Politique anti-discrimination: lettre envoyée aux entreprises françaises
Posté : 28 mars 2025 23:09
Politique anti-discrimination : Le Figaro s’est procuré la lettre envoyée par l’administration Trump à des entreprises françaises
Suite de nos emmerdements avec Trump. Le seul problème est que le DEI est promu par l'UE, l'OCDE, l'ONU, la loi française, alors je ne sais pas trop comment nos grands groupes vont gérer.DOCUMENTS EXCLUSIFS - L’ambassade américaine à Paris intime à des groupes tricolores de s’engager par contrat à cesser leur politique de lutte contre les discriminations s’ils veulent continuer à travailler avec le gouvernement. Bercy a réagi en assurant que «ces valeurs ne sont pas les nôtres».
Les États-Unis veulent forcer les entreprises françaises à supprimer leurs politiques anti-discrimination. Alors que l’administration Trump mène une lutte sans merci contre les programmes «DEI» (pour diversité, équité, inclusion), ce combat traverse l’Atlantique et se retrouve dans l’Hexagone. Une lettre a en effet été envoyée par le gouvernement américain à plusieurs groupes tricolores, les enjoignant à supprimer au plus vite leurs programmes de diversité s’ils souhaitent continuer à travailler avec l’État fédéral, a appris Le Figaro ce vendredi, confirmant une information des Échos.
Signée par un certain Stanislas Parmentier, un mystérieux «agent contractant» qui officie pour le département d’État des États-Unis à l’ambassade américaine à Paris, la lettre est rédigée en français et en anglais. «Nous vous informons que le décret 14173, concernant la fin de la discrimination illégale et rétablissant les opportunités professionnelles basées sur le mérite, signé par le Président Trump, s’applique également obligatoirement à tous les fournisseurs et prestataires du Gouvernement américain, quel que soit leur nationalité et le pays dans lequel ils opèrent», lit-on dans ce document.
Pour rappel, le décret en question a été signé le 21 janvier dernier, au lendemain de l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche. Il dénonce vertement les politiques de discrimination positive, qui «violent le texte et l’esprit de nos lois fédérales de longue date sur les droits civiques» et «portent également atteinte à notre unité nationale, car elles nient, discréditent et sapent les valeurs américaines traditionnelles de travail acharné, d’excellence et de réussite individuelle en faveur d’un système de dépouilles illégal, corrosif et pernicieux basé sur l’identité». Et, selon l’administration américaine, ce texte s’applique également aux partenaires du gouvernement, y compris français, qui doivent donc modifier en conséquence leur propre fonctionnement.
Les valeurs de l’administration Trump «ne sont pas les nôtres»
«Nous vous prions de bien vouloir trouver ci-joint un formulaire de certification du respect de la loi fédérale américaine sur l’anti-discrimination, en anglais», ajoute la lettre, qui précise qu’une version française est aussi fournie «afin que vous sachiez très exactement de quoi il retourne». Les entreprises partenaires doivent ainsi cocher deux cases, confirmant qu’elles sont «en conformité avec toutes les lois fédérales anti-discrimination applicables, ce qui est important pour les décisions de paiement du gouvernement» des États-Unis. Elles ne doivent pas non plus proposer de programme «DEI». Les destinataires ont seulement «cinq jours» pour répondre à l’administration, en renvoyant le formulaire en anglais. Dans le cas contraire, «nous vous serions reconnaissants de bien vouloir nous en donner les raisons en détail que nous ferons remonter à nos services juridiques», conclut Stanislas Parmentier.
L’administration américaine semble donc vouloir exporter son combat contre les politiques jugées «wokes» à l’extérieur de ses frontières. La menace était connue : au début du mois, plusieurs acteurs des télécoms avaient confié au Figaro avoir été sommés d’abandonner leur combat pour la diversité et l’inclusion, sous peine de rupture de contrats, voire de poursuites judiciaires. Une extraterritorialité «sidérante», dénonçait un dirigeant visé par cette politique.
Pour l’heure, impossible de connaître la liste des entreprises ayant reçu ce courrier. À date, l’ambassade américaine ne confirme pas cet envoi, indiquant simplement avoir examiné «15.600» contrats, prêts et aides à l’étranger. «Les mesures prises par l’administration mettent fin à des décennies de gaspillage, de fraude et d’abus», indique-t-on simplement. De son côté, le gouvernement français a indiqué être au courant de la situation, les firmes concernées ayant averti le ministère de l’Économie et des Finances. «Cette pratique reflète les valeurs du nouveau gouvernement américain. Ce ne sont pas les nôtres», indique l’entourage d’Éric Lombard. Et d’ajouter que le patron de Bercy «le rappellera à ses homologues au sein du gouvernement américain». Le bras de fer ne fait que commencer.