Merkel préfère Cameron à Hollande
Posté : 16 avril 2013 12:01
Angela Merkel a mis les petits plats dans les grands pour accueillir David Cameron, confirmant qu'elle est en train de changer de partenaire privilégié.
L'histoire des relations entre les peuples est toujours marquée par des gestes forts et symboliques. Ceux de la réconciliation puis du duo franco-allemand, moteur de l'Europe depuis cinquante ans, ont été ponctués par des images mémorables : celle du général de Gaulle et du chancelier Adenauer sur le parvis de la cathédrale de Reims. Puis, celle des mains unies de François Mitterrand et d'Helmut Kohl au mémorial de Verdun. C'est une scène plus familiale et détendue qui pourrait aujourd'hui symboliser les retrouvailles de la vieille famille des Anglo-Saxons : celle des enfants de David Cameron, Nancy et Arthur, jouant dans le parc du château Meseberg, un château baroque à 80 kilomètres de Berlin, propriété du gouvernement fédéral. Car c'est là que très exceptionnellement - elle n'est en effet pas une habituée de ce genre de réception familière - la chancelière d'Allemagne avait convié, ce week-end, le Premier ministre britannique, David Cameron, et toute sa famille.
Au menu des discussions entre les responsables anglais et allemands - car les scènes champêtres appartenaient évidemment à un habillage médiatique soigneusement calibré -, la préparation du conseil européen du mois prochain, celle du G8 que doit présider le Royaume-Uni en juin en Irlande, la lutte contre les paradis fiscaux, la Syrie, l'Iran, l'Afghanistan. Autant de thèmes qui, en d'autres temps, auraient fait l'objet de discussions durant lesquelles Français et Allemands auraient donné le la de ce qu'allait être la politique européenne au cours des prochaines semaines. Sauf qu'aujourd'hui, c'est avec David Cameron qu'Angela Merkel essaie de construire une attitude commune. Et non avec François Hollande.
Hollande a refusé une réunion de conciliation France, Royaume-Uni, Allemagne
Il faut dire que, depuis son arrivée à l'Élysée, le président français a tout fait pour montrer que le temps de la complicité Merkel-Sarkozy avait vécu. Cela a commencé avec le souhait très idéologique, mais peu diplomatique, que Peer Steinbrück, le rival SPD de la chancelière, gagne les élections de septembre. Cela a continué avec le flirt appuyé du président français avec les pays du Sud, Espagne et Italie, et la méfiance affichée à l'égard de la politique d'austérité trop rigoureuse de l'Allemagne. Le summum a été atteint à Bruxelles, lors des discussions sur le budget européen, quand François Hollande a refusé de participer à une réunion de conciliation France, Royaume-Uni, Allemagne proposée par le président européen Van Rompuy. La chancelière et le Premier ministre britannique n'en sont pas encore revenus.
Que le président français veuille montrer sa différence et se démarquer de l'alliance dite "Merkozy", on peut le comprendre, puisqu'il prend systématiquement le contre-pied de ce que faisait son prédécesseur. Qu'il tourne le dos à la chancelière accusée d'insister pour que la France fasse des efforts de gestion de son économie, alors que le pays bat des records en matière d'impôts et de dépenses publiques (56,9 % en 2013), c'est bien plus contestable. Qu'il cherche à constituer un trio "anti-austérité" avec des pays pour le moment à la ramasse, comme l'Italie et l'Espagne, c'est carrément prendre le risque d'être marginalisé et de ne plus guère compter dans la conduite de l'Europe.
Le pire est que la nouvelle entente cordiale Cameron-Merkel au moment où le Premier ministre britannique demande une révision des traités européens est inquiétante pour l'avenir de l'Union. Même si la chancelière est loin d'approuver les excès d'euroscepticisme britannique en la matière, la rencontre de Meseberg ne constitue-t-elle pas un signal adressé à ceux qui, en Allemagne, dans la perspective des élections de l'automne seraient tentés de suivre le nouveau parti Alternative pour l'Allemagne qui vient de se créer ce dimanche ? La chancelière aussi doit tenir compte de ses eurosceptiques.