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Un policier à Manuel Valls : « Nous n’en pouvons plus de ce

Posté : 21 décembre 2012 04:49
par Gabylou
... mépris »

Monsieur le ministre de l’Intérieur, camarade Valls,

Comme beaucoup de nos concitoyens, et surtout comme homme de gauche, j’ai participé aux primaires organisé par le Parti socialiste en y déposant un bulletin de vote.

La campagne venue, j’ai, malgré mon devoir de réserve, accompagné notre parti à la victoire qui permit votre nomination comme ministre de l’Intérieur. « Le changement c’est maintenant » : ce slogan, cher camarade ministre, je l’ai crié et je l’ai porté.

Croyez-moi ou pas, je l’ai fait sans volonté personnelle de bénéficier de quoi que ce soit, ou de faire l’objet d’une quelconque bénédiction ministérielle (avancement, grade etc.), mais avec conviction.

Ces convictions qui ont fait de vous le maire d’Evry, le militant socialiste d’Argenteuil ou le responsable syndical à l’UNEF-ID, entre autres.

J’exerce mon métier de policier à Marseille, en brigade de nuit. Je risque ma vie tous les jours et ce risque, je l’ai choisi.

Des caractéristiques personnelles me permettraient de me planquer dans un bureau, aux frais de la princesse, mais j’ai fait le choix de la voie publique, de la rue et des risques qui s’y prêtent.

Aujourd’hui, je veux vous dire que nous n’en pouvons plus. Nous n’en pouvons plus de ce dédain, de ce mépris, de l’ignorance de ces chefs de service qui nous considèrent comme de simples exécutants, voire de minables collaborateurs, et non comme de véritables policiers.

Nous travaillons de nuit pour un salaire de misère : 80 centimes supplémentaires de l’heure, soit 250 euros en moyenne par trimestre, péniblement.

Nous sommes systématiquement rappelés sur nos repos lorsqu’un collègue est malade, pourrissant à la fois nos vies de famille et les relations entre collègues. Cela nous dresse les uns contre les autres et crée une rupture entre les policiers.

Alors que nous sommes dans le même bateau, l’administration se frotte les mains de nous voir dans la division à cause de sa politique de réduction des effectifs.

Nous voyons des collègues partir dans des services bien équipés (unités VTT, compagnies de sécurisation et d’intervention...).

Et nous, nous continuons à trimer sans moyens, dans des voitures sans chauffage ou puant le diesel, se taper des plaintes sur des ordinateurs dépassés, voire obsolètes vu les logiciels utilisés.

Y aurait-il plusieurs polices ? Camarade ministre, nous travaillons avec des jeunes Adjoints de sécurité (ADS) payés au smic, risquant leur vie pour une administration sans scrupules. Lorsque ceux-ci commettent une faute, ça vaut aussi pour nous, gardiens de la paix et gradés.

Nous devons bien souvent nous contenter d’un kebab mangé sur le pouce parce que le nombre des missions ne cesse d’augmenter. En parallèle, nos moyens – humains et matériels – fondent comme neige au soleil... de l’austérité.

Nous apprenons avec stupéfaction que nos chefs de service se régalent de primes annuelles avoisinant les 20 000 euros (info ou intox ?). Nous sommes obligés de nous acheter nos propres chaussures d’intervention (celles de notre administration sont douloureuses).

Je suis délégué à la CGT-Police, adhérent et militant au Parti socialiste. Je veux que vous sachiez, camarade Ministre, que je serai toujours dans le camp du progrès social, dans votre camp.

Mais je vous demande rapidement des signes visibles, afin que les hommes et les femmes dont j’ai contribué à la victoire me prouvent que « le changement c’est maintenant ». Car à l’heure où je vous écris cette lettre, je me pose cette question :

Le changement, c’est quand ?

Fraternellement,

Dominique Pierre, gardien de la paix à Marseille, délégué CGT-Police.



Making of:
Dominique Pierre le dit franco : « Je suis gardien de la paix à Marseille, membre du Parti socialiste et délégué de la CGT-police ». C’est au titre de ses trois casquettes qu’il a rédigé cette tribune. Les policiers étant soumis au devoir de réserve, il peut s’exprimer en son nom grâce à ses fonctions syndicales.

Si la CGT est un « gros » syndicat au niveau national, elle obtient de très faibles résultats dans la police (moins de 1% des voix aux dernières élections professionnelles), dominée par Unité SGP-Police et Alliance.
Camille Polloni


La police à Marseille:
Depuis plusieurs mois, la police fait parler d’elle à Marseille.
•Il y a eu l’affaire de la BAC Nord, quand seize policiers ont été mis en examen pour vol, extorsion d’argent et de drogue aux dépens de trafiquants. Leur brigade a été dissoute. Ce dossier pourrait être lié à la mort d’un indic’ en septembre 2008.
•Après plus de vingt meurtres depuis le début de l’année sur fond de banditisme, le ministère de l’Intérieur a envoyé des effectifs en renfort à Marseille.

Re: Un policier à Manuel Valls : « Nous n’en pouvons plus de ce

Posté : 21 décembre 2012 05:00
par Gabylou
Ce brave monsieur dont on peut sentir la détresse et le désespoir pour sa corporation n'a pas compris! pas encore :(

Re: Un policier à Manuel Valls : « Nous n’en pouvons plus de ce

Posté : 21 décembre 2012 09:39
par gemmill
:lol:

Re: Un policier à Manuel Valls : « Nous n’en pouvons plus de ce

Posté : 21 décembre 2012 11:10
par oO-Maverick-Oo
J'ai bien aime le "camarade Ministre" xD
Ça sent l'oxymore à plein nez :D

Eh bien sur que c'est le népotisme aussi dans l'administration au même titre que dans le privé.
Les cadres et les dirigeants se gavent, et les autres, le menu fretin, la piétaille, les sous-merdes ! Eux écopent des responsabilités sans la rémunération !
Le changement ? Eh bien, on n'y est pas encore !
Et il n'y a rien d'étonnant.

Re: Un policier à Manuel Valls : « Nous n’en pouvons plus de ce

Posté : 21 décembre 2012 11:19
par Jarod1
C'est, si je puis dire, encore plus grave dans la police parce que ceux qui font du terrain, du vrai (pas les CRS de Guéant qui sont campés devant ma Préfecture depuis 6 mois), sont exposés et absolument pas protégés par leur hiérarchie dont laseule consigne est "pas de vague".

Re: Un policier à Manuel Valls : « Nous n’en pouvons plus de ce

Posté : 21 décembre 2012 16:18
par meulan
Jarod1 a écrit : la seule consigne est "pas de vague".
Ne serait-ce pas la consigne favorite et l'objectif primordial de toute la hiérarchie de la haute fonction publique ?

mais QUI induit cette attitude mentale et ce type de comportement si ce n'est l'absence d'autorité des politiciens du système binaire de la Veme République... et, quelque part, d'absence de légitimité des élus quand bien même la légalité formelle maquillerait les copinages et coquinages des fils et filles de... issus du même milieu social et des mêmes classes... s'appropriant le champ politicien en pleine complicité avec ceux des mass-média, du show-bizz et du consumérisme markétinisé vers le futile du toujours plus et toujours néo de la gadgétisation... au service premier de QUI et de QUOI ?