Licenciement par société de gauche
Posté : 18 novembre 2019 17:40
https://www.lepoint.fr/postillon/sebast ... _BT=110352
Sébastien Le Fol – Quand la gauche veut licencier ses détracteurs
ÉDITO. Après les propos d'Alain Finkielkraut sur le viol, des pétitionnaires demandent son éviction de France Culture. Même le pire des patrons n'oserait pas ! Par Sébastien Le Fol
Modifié le 18/11/2019 à 12:12 - Publié le 18/11/2019 à 11:34 | Le Point.fr
On peut juger déplacée, excessive ou dépourvue de finesse la sortie d'Alain Finkielkraut l'autre soir sur LCI. Interrompant, excédé, Caroline De Haas, qui lui reprochait sa position indulgente dans l'affaire Roman Polanski – une façon de « banaliser la réalité du viol », selon elle –, le philosophe a lancé : « Violez, violez ! Voilà, je dis aux hommes : violez les femmes ! D'ailleurs, je viole la mienne tous les soirs… »
La phrase de Finkielkraut était tellement outrancière qu'il parlait à l'évidence au second degré. Ce style de pirouette sémantique est de plus en plus mal toléré sur les tatamis médiatiques, comme l'a montré Didier Pourquery dans un livre définitif sur la question : En finir avec l'ironie ? (Robert Laffont).
Voir sur ce sujet Didier Pourquery – Qui veut la peau du second degré ?
Pour preuve, une pétition a été lancée contre Finkielkraut sur le site Change.org. Les signataires – plusieurs milliers à l'heure où nous écrivions ces lignes – l'accusent de « faire l'apologie du viol en appelant les hommes à violer leurs femmes ». Les anti-Finkielkraut prennent ses déclarations au premier degré. Selon eux, celles-ci ne relèvent pas d'une opinion qu'il conviendrait de contredire avec des arguments, mais d'un « délit » passible, rappellent-ils, de « 5 ans d'emprisonnement et 45 000 euros ».
L'accusation ainsi formulée, les signataires prononcent leur sentence : ils exigent… le retrait de Finkielkraut de France Culture où il anime le samedi matin l'émission Répliques. Autrement dit, ils demandent à la patronne de Radio France de licencier sur-le-champ l'un de ses animateurs. France Culture étant, précisent-ils, « une radio publique financée à hauteur de 80 % par la contribution à l'audiovisuel public ». Sous entendu, sur le service public des gens comme Finkielkraut n'ont pas leur place... Pas impossible que des gens de gauche comptent parmi ces signataires. Il est même probable que beaucoup d'entre eux ont signé d'autres pétitions dénonçant la brutalité du capitalisme, les méthodes barbares des patrons, la casse sociale… L'auraient-ils oublié au moment d'appeler à la mort sociale d'un homme dont, certes, ils ne partagent ni les idées ni l'humour, mais qui risque tout de même de perdre son emploi à la suite de leur action ?
Il en est ainsi de l'évolution du débat d'idées dans notre pays. Première étape : criminalisation des idées qui ne sont pas les nôtres. En cas de persistance du mal, obstruction des débats où elles pourraient s'exprimer. Si malgré les barricades, elles demeurent dans le cerveau malade de quelques esseulés, il suffit de leur couper les vivres à défaut de la tête. Voici donc l'argument ultime des nouveaux censeurs. Vous n'êtes pas d'accord avec moi ? Je ne chercherai même pas à vous contredire. Je vais m'employer à vous faire perdre votre boulot. Sans entretien préalable. Le droit social ? Pas pour mes ennemis.
Travailleurs de tous les pays, unissez-vous contre ces nouveaux exploiteurs à la susceptibilité épidermique ! Souvenons-nous de la phrase du révolutionnaire Proudhon : « Ironie, vraie liberté. »
Sébastien Le Fol – Quand la gauche veut licencier ses détracteurs
ÉDITO. Après les propos d'Alain Finkielkraut sur le viol, des pétitionnaires demandent son éviction de France Culture. Même le pire des patrons n'oserait pas ! Par Sébastien Le Fol
Modifié le 18/11/2019 à 12:12 - Publié le 18/11/2019 à 11:34 | Le Point.fr
On peut juger déplacée, excessive ou dépourvue de finesse la sortie d'Alain Finkielkraut l'autre soir sur LCI. Interrompant, excédé, Caroline De Haas, qui lui reprochait sa position indulgente dans l'affaire Roman Polanski – une façon de « banaliser la réalité du viol », selon elle –, le philosophe a lancé : « Violez, violez ! Voilà, je dis aux hommes : violez les femmes ! D'ailleurs, je viole la mienne tous les soirs… »
La phrase de Finkielkraut était tellement outrancière qu'il parlait à l'évidence au second degré. Ce style de pirouette sémantique est de plus en plus mal toléré sur les tatamis médiatiques, comme l'a montré Didier Pourquery dans un livre définitif sur la question : En finir avec l'ironie ? (Robert Laffont).
Voir sur ce sujet Didier Pourquery – Qui veut la peau du second degré ?
Pour preuve, une pétition a été lancée contre Finkielkraut sur le site Change.org. Les signataires – plusieurs milliers à l'heure où nous écrivions ces lignes – l'accusent de « faire l'apologie du viol en appelant les hommes à violer leurs femmes ». Les anti-Finkielkraut prennent ses déclarations au premier degré. Selon eux, celles-ci ne relèvent pas d'une opinion qu'il conviendrait de contredire avec des arguments, mais d'un « délit » passible, rappellent-ils, de « 5 ans d'emprisonnement et 45 000 euros ».
L'accusation ainsi formulée, les signataires prononcent leur sentence : ils exigent… le retrait de Finkielkraut de France Culture où il anime le samedi matin l'émission Répliques. Autrement dit, ils demandent à la patronne de Radio France de licencier sur-le-champ l'un de ses animateurs. France Culture étant, précisent-ils, « une radio publique financée à hauteur de 80 % par la contribution à l'audiovisuel public ». Sous entendu, sur le service public des gens comme Finkielkraut n