Députés RN, complotistes, journalistes du «JDD» et chanteur néofasciste à Paris la soirée secrète de toutes les extrêmes
Posté : 22 mars 2025 07:45
Sauterie
Le patron de Radio Courtoisie a organisé jeudi 20 mars à Paris la troisième édition des «soupers de la Doyenne», un format qui doit permettre aux activistes les plus radicaux de fréquenter les cadres les plus fréquentables de l’extrême droite. Voire plus si affinités.
Vous êtes d’extrême droite, journaliste, député, universitaire en quête d’opportunités professionnelles ? Vous cherchez à faire fructifier votre réseau ou à courtiser une donzelle de votre bord politique ? Ces soirées sont faites pour vous. Sous l’égide de Pierre-Alexandre Bouclay, président de Radio Courtoisie, la très maurrassienne «radio libre du pays réel», s’est tenue jeudi soir la troisième édition des «Soupers de la doyenne», au café Drouot, dans le IXe arrondissement de Paris. Après 20 heures, plusieurs dizaines de sympathisants se sont pressées dans un salon privé discrètement réservé pour l’occasion, avant de se répandre en terrasse. Libération s’est procuré la liste des invités. On y trouve toute la palette de la réaction : de la presse (Valeurs actuelles, le Journal du dimanche (JDD), le Figaro Magazine) à certains députés du Rassemblement national (RN), en passant par des figures du complotisme, de la Nouvelle Droite, des identitaires et jusqu’à Fabrice Robert, leader de Fraction, le vieux groupe de rock identitaire français, antisémite, néofasciste, très tatoué et rasé de près au niveau du crâne.
Une bien belle liste, grosse d’une centaine de noms, où se côtoient Mathilde Androuët, eurodéputée RN proche de Bardella, le directeur de cabinet de ce dernier et quatre autres parlementaires frontistes, l’avocat Thibault de Montbrial, ancien conseiller de Valérie Pécresse en 2022, le journaliste du Figaro Jean-Christophe Buisson, quelques-uns du JDD, comme Raphaël Stainville, Aziliz Le Corre et Cyril de Beketech, un ancien de Minute recyclé dans l’hebdo. A Libé, Le Corre soutient qu’elle n’a pas reçu l’invitation et qu’elle ne s’est pas rendue à une réunion l’associant «à des néonazis et des négationnistes». Il y a aussi la patronne du groupe identitaire féminin Némésis, Alice Cordier, la vice-présidente du microscopique parti d’Eric Ciotti, Claire Geronimi, les complotistes pro-russes Pierre-Yves Rougeyron, Florian Philippot et François Asselineau, et leur cousin Mike Borowski, patron de Géopolitique profonde, la dernière chaîne YouTube, sans doute, à donner la parole aux négationnistes Vincent Reynouard ou Hervé Ryssen.
Arrimer les plus radicaux aux plus mainstream
On trouve encore le Jarl, un patron de boîte de nuit rennaise qui s’est récemment distingué en tabassant des jeunes fêtards – des actes de bravoure qui lui ont valu l’ouverture d’une enquête après qu’une députée insoumise a signalé les faits au procureur de la République. Et l’inénarrable Thaïs d’Escufion, influenceuse raciste spécialisée dans le business des incels, ces célibataires malgré eux qui détestent les femmes. Tous les membres de cette liste ne sont pas engagés activement dans ces «soupers». Certains ont été ajoutés car ils gravitent dans l’orbite de Radio Courtoisie. D’autres ne se pointent pas aux soirées. «J’irai quand il y aura des jolies filles intelligentes et pas que des barbons ou des homos», glisse un sceptique qui est resté chez lui jeudi soir. D’autres encore, évitent de se mêler à une faune trop sulfureuse. Selon l’hebdomaire Marianne, le militant néonazi Marc de Cacqueray-Valménier était même présent à la première édition des soupers, en décembre.
L’objectif est simple : mélanger toutes les extrêmes droites, qui souvent se brouillent, pour travailler ensemble. Et continuer d’arrimer les moins fréquentables aux plus mainstream. Dans un message consulté par Libé, Bouclay dresse le bilan de la précédente soirée : «Vous étiez environ 150 à passer prendre un verre ou partager une planche, entre 20 heures et 1 heure du matin», se réjouit-il, énumérant : «Des journalistes (presse papier, radio, télévision, médias en ligne), qui discutent, échangent des informations», «des membres des différents partis de notre famille de pensée (de LR à Reconquête en passant par le RN ou Identité et liberté de Marion Maréchal) qui surmontent leurs divergences, voire leurs différends, se saluent ou boivent une bière, […] une jeune femme en recherche d’emploi qui trouve une mission de community management» et «un universitaire qui cherche activement un expert du ministère de la Culture, que l’on met aussitôt en contact avec l’ancien responsable des commémorations nationales».
La sauterie qui a plutôt bien fonctionné
Vu le panel représenté, on imagine sans peine le type de commémorations qui doit en résulter. Et comme il faut bien que la chair exulte, Bouclay se fait un instant Cupidon pour vanter «des jeunes (ou moins jeunes) qui font connaissance et se marieront peut-être un jour». Contacté par Libé, notre entremetteur faf ne songe pas à nier et passe à confesse. Son idée est de ressusciter les «Soupers de la réaction», lancés en 2014 dans le sillage de la Manif pour tous par un autre maurrassien, Charles de Meyer, aujourd’hui assistant parlementaire de l’eurodéputé Guillaume Peltier, dans l’objectif de coaliser les composantes de la droite qui avaient communié dans le rejet du mariage homosexuel. Bouclay, lui, s’inspire aussi des «premières» organisées par Patrick Buisson quand il dirigeait la chaîne Histoire, sous les mandats de Nicolas Sarkozy et François Hollande. «On pouvait y croiser Emmanuel Ratier [pétainiste, antisémite et méthodique enquêteur, à la tête de la lettre d’information Faits & Documents jusqu’à sa mort en 2015] et Etienne Mougeotte [alors directeur du Figaro], c’était formidable !» s’enthousiasme encore Bouclay, personnage aussi discret qu’essentiel dans l’écosystème droitier.
Jeudi soir, la petite sauterie a plutôt bien fonctionné, confie un participant. «Un haut cadre du CAC 40, le bras droit d’un grand patron français, quelques entrepreneurs, des journalistes amis et écrivains, avocats, chroniqueurs télés, quelques politiques mais pas de célébrités, ni de néonazis.» Ne manque plus de consulter la liste pour vérifier tout cela.
https://www.liberation.fr/politique/ele ... 64MNGKWBI/
Le patron de Radio Courtoisie a organisé jeudi 20 mars à Paris la troisième édition des «soupers de la Doyenne», un format qui doit permettre aux activistes les plus radicaux de fréquenter les cadres les plus fréquentables de l’extrême droite. Voire plus si affinités.
Vous êtes d’extrême droite, journaliste, député, universitaire en quête d’opportunités professionnelles ? Vous cherchez à faire fructifier votre réseau ou à courtiser une donzelle de votre bord politique ? Ces soirées sont faites pour vous. Sous l’égide de Pierre-Alexandre Bouclay, président de Radio Courtoisie, la très maurrassienne «radio libre du pays réel», s’est tenue jeudi soir la troisième édition des «Soupers de la doyenne», au café Drouot, dans le IXe arrondissement de Paris. Après 20 heures, plusieurs dizaines de sympathisants se sont pressées dans un salon privé discrètement réservé pour l’occasion, avant de se répandre en terrasse. Libération s’est procuré la liste des invités. On y trouve toute la palette de la réaction : de la presse (Valeurs actuelles, le Journal du dimanche (JDD), le Figaro Magazine) à certains députés du Rassemblement national (RN), en passant par des figures du complotisme, de la Nouvelle Droite, des identitaires et jusqu’à Fabrice Robert, leader de Fraction, le vieux groupe de rock identitaire français, antisémite, néofasciste, très tatoué et rasé de près au niveau du crâne.
Une bien belle liste, grosse d’une centaine de noms, où se côtoient Mathilde Androuët, eurodéputée RN proche de Bardella, le directeur de cabinet de ce dernier et quatre autres parlementaires frontistes, l’avocat Thibault de Montbrial, ancien conseiller de Valérie Pécresse en 2022, le journaliste du Figaro Jean-Christophe Buisson, quelques-uns du JDD, comme Raphaël Stainville, Aziliz Le Corre et Cyril de Beketech, un ancien de Minute recyclé dans l’hebdo. A Libé, Le Corre soutient qu’elle n’a pas reçu l’invitation et qu’elle ne s’est pas rendue à une réunion l’associant «à des néonazis et des négationnistes». Il y a aussi la patronne du groupe identitaire féminin Némésis, Alice Cordier, la vice-présidente du microscopique parti d’Eric Ciotti, Claire Geronimi, les complotistes pro-russes Pierre-Yves Rougeyron, Florian Philippot et François Asselineau, et leur cousin Mike Borowski, patron de Géopolitique profonde, la dernière chaîne YouTube, sans doute, à donner la parole aux négationnistes Vincent Reynouard ou Hervé Ryssen.
