Page 1 sur 2

"On gagne et après on voit."

Posté : 17 mars 2014 12:19
par sacamalix
Le plus grand déficit dont souffre la France n'est pas économique, il est intellectuel. Les semaines passent qui illustrent chacune la lugubre désolation du paysage politique. Les partis en France ne travaillent plus que pour se faire élire. Tous suivent le principe de Jacques Chirac: "On gagne et après on voit."

Après, face à la réalité, ils doivent renoncer à leurs promesses, ils paraissent désemparés, menteurs, impuissants et quelques mois suffisent pour que l'opinion les rejette. Voilà le gouvernement de gauche qui s'est cogné au mur du réel, qui a pris un bon «tournant» mais qui l'assume tellement mal qu'il retarde tout quand il devrait accélérer. Voilà des écologistes perdus dans une radicalité en échec. Et voilà une droite qui va de scandale en scandale, sans bilan et sans ligne, qui énonce toujours que le choix du chef prime sur les idées. Les solutions magiques des extrêmes séduisent-elles de plus en plus? Si elles étaient mises en oeuvre, plus irréalistes encore, elles décevraient violemment ceux qui se risquent à y croire.

Où sont les partis qui pensent la société d'aujourd'hui ? On se posait la question à deux reprises cette semaine lors d'une conférence à la Fondation Jean-Jaurès autour de Pierre Rosanvallon et de son dernier livre, Le Parlement des invisibles, et lors d'un colloque de l'Institut de l'entreprise autour du projet de «Big Society» de David Cameron, «Royaume-Uni, l'autre modèle?».

A gauche et à droite, il est des think tanks en France qui font leur travail pour tenter de comprendre pourquoi, justement, les politiques se sont enfermés dans un professionnalisme où ne compte que leur propre réélection, pourquoi ils ignorent cette «réalité» mondialisée et technologique dans laquelle se débattent les gens, pourquoi, comme le dit Pierre Rosanvallon, «la démocratie représentative est-elle en crise?» et pourquoi «la politique est-elle devenue impuissante à améliorer la vie?».

La réponse est dans la radicalité des changements de cette société. Le capitalisme a déstructuré les grandes usines d'hier, explique Rosanvallon, et la nouvelle réalité ouvrière est dans ces centres logistiques qui trient les commandes passées sur Internet. La gauche politique croit encore que l'ouvrier est à Aulnay, dans des emplois qu'elle imagine pouvoir encore «défendre», quand il est chez Amazon. Les vraies misères d'aujourd'hui lui sont inconnues, les vrais «ouvriers», entendez les défavorisés, ne sont ni vus ni écoutés. En outre, leurs souffrances ont changé de nature, poursuit Rosanvallon: elles ne viennent plus tant des conditions sociales, des situations, que des possibilités de les perdre, de la crainte d'être déclassé. La crise politique vient d'abord de cette méconnaissance.

Phillip Blond, directeur du think tank britannique ResPublica, l'un des promoteurs de la Big Society qui est, depuis, très déçu par David Cameron, partage ce constat de la radicalité des changements. La gauche, dit-il, malgré des budgets en hausse, ne parvient pas à sortir les catégories défavorisées de la pauvreté et à sécuriser les salariés. La droite est incapable d'offrir un capitalisme populaire, les richesses sont captées par une étroite élite et par des firmes géantes, «des oligarques, dont même la Russie aurait honte».

L'étatisme de gauche et le libéralisme de droite ont échoué tous deux, ils laissent les individus perdus. Gauche et droite se sont ligués, dit Blond, pour détruire les structures intermédiaires comme la famille, les solidarités locales ou communautaires et, au bout du compte, la société est «brisée».

La «Big Society» est un projet qui vise à remplacer localement l'Etat providence par des associations, des organismes de bienfaisance et, de façon plus nouvelle, par des entrepreneurs sociaux qui, étant plus efficaces et moins chers que l'administration, seront rémunérés par une ristourne sur ce gain. En Grande-Bretagne, David Cameron veut promouvoir un business «fraternel». En France, le gouvernement de gauche veut similairement développer le mutualisme et les mouvements associatifs, sous le nom d'«économie sociale et solidaire».

Les critiques sont nombreuses contre le projet de «Big Society» en Grande-Bretagne, d'abord sur son ampleur concrète. Eudoxe Denis, directeur des études à l'Institut de l'entreprise, plaide dans un rapport très complet pour montrer qu'ont été positivement mises en route de très nombreuses initiatives comme beaucoup d'«écoles libres» (rendues complètement autonomes dans leur gestion). Mais les fonds alloués au total par le gouvernement britannique restent modestes. La gauche française prend avec mépris cette «Big Society», qu'elle qualifie de paravent pour les coupes budgétaires sévères dans l'Etat providence.

Mais l'inspiration des deux côtés de la Manche a des points communs. Dans une société de l'individualisme, où les trajectoires sont toutes différentes et complexes, il est légitime de démassifier les services publics. Au-delà du choix des moyens, l'Etat traditionnel ou un business fraternel, la politique change profondément de nature. La distribution d'aides et de subventions abondantes est terminée faute de moyens: d'où une première exigence de contrôle despotique de l'efficacité de l'argent public.

Une seconde exigence est plus profonde: la politique doit admettre puis expliquer que son rôle est devenu très difficile et très faible. Elle doit s'appliquer à rendre le pouvoir aux gens, c'est-à-dire une dignité, une autonomie, une confiance et, in fine, une attention aux autres. Quel homme politique osera avouer une telle humilité?

Eric Le Boucher

Re: "On gagne et après on voit."

Posté : 17 mars 2014 12:23
par Fonck1
ah ben c'est sûr : quand on réélit depuis des lutres les même partis qui ne respectent pas leurs engagements,voir nominativement les même politiques,il ne faut pas s'étonner de se faire avoir.

les français reprochent aux autres le travail qu'ils ne font pas eux même,il faut quand même pas déconner :lol:

Re: "On gagne et après on voit."

Posté : 17 mars 2014 12:45
par PascalL
Quand on a transféré le pouvoir à une entité supra-national sans tenir compte des volontés des peuples (voire même contre l'avis du peuple), il ne faut pas s'étonner que les décisions soient prises 'ailleurs'...

Ces libéraux mondialisés s'étant 'épargner' la légitimité des élections, ils ne rendent des comptes qu'à eux-mêmes et leurs banquiers (garant du coffre fort).

Pour le reste, dans le monde du 'grand capital' il n'existe qu'une seul règle: la loi du plus fort!

(quand tu baisses ta culotte, il ne faut pas t'étonner d'être pris pour ce que tu n'es pas...)

Re: "On gagne et après on voit."

Posté : 17 mars 2014 13:33
par Fonck1
PascalL a écrit : Quand on a transféré le pouvoir à une entité supra-national sans tenir compte des volontés des peuples (voire même contre l'avis du peuple), il ne faut pas s'étonner que les décisions soient prises 'ailleurs'...
oui,d'ailleurs la jeunesse de ce pays (comme des autres d'ailleurs) se sentent déjà plus européen que français,la page va tourner.
Ces libéraux mondialisés s'étant 'épargner' la légitimité des élections, ils ne rendent des comptes qu'à eux-mêmes et leurs banquiers (garant du coffre fort).
une bonne fois pour toute,c'est qui c'est "libéraux mondialisés"?

moi,quand j'achète ailleurs qu'en france,ce qui peut arriver,je me sent comme un libéral mondialisé,et ça ne me pose pas de problème.
ça ne pose non plus pas de problème au vigneron qui vends son vin en chine.
Pour le reste, dans le monde du 'grand capital' il n'existe qu'une seul règle: la loi du plus fort!

(quand tu baisses ta culotte, il ne faut pas t'étonner d'être pris pour ce que tu n'es pas...)
la loi du plus fort existe depuis toujours,c'est pas une nouveauté.

Re: "On gagne et après on voit."

Posté : 17 mars 2014 13:54
par sacamalix
PascalL a écrit : Quand on a transféré le pouvoir à une entité supra-national sans tenir compte des volontés des peuples (voire même contre l'avis du peuple), il ne faut pas s'étonner que les décisions soient prises 'ailleurs'...

Ces libéraux mondialisés s'étant 'épargner' la légitimité des élections, ils ne rendent des comptes qu'à eux-mêmes et leurs banquiers (garant du coffre fort).

Pour le reste, dans le monde du 'grand capital' il n'existe qu'une seul règle: la loi du plus fort!

(quand tu baisses ta culotte, il ne faut pas t'étonner d'être pris pour ce que tu n'es pas...)
Aurais-tu "occulté" que dans l'article, la gauche est tout autant montrée du doigt que la droite ? ::d

Re: "On gagne et après on voit."

Posté : 17 mars 2014 14:02
par Jarod1
C'est trop facile de dire que "les partis" ont fait ci ou que les "libéraux" dont effectivement on ne sait jamais qui ils sont ont fait ça.

Bien sûr, un parti sert à remporter des scrutins mais il ne fait pas que ça. Il y a aussi de vrais débats internes, mais encore faut-il s'impliquer pour le savoir. Je suis adhérent d'un parti depuis des lustres, bien sûr c'est chiant quand on parle de l'élection locale parce qu'on est pas sur les idées, mais il y a aussi de vraies discussions et je pense que c'est pareil dans tous les partis.

L'article parle de "déficit intellectuel". Ce que je comprends comme "nous n'avons pas d'idées pour résoudre les problèmes".

Je ne partage absolument pas cet avis. Les idées, nous les avons, les politiques les ont. C'est le courage de les mettre en œuvre qui fait défaut. Le pacte de machin en est l'exemple même : un Président de gauche a le courage de décrire ce qu'il faut faire et qui a plutôt fonctionné partout ailleurs. Mais il ne se passe rien. La droite n'ayant pas fait mieux dans le passé malgré les beaux discours (voir la dérive des comptes publics).

L'intellect, on l'a. C'est au niveau des couilles que ça coince.

Re: "On gagne et après on voit."

Posté : 17 mars 2014 14:06
par Fonck1
Jarod1 a écrit : L'intellect, on l'a. C'est au niveau des couilles que ça coince.
:+1

Re: "On gagne et après on voit."

Posté : 17 mars 2014 14:23
par Mister Polark
Jarod1 a écrit : C'est trop facile de dire que "les partis" ont fait ci ou que les "libéraux" dont effectivement on ne sait jamais qui ils sont ont fait ça.

Bien sûr, un parti sert à remporter des scrutins mais il ne fait pas que ça. Il y a aussi de vrais débats internes, mais encore faut-il s'impliquer pour le savoir. Je suis adhérent d'un parti depuis des lustres, bien sûr c'est chiant quand on parle de l'élection locale parce qu'on est pas sur les idées, mais il y a aussi de vraies discussions et je pense que c'est pareil dans tous les partis.

L'article parle de "déficit intellectuel". Ce que je comprends comme "nous n'avons pas d'idées pour résoudre les problèmes".

Je ne partage absolument pas cet avis. Les idées, nous les avons, les politiques les ont. C'est le courage de les mettre en œuvre qui fait défaut. Le pacte de machin en est l'exemple même : un Président de gauche a le courage de décrire ce qu'il faut faire et qui a plutôt fonctionné partout ailleurs. Mais il ne se passe rien. La droite n'ayant pas fait mieux dans le passé malgré les beaux discours (voir la dérive des comptes publics).

L'intellect, on l'a. C'est au niveau des couilles que ça coince.
C'est comme le lobby sioniste. Ils sont partout, mais on les vois jamais.

Re: "On gagne et après on voit."

Posté : 17 mars 2014 14:26
par Jarod1
Mister Polark a écrit : C'est comme le lobby sioniste. Ils sont partout, mais on les vois jamais.

Mais les deux ont un point commun : "la Finance" (??????????????????????? :content79 )

Re: "On gagne et après on voit."

Posté : 17 mars 2014 16:03
par bigboul
Les politiques ne manquent pas d'idées, ils n'ont même que ça. Et leur application pourrait faire sourire si elles n'étaient pas tristement prévisibles. Car il faut bien le reconnaître, de droite ou de gauche, aucune idée innovante fonctionnelle (sauf peut-être chez Mélenchon qui est pour une VIe République et donc pour continuer à accompagner le capitalisme) n'a vu le jour depuis longtemps sauf à réduire les droits et le pouvoir d'achat des travailleurs.
Ce qui est vraiment drôle c'est que les "intellectuels" découvrent ça et que eux-même, mieux armé que ces petits roitelets, ne trouvent rien d'autre que la réduction de la voilure étatique. Même José Bové fait mieux qu'eux.
Aujourd'hui seules deux positions sont tenables : le repli sur les frontières en mettant des soldats tout le long de la frontière en attendant comme en Crimée la venue des chars russes; ou bien l'internationalisation fédéralisée où les politiques prendraient enfin le pouvoir sur le monde dont disposent, et utilisent aujourd'hui, les grands puissants occultes.
Ces deux possibilités, les islamistes peuvent les mettre en application. Il remplacent juste les politiciens par les barbus enturbannés. Doit-on leur laisser l'initiative ?
Maintenant attention de ne pas élire un homme de paille qui ne serait pas mieux qu'un homme de dieu. emoticon-0174-bandit

Re: "On gagne et après on voit."

Posté : 17 mars 2014 16:05
par Jarod1
Perso, quand je lis "aucune idée innovante sauf peut-être chez Mélenchon", j'arrive plus à prendre le reste au sérieux. :lol:

Re: "On gagne et après on voit."

Posté : 17 mars 2014 16:05
par sacamalix
Jarod1 a écrit : Perso, quand je lis "aucune idée innovante sauf peut-être chez Mélenchon", j'arrive plus à prendre le reste au sérieux. :lol:
:+1 ::d ::d

Re: "On gagne et après on voit."

Posté : 17 mars 2014 18:25
par Kelenner
Ce n'est pas faux pourtant. Lorsque je lis les programmes des différents partis, et ce même lors d'une élection capitale comme les présidentielles, je suis frappé par le manque d'envergure des promesses.

Quelles étaient les propositions phares de Sarkozy ou Hollande en 2007 ou 2012 ? La défiscalisation des heures supps, le "mariage pour tous", des allègements de charges sur les bas salaires, des coupes budgétaires pour maîtriser la dette... Des programmes de gestionnaires à la petite semaine, sans envergure, des collections de mesurettes techniques sans aucune vision d'avenir claire. Je ne comprends même pas la déception des gens vis-à-vis de Hollande, son programme était vide, il avait annoncé la couleur d'emblée.
On peut rajouter le Modem, l'UDI, les Verts... qui proposent peu ou prou la même politique à 3 détails près.

Pour entendre un autre son de cloche, il reste donc le FN, Dupont-Aignan et le Front de Gauche. Encore une fois on a tout à fait le droit de ne pas adhérer aux idées de Mélenchon, je suis très sceptique sur un certain nombre de points moi-même, mais son programme est pratiquement le seul à avoir une orientation claire et des mesures fortes : 6ème République, relance de la consommation par les salaires, refondation de l'Europe... On peut douter de sa sincérité et de sa capacité à mettre en oeuvre l'ensemble de son programme s'il était élu, mais on comprend ce qu'il veut faire et le but fixé.

Re: "On gagne et après on voit."

Posté : 17 mars 2014 19:21
par le parisien
Dans tous les partis, yen a qui ont des idées neuves, qui veulent bousculer un peu le train-train mais ils sont réduits au silence par les anciens : "Ce n'est pas notre ligne politique", "Les français ne sont pas prêts pour ça", etc...

Re: "On gagne et après on voit."

Posté : 17 mars 2014 19:21
par Fonck1
Jarod1 a écrit : Perso, quand je lis "aucune idée innovante sauf peut-être chez Mélenchon", j'arrive plus à prendre le reste au sérieux. :lol:
moi,c'est le innovante surtout qui m'a fait rire :lol: