Municipales à New York : Zohran Mamdani, antithèse et antidote à Trump
Posté : 02 novembre 2025 17:23
Socialiste, musulman et intellectuel, le candidat à l’élection du 4 novembre dans la mégapole américaine incarne tout ce qui fait frémir le Président et l’extrême droite trumpiste, dont il semble aussi être le remède.
Deux visages de l’Amérique. Deux New-Yorkais aux antipodes. A droite, Donald Trump, 79 ans, milliardaire rancunier et fossoyeur en chef d’une nation qu’il prétend sauver. A gauche, Zohran Mamdani, 34 ans, né à Kampala, en Ouganda, musulman et socialiste, qui brigue mardi 4 novembre la mairie de New York. L’un rêve de murs, de tours dorées, et d’arroser d’excréments la moitié de ses concitoyens. L’autre imagine un pacte social réinventé, des bus et des crèches gratuites. Là où le Président dépeint les cités démocrates comme des enfers de crime et de décadence, Mamdani voit en New York une promesse : cabossée certes, hors de prix sans l’ombre d’un doute, mais vivante, vibrante et riche de sa diversité.
Trump le déteste. Evidemment. Tout, chez Mamdani, gratte l’épiderme du nationalisme blanc évangélique. Harvard, intellectuels, Ouganda, Syrie, art, socialisme, islam : le trentenaire et son cercle familial concentrent tous les mots qui font frémir l’extrême droite trumpiste. Il est l’immigrant, le musulman, le communiste – autant d’insultes tambourinées depuis des mois par le Président et ses sbires, dans un mélange de bassesse et d’idiotie. L’élu du Tennessee Andy Ogles le traite de «petit Mohammed», la représentante de Géorgie Marjorie Taylor Greene affuble la statue de la Liberté d’une burqa, celle de Caroline du Sud Nancy Mace regrette – photo de Mamdani à l’appui – que New York ait «oublié» le 11 Septembre. Trump, lui, questionne sa citoyenneté, comme il l’avait fait pour Obama, et menace de l’expulser. Toujours cette même haine recuite, raciste et islamophobe, comme si l’Amérique n’appartenait plus qu’à ceux qui la défigurent.
Sauf que Zohran Mamdani n’a prévu d’aller nulle part. Ou plutôt si : il fonce droit vers la mairie de la mégapole la plus peuplée, puissante et symbolique des Etats-Unis. Inconnu il y a un an, le voilà, à 34 ans, propulsé némésis du vieux milliardaire. Fils de Mira Nair, cinéaste de l’exil, et de Mahmood Mamdani, penseur des empires et du colonialisme ; époux d’une artiste d’ascendance syrienne ; diplômé en études afro-américaines ; rappeur à ses heures : Mamdani incarne tout ce que Trump ne sera jamais – cultivé, métissé, joyeux, érudit et populaire à la fois. Dans la ville qui l’a vu naître et où il a bâti son empire, ce contraste brûle comme une provocation pour le Président.
«La lumière peut venir de New York»
Mais Mamdani n’est pas seulement l’antidote à Trump. Il est aussi le remède à la défaite de Kamala Harris, à l’apathie démocrate, à cette gauche lasse qui a cessé d’y croire. Il refuse la politique défensive, fondée uniquement sur la peur ou l’opposition, qui s’épuise à dire «non» et «attention». Il incarne une autre énergie : celle du «oui». Oui, il est légitime de rêver d’une ville plus juste. Oui, le socialisme peut sauver le libéralisme de ses excès. «Nous ferons de notre ville un lieu où chaque personne qui y élit domicile peut mener une vie digne. Nous croyions hier, nous croyons aujourd’hui et nous croirons demain que c’est au gouvernement qu’il incombe d’assurer cette dignité», proclamait-il la semaine dernière.
C’est pour cela que tant d’électeurs, et en premier lieu les jeunes, voient en lui un remède, non seulement contre l’autoritarisme de Trump, mais contre la morosité de la gauche américaine, à qui Mamdani rend un peu d’espoir. En lui, New York retrouve son âme : celle des travailleurs, des immigrés, des rêveurs. «En cette période sombre, la lumière peut venir de New York», veut croire le trentenaire. Son ambition sera raillée par ses détracteurs et par les pessimistes de tous bords, prompts à rappeler à raison que New York n’est pas les Etats-Unis – et inversement. Il leur répondrait sans doute que toute révolution commence quelque part. Alors pourquoi pas là ? Make New York Great Again.
https://www.liberation.fr/international ... 5J63KAR5A/
Deux visages de l’Amérique. Deux New-Yorkais aux antipodes. A droite, Donald Trump, 79 ans, milliardaire rancunier et fossoyeur en chef d’une nation qu’il prétend sauver. A gauche, Zohran Mamdani, 34 ans, né à Kampala, en Ouganda, musulman et socialiste, qui brigue mardi 4 novembre la mairie de New York. L’un rêve de murs, de tours dorées, et d’arroser d’excréments la moitié de ses concitoyens. L’autre imagine un pacte social réinventé, des bus et des crèches gratuites. Là où le Président dépeint les cités démocrates comme des enfers de crime et de décadence, Mamdani voit en New York une promesse : cabossée certes, hors de prix sans l’ombre d’un doute, mais vivante, vibrante et riche de sa diversité.
Trump le déteste. Evidemment. Tout, chez Mamdani, gratte l’épiderme du nationalisme blanc évangélique. Harvard, intellectuels, Ouganda, Syrie, art, socialisme, islam : le trentenaire et son cercle familial concentrent tous les mots qui font frémir l’extrême droite trumpiste. Il est l’immigrant, le musulman, le communiste – autant d’insultes tambourinées depuis des mois par le Président et ses sbires, dans un mélange de bassesse et d’idiotie. L’élu du Tennessee Andy Ogles le traite de «petit Mohammed», la représentante de Géorgie Marjorie Taylor Greene affuble la statue de la Liberté d’une burqa, celle de Caroline du Sud Nancy Mace regrette – photo de Mamdani à l’appui – que New York ait «oublié» le 11 Septembre. Trump, lui, questionne sa citoyenneté, comme il l’avait fait pour Obama, et menace de l’expulser. Toujours cette même haine recuite, raciste et islamophobe, comme si l’Amérique n’appartenait plus qu’à ceux qui la défigurent.
Sauf que Zohran Mamdani n’a prévu d’aller nulle part. Ou plutôt si : il fonce droit vers la mairie de la mégapole la plus peuplée, puissante et symbolique des Etats-Unis. Inconnu il y a un an, le voilà, à 34 ans, propulsé némésis du vieux milliardaire. Fils de Mira Nair, cinéaste de l’exil, et de Mahmood Mamdani, penseur des empires et du colonialisme ; époux d’une artiste d’ascendance syrienne ; diplômé en études afro-américaines ; rappeur à ses heures : Mamdani incarne tout ce que Trump ne sera jamais – cultivé, métissé, joyeux, érudit et populaire à la fois. Dans la ville qui l’a vu naître et où il a bâti son empire, ce contraste brûle comme une provocation pour le Président.
«La lumière peut venir de New York»
Mais Mamdani n’est pas seulement l’antidote à Trump. Il est aussi le remède à la défaite de Kamala Harris, à l’apathie démocrate, à cette gauche lasse qui a cessé d’y croire. Il refuse la politique défensive, fondée uniquement sur la peur ou l’opposition, qui s’épuise à dire «non» et «attention». Il incarne une autre énergie : celle du «oui». Oui, il est légitime de rêver d’une ville plus juste. Oui, le socialisme peut sauver le libéralisme de ses excès. «Nous ferons de notre ville un lieu où chaque personne qui y élit domicile peut mener une vie digne. Nous croyions hier, nous croyons aujourd’hui et nous croirons demain que c’est au gouvernement qu’il incombe d’assurer cette dignité», proclamait-il la semaine dernière.
C’est pour cela que tant d’électeurs, et en premier lieu les jeunes, voient en lui un remède, non seulement contre l’autoritarisme de Trump, mais contre la morosité de la gauche américaine, à qui Mamdani rend un peu d’espoir. En lui, New York retrouve son âme : celle des travailleurs, des immigrés, des rêveurs. «En cette période sombre, la lumière peut venir de New York», veut croire le trentenaire. Son ambition sera raillée par ses détracteurs et par les pessimistes de tous bords, prompts à rappeler à raison que New York n’est pas les Etats-Unis – et inversement. Il leur répondrait sans doute que toute révolution commence quelque part. Alors pourquoi pas là ? Make New York Great Again.
https://www.liberation.fr/international ... 5J63KAR5A/