Arrimer les plus radicaux aux plus mainstream
On trouve encore le Jarl, un patron de boîte de nuit rennaise qui s’est récemment distingué en tabassant des jeunes fêtards – des actes de bravoure qui lui ont valu l’ouverture d’une enquête après qu’une députée insoumise a signalé les faits au procureur de la République. Et l’inénarrable Thaïs d’Escufion, influenceuse raciste spécialisée dans le business des incels, ces célibataires malgré eux qui détestent les femmes. Tous les membres de cette liste ne sont pas engagés activement dans ces «soupers». Certains ont été ajoutés car ils gravitent dans l’orbite de Radio Courtoisie. D’autres ne se pointent pas aux soirées. «J’irai quand il y aura des jolies filles intelligentes et pas que des barbons ou des homos», glisse un sceptique qui est resté chez lui jeudi soir. D’autres encore, évitent de se mêler à une faune trop sulfureuse. Selon l’hebdomaire Marianne, le militant néonazi Marc de Cacqueray-Valménier était même présent à la première édition des soupers, en décembre.
L’objectif est simple : mélanger toutes les extrêmes droites, qui souvent se brouillent, pour travailler ensemble. Et continuer d’arrimer les moins fréquentables aux plus mainstream. Dans un message consulté par Libé, Bouclay dresse le bilan de la précédente soirée : «Vous étiez environ 150 à passer prendre un verre ou partager une planche, entre 20 heures et 1 heure du matin», se réjouit-il, énumérant : «Des journalistes (presse papier, radio, télévision, médias en ligne), qui discutent, échangent des informations», «des membres des différents partis de notre famille de pensée (de LR à Reconquête en passant par le RN ou Identité et liberté de Marion Maréchal) qui surmontent leurs divergences, voire leurs différends, se saluent ou boivent une bière, […] une jeune femme en recherche d’emploi qui trouve une mission de community management» et «un universitaire qui cherche activement un expert du ministère de la Culture, que l’on met aussitôt en contact avec l’ancien responsable des commémorations nationales».
La sauterie qui a plutôt bien fonctionné
Vu le panel représenté, on imagine sans peine le type de commémorations qui doit en résulter. Et comme il faut bien que la chair exulte, Bouclay se fait un instant Cupidon pour vanter «des jeunes (ou moins jeunes) qui font connaissance et se marieront peut-être un jour». Contacté par Libé, notre entremetteur faf ne songe pas à nier et passe à confesse. Son idée est de ressusciter les «Soupers de la réaction», lancés en 2014 dans le sillage de la Manif pour tous par un autre maurrassien, Charles de Meyer, aujourd’hui assistant parlementaire de l’eurodéputé Guillaume Peltier, dans l’objectif de coaliser les composantes de la droite qui avaient communié dans le rejet du mariage homosexuel. Bouclay, lui, s’inspire aussi des «premières» organisées par Patrick Buisson quand il dirigeait la chaîne Histoire, sous les mandats de Nicolas Sarkozy et François Hollande. «On pouvait y croiser Emmanuel Ratier [pétainiste, antisémite et méthodique enquêteur, à la tête de la lettre d’information Faits & Documents jusqu’à sa mort en 2015] et Etienne Mougeotte [alors directeur du Figaro], c’était formidable !» s’enthousiasme encore Bouclay, personnage aussi discret qu’essentiel dans l’écosystème droitier.
Jeudi soir, la petite sauterie a plutôt bien fonctionné, confie un participant. «Un haut cadre du CAC 40, le bras droit d’un grand patron français, quelques entrepreneurs, des journalistes amis et écrivains, avocats, chroniqueurs télés, quelques politiques mais pas de célébrités, ni de néonazis.» Ne manque plus de consulter la liste pour vérifier tout cela.
https://www.liberation.fr/politique/ele ... 64MNGKWBI/
