voulait pas le mettre en avant. Ce qui ne l'empêchait pas de participer à des réunions de cellules comme "observateur". Avant guerre, sa future épouse Lucie était elle-même communiste, proche d'André Marty - qui fut représentant du PCF au Komintern.

Ses biographes le présentent comme une sorte d'industriel à la tête d'une entreprise d'urbanisme. Qu'en est-il ?
La société qu'il dirigeait était le Berim - le Bureau d'études et de recherches pour l'industrie moderne. Placé sous la responsabilité de Jean Jérôme, l'und es hommes les plus importants et les plus secrets du PCF - cette société servait aussi de pompe à finances au Parti. C'est, par elle, que passait une partie des financements en provenance de l'Est - sous la forme de contrats plus ou moins bidons. Même chose avec les maires communistes.

On apprend qu'il était à Saïgon lors de l'arrivée des chars du Nord-Vietnam en 1975. Qu'y faisait-il ?
Aubrac a joué un rôle très particulier dans l'affaire du Vietnam. Lorsque le dirigeant communiste Hô Chi Minh vint en France en 1946, il fut hébergé par les Aubrac à la demande de Jacques Duclos. Puis il servit de contact entre l'appareil communiste international et Henry Kissinger lui-même. Du sérieux, on le voit.

Son rôle durant la Résistance a fait l'objet de polémiques. On se souvient d'un procès contre l'historien Gérard Chauvy et d'une table ronde organisée en 1997 par Libération. Qu'en pensez-vous ?
Pendant longtemps, Aubrac et son épouse Lucie ont raconté qu'il s'était évadé à la suite d'une opération de la Résistance. Or, Arthur Kriegel - qui a participé à cette action commando - assurait qu'Aubrac n'était pas là quand elle eut lieu. Puis Aubrac a reconnu dans la biographie "autorisée" que Pascal Convert lui a récemment consacrée qu'il ne s'était pas évadé, mais qu'il avait été libéré.
Un autre épisode pose problème. A la Libération, il est commissaire régional de la République à Marseille. Or De Gaulle va le virer sans ménagement et sans explication. A Marseille, il avait créé des CRS (Compagnies républicaines de sécurité) dont on découvrit plus tard qu'elles étaient entièrement infiltrées par le PCF.
Quant à la table ronde de Libération, une anecdote est significative : Aubrac s'est mis en colère au moment même où Daniel Cordier lui a demandé d'avouer enfin qu'il était communiste. Jusqu'au bout, il l'aura nié. C'était un gros poisson de l'appareil, très bien camouflé, en particulier derrière l'image de son épouse Lucie.
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sacamalix
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Re: qu'évoque pour vous Raymond Aubrac aujourd'hui ?

Message par sacamalix » 15 avril 2012 18:21

Par souci d'objectivité, il ne faut quand même pas oublier de présenter un avis contraire...
L'historien François Delpla, spécialiste de la seconde guerre mondiale, réagit à l'entretien de Stéphane Courtois sur Raymond Aubrac, publié hier sur ce blog. Lui aussi historien engagé, mais pas du même cbord, François Delpla est l'auteur d'un livre sur "Aubrac, les faits et la calomnie" (Le temps des cerises, 1998).

Raymond Aubrac était-il un agent communiste comme le dit Stéphane Courtois ?
Sûrement pas comme il le dit, c'est-à-dire avec un seul et même engagement depuis ses années d'étudiant avant guerre jusqu'en 199. Lorsque j'ai connu Aubrac, à la fin des années 1980, il était ardemment pro-européen, par crainte que l'Allemagne ne réclame un jour ses provinces perdues en Pologne. D'autre part, Aubrac a fait l'effort de clarifier la question de ses rapports avec le mouvement communiste, à la fin de ses mémoires. Je comprends et même j'attends qu'un historien ne prenne pas cela pour argent comptant, mais Courtois a le plus grand tort de n'en tenir aucun compte - à se demander s'il a lu ces pages.

Quels étaient alors ses rapports exacts avec le PCF ?
Dans les années trente, il fréquente une sorte d'école de formation marxiste pour étudiants parisiens de haut niveau et ne semble pas avoir d'engagement militant; rien en tout cas qui l'empêche de postuler pour une bourse aux Etats-Unis, en 1937; ni de faire la Préparation militaire supérieure, à une époque de fichage intense des "rouges" dans l'armée puis de faire son service militaire comme officier dans le génie. Pendant la guerre, beaucoup de communistes désireux de "faire quelque chose" malgré le pacte germano-soviétique contribuent à former les mouvements Combat, Libération, Franc-Tireur, etc. Quand le Parti reprend lui-même le combat, il leur dit de rester en place. Les cas les plus connus sont Pierre Hervé à Libé-sud et Marcel Degliame à Combat. Pour Aubrac, il n'ya pas trace d'inféodation partisane quand il est à Libé-Sud.

Et avec le mouvement communiste international ?
Rien n'apparaît avant la guerre, ni pendant. Ensuite, il dit lui-même qu'il participe à la fondation du Mouvement de la Paix, piloté par Moscou, et son BERIM est bien en relations suivies avec les démocraties populaires , tout en étant aussi beaucoup tourné vers le Tiers-monde, jusqu'à nos jours. On peut parler alors de "sympathisant" ou de "compagnon de route". Au plus tard en 1956, l'éloignement du couple Aubrac -et de bien d'autres- du mouvement communiste est patent -Raymond déclarant dans ses mémoires avoir "compris" un peu plus tôt, notamment lors du procès Slansky de Prague.

Pourquoi, à la Libération, de Gaulle lui a-t-il retiré son poste de Commissaire de la République à Marseille ?

Parce qu'il passait pour trop proche du PCF assurément. Mais là aussi l'historien doit faire attention ! Il a eu des audaces qu'on peut trouver sympathiques et qui n'étaient peut-être pas trop dans la ligne du Parti de l'époque, en matière de gestion des usines en déshérence notamment. Et de Gaulle a surtout sanctionné un rapport de forces local : les socialistes, Gaston Defferre en tête, avaient efficacement savonné la planche en faisant apparaître un Aubrac contesté et dépassé, notamment sur les questions de ravitaillement, résolues en un tournemain après son départ. Certains ont fait apparaître Raymond Aubrac, dans les questions d'épuration, comme un Robespierre bis, alors qu'il n'y a pas eu plus de condamnations à mort qu'ailleurs - et qu'il s'en explique aussi dans ses mémoires comme quelqu'un qui n'a rien à cacher -et que personne n'a démenti.

Que sait-on de l'épisode de ses évasions à Lyon durant l'occupation ?
Rien que d'honorable. Le récit fameux de son épouse Lucie peut être corrigé sur des détails mais n'a été contredit par aucun témoin ni aucune archive sur l'essentiel - alors qu'il a été au contraire abondamment recoupé. La Gestapo s'est tout bonnement fait avoir par une ruse habile. J'ajoute que Courtois utilise une grosse ficelle, à moins qu'il ne commette une confusion par une grave méconnaissance du dossier. Il prétend que Raymond aurait fini par reconnaître, devant Pascal Convert, "qu'il avait été libéré". Or il n'a jamais varié sur ce point, qui concerne la première arrestation et la première libération, au printemps 43, l'épisode où Lucie va menacer de mort le procureur. Prétendre, comme le fait Courtois, qu'il s'agit de l'évasion ou de la libération au singulier, veut bien dire qu'il s'agit de l'épisode le plus connu, celui de l'attaque du fourgon le 21 octobre 1943, et que Raymond n'était pas dans ledit fourgon, la Gestapo profitant de l'épisode pour remettre en circulation son "agent" : Courtois se situe exactement sur la position de Gérard Chauvy et de Jacques Vergès.

Raymond Aubrac n'était Compagnon de la Libération. Pourquoi ?
Il n'est pas le seul ! Beaucoup de facteurs ont pu jouer. Mais on comprend bien avec quelle arrière-pensée certains posent la question dans son cas.
Il n'y absolument aucun mérite à exciter les gens. Le vrai héros c'est celui qui apaise.

La laïcité n'est pas une conviction mais le principe qui les autorise toutes, sous réserve du respect de l'ordre public.

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Re: qu'évoque pour vous Raymond Aubrac aujourd'hui ?

Message par metanova » 16 avril 2012 02:00

chirac faisait bien partie des jeunesses communistes...

François Delpla
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Re: qu'évoque pour vous Raymond Aubrac aujourd'hui ?

Message par François Delpla » 28 mai 2012 08:50

attention !

il faut bien voir que Courtois ne fait pas seulement au couple Aubrac un procès (bâclé) pour communisme. Il cherche à salir la Résistance dans son ensemble, en prétendant les en exclure

Nul ne parlerait aujourd'hui de ce couple si Madame n'avait pas délivré Monsieur des griffes de Barbie. C'est cette épopée qu'il urge, pour Courtois et ceux, nombreux à en juger par la Toile, qui le suivent dans ce nouveau cycle de la calomnie (initiée par Me Vergès en 1983), de ravaler au rang d'une intoxication stalinienne.

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Re: qu'évoque pour vous Raymond Aubrac aujourd'hui ?

Message par gemmill » 28 mai 2012 09:58

bonjour Monsieur Delpla
l'avis et l'éclairage du spécialiste que vous étes est toujours un bénéfice.
mais vous ne pouvez nier que de cette période , des zones d'ombre subsisteront toujours.
le "un tel est le gentil et l'autre est forcément le méchant" finit par avoir un relent de manichéisme.

cordialement
gemmill
si maupassant est devenu fou , c'est parce que il avait une conscience aigüe de la matiére , du néant et de la mort.
"extension du domaine de la lutte".michel houellbecq

François Delpla
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Re: qu'évoque pour vous Raymond Aubrac aujourd'hui ?

Message par François Delpla » 28 mai 2012 11:36

justement pas dans ce cas !

Loin d'éloigner les historiens comme des menteurs (ou des naïfs abusés par ceux-ci) l'ont prétendu, les Aubrac se sont prêtés à tous les questionnements (dont les miens) et il n'y a pas à tortiller, leur histoire est aussi vraie que belle : Lucie a récupéré son mari en trompant magistralement la Gestapo et sans se compromettre en rien avec elle.

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