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C’est dans le plus grand secret que François Hollande et Jean-Marc Ayrault ont préparé l’annonce d’une remise à plat du système fiscal. Une manière de reprendre la main sur le plan politique et d’apaiser le climat social.

C’est l’histoire d’un changement de pied. Il y a deux mois, à l’Élysée, François Hollande confiait à quelques journalistes : «La réforme fiscale ? Elle se fait progressivement par les mesures que nous prenons et par la suppression des niches.» À l’époque, le Président se contentait de la méthode homéopathique pour mettre en œuvre l’une de ses promesses de campagne : une grande réforme fiscale. Lundi soir, changement de braquet : Ayrault annonce une «remise à plat de la fiscalité.» dans une interview aux «Échos». Objectif affiché : rendre l’impôt plus lisible et plus juste. Le Premier ministre procédera par concertation des partenaires sociaux. Toutes les hypothèses seront débattues, y compris une fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG. De l’homéopathie, on passe brusquement à l’opération chirurgicale.

Cette mutation a commencé dans le plus grand secret entre Hollande et Ayrault il y a un mois, lors de leurs déjeuners en tête-à-tête alors que la contestation monte dans le pays contre la fiscalité. «Ils sont alors convaincus qu’il faut prendre une décision pour redonner du sens à l’impôt et apaiser le climat. Finalement quoi de mieux qu’une remise à plat du système ?», explique-t-on à Matignon. D’autant que la fiscalité est au centre de revendications venant de différents milieux. A l’Assemblée, deux députées socialistes de la Commission des finances, Valérie Rabault (Tarn-et-Garonne) et Karine Berger (Hautes-Alpes) rédigent une «note blanche» sur la question. Les écologistes et des députés socialistes présentent un amendement commun au Projet de loi de financement de la sécurité sociale en faveur d’une progressivité de l’impôt. Enfin, lors de leurs contacts avec Ayrault, les leaders syndicaux indiquent à plusieurs reprises qu’ils sont «preneurs» d’une réforme fiscale.

Tout concourt donc à ce que Hollande et Ayrault franchissent le pas qu’ils hésitaient encore à accomplir à la fin de l’été. Mais rien ne doit filtrer de leurs conversations. Pas même les ministres concernés, Moscovici (à l’Economie) et Cazeneuve (au Budget), ne sont mis dans la confidence. «Il aurait suffi qu’une fuite parvienne jusqu’à l’administration de Bercy pour que l’affaire capote», souligne un conseiller du Président et du Premier ministre. C’est pourquoi, alors que Hollande et Ayrault préparent leur projet, Moscovici continue d’affirmer publiquement «qu’on ne peut pas faire de réforme fiscale quand la croissance est atone».

Jusqu’au dernier moment, les deux têtes de l’exécutif caleront les annonces d’Ayrault dans les «Échos». «Dimanche et encore lundi dans la journée, il y a eu des échanges téléphoniques entre Hollande qui était en Israël et Ayrault à Matignon», raconte un proche.

Lundi, en fin d’après-midi, lorsque la teneur des déclarations d’Ayrault est définitivement arrêtée, le Premier ministre informe Moscovici (qui se trouve en Israël avec Hollande !), Cazeneuve à son bureau de Bercy, et Christian Eckert, le rapporteur général du Budget (PS) à l’Assemblée. Puis, il reçoit les principaux responsables du PS auxquels il dévoile également ses batteries. Harlem Désir s’étonne. Mais tout le monde se range derrière Ayrault. Hier matin, le Premier ministre se rend devant le groupe socialiste à l’Assemblée afin d’expliquer sa démarche. Approbation générale.

«Aucun gouvernement n’a décidé de remettre à plat la fiscalité. C’est sans précédent», s’enthousiasme Thierry Mandon, porte-parole du groupe. Écologistes et radicaux de gauche approuvent aussi. En déclarant que «le temps est venu de procéder à une remise à plat de notre fiscalité», Jean-Marc Ayrault a ouvert le chantier de la réforme fiscale que «les Radicaux de gauche ont appelé de leurs vœux», déclare Jean-Michel Baylet. La droite est prise à contre-pied. «Écran de fumée», persifle l’UDI. «La priorité, c’est de baisser les impôts, et non une réforme technique», renchérit Copé (UMP).

Au-delà de l’aspect technique de la réforme, Ayrault joue aussi un joli coup politique. Il reprend la main alors que le gouvernement semblait débordé par la contestation de ces dernières semaines. En associant les syndicats -comme il l’avait fait pour les retraites- il espère désamorcer les mouvements sociaux. Enfin, en ouvrant lui-même le chantier, il s’impose à ses ministres de Bercy. «Avec cette grosse réforme, Ayrault reprend un bail à Matignon», décrypte un député socialiste. En clair, il sauve sa tête lors d’un éventuel remaniement…

Kelenner a écrit : C'est bien gentil tout ça, mais au bout d'un moment il faut être concret : c'est quoi le "gaspillage", sachant qu'on a déjà réduit drastiquement le nombre de fonctionnaires ?

VERNON a écrit :
Je ne sais pourquoi ; mais je suis dubitatif .

sacamalix a écrit : Idem, mais moi je sais pourquoi : c'est une réforme qui doit être menée avec ambition et courage pour être efficace... et personne dans le paysage politique français ne possède ces qualités

Jarod1 a écrit : Si la réforme fiscale Hollande est aussi réformiste que la réforme des retraites Hollande, ça se limitera à quelques hausses supplémentaires.

Quant à Ayrault, comme je ne suis pas certain qu'il passe le printemps, il peut un peu annoncer ce qu'il veut.

Ceci dit, ça ne m'étonnerait pas que Hollande nous prépare une "surprise politique" parce qu'il ne peut plus continuer dans un tel climat de défiance.