La CNIL victime de son succès
Posté : 14 mai 2009 07:45
Pour ses trente ans, la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) peut s'enorgueillir d'être de plus en plus sollicitée. Selon les chiffres du rapport annuel rendus publics hier, la commission a reçu 4.244 plaintes de particuliers, soit deux fois plus qu'il y a dix ans. Mais les sanctions restent beaucoup plus rares - 9 sanctions financières pour un montant de 137.100 euros, 126 mises en demeure, 5 dénonciations au parquet et 1 avertissement - bien que l'activité contentieuse de la CNIL ait quasi doublé en deux ans. Selon son président, Alex Türk, ce décalage s'explique en grande partie par la limitation des moyens dont dispose la commission (voir ci-dessous) au regard de l'ampleur des sujets qu'elle est amenée à traiter. « La CNIL est la seule autorité totalement généraliste car l'informatique est présente dans 99 % des activités », souligne son président. Parmi les secteurs les plus visés, 25 % des plaintes concernent le commerce, notamment pour demander la radiation de coordonnées d'un fichier publicitaire, et 25 % le secteur banque-crédit, en particulier pour contester l'inscription sur le fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers.
Les erreurs du fichier STIC
Le droit d'accès indirect aux fichiers de police (fichiers STIC, Judex ou fichier des renseignements généraux) connaît lui aussi un succès difficile à gérer. La CNIL a reçu 2.516 demandes de particuliers en ce sens en 2008, soit une progression de 116 % sur cinq ans. Le nombre de demandes ne cesse de croître : 3.500 sont actuellement en cours (arrivées en 2002 et 2009).
Il faut dire que les récents rapports de la CNIL sur ces fichiers n'ont rien de rassurant : « Faute de mise à jour ou suite à des erreurs de saisie, 1 million de personnes environ sont dans un fichier alors qu'elles ne devraient pas s'y trouver », rappelle Alex Türk. Or l'inscription sur le fichier STIC, par exemple, peut avoir de lourdes conséquences en termes d'accès à certains emplois.
Vidéosurveillance : les excès
Autre cheval de bataille de la CNIL : la vidéosurveillance. En 2008, 2.588 déclarations de système de vidéosurveillance lui ont été adressées (deux fois plus qu'en 2007), et, parallèlement, 173 plaintes contestant la mise en place de tels systèmes lui sont parvenues. « Certains couplages de vidéosurveillance avec de la biométrie sont très intrusifs et exigent donc une grande vigilance », poursuit Alex Türk, qui s'est plaint une nouvelle fois des confusions liées à la coexistence de deux régimes juridiques. L'installation de caméras nécessite une autorisation préfectorale pour les lieux ouverts au public et une autorisation de la CNIL pour les autres, mais dès que la vidéosurveillance est couplée à de la biométrie, la CNIL doit être saisie, quel que soit le lieu. Le président de la commission demande une clarification. D'autant que le ministère de l'Intérieur veut tripler le nombre de caméras de vidéosurveillance sur le territoire français.