Le procès opposant Marine Le Pen à Laurent Ruquier aura bien lieu. Deux procès en fait. Le procureur de la République a estimé que les deux dessins litigieux montrés par l'animateur dans On n'est pas couché méritaient le caractère d'injures publiques. Il n'y a pas le feu au lac : les procès devraient se tenir... dans un an.
Le 7 janvier 2012, en pleine campagne présidentielle, Laurent Ruquier avait, au cours de sa revue de presse, montré sur France 2 une collection d'affiches électorales parodiques des candidats réalisées par Charlie Hebdo. L'affiche représentant Marine Le Pen était, effectivement, peu flatteuse : en guise de candidate, le dessinateur Charb avait représenté un étron surmonté de ce slogan : "Le Pen, la candidate qui vous ressemble". Le procureur estime que l'offense correspond au délit d'injure publique, à savoir des "propos ou image susceptibles de constituer des expressions outrageantes, termes de mépris ou des invectives ne renfermant l'imputation d'aucun fait" (articles 23, 29 et 33 de la loi de 1881 sur la liberté de la presse).
Charb mis hors de cause
L'auteur du dessin, Charb (de son vrai nom Stéphane Charbonnier), avait été mis en examen. Le procureur requiert à son endroit un non-lieu. Il ignorait que son dessin ferait partie de la revue de presse de Ruquier. "Sa responsabilité ne saurait être mise en œuvre à raison d'une publication qu'il n'avait ni prévue ni autorisée," conclut le magistrat du parquet.
La deuxième affaire, du même tonneau, est plus ancienne. Le 5 novembre 2011, Ruquier, toujours dans le cadre de sa revue de presse, exhibe un dessin représentant "l'arbre généalogique de Marine Le Pen" : il comporte sa photographie au centre et forme, "par quatre branches principales, une croix gammée". Là aussi, le procureur retient l'injure publique et renvoie Laurent Ruquier devant le tribunal correctionnel. Dans les deux affaires, Rémy Pflimlin, P-DG de France Télévisions, est poursuivi en tant que directeur de la publication.
Au moment des faits, le patron de France Télévisions avait pris la défense de son animateur en répondant, par écrit, aux protestations de la leader du Front national. "Je souhaite tout d'abord vous inviter à visionner l'émission, car le contenu de votre lettre prouve que vous ne l'avez pas vue vous-même", écrivait Pflimlin pour qui "Laurent Ruquier n'a fait que lire ce qui était écrit sur cette affiche sans autre commentaire. Il n'est donc pas l'auteur ni de l'affiche ni de son texte." Et Pflimlin de rappeler que la parodie ne visait pas que le Front national, Laurent Ruquier ayant montré toutes les affiches publiées dans Charlie Hebdo. La moquerie s'adressait également à Nicolas Sarkozy, François Hollande, François Bayrou, Eva Joly, Philippe Poutou, Jean-Luc Mélenchon et Christine Boutin.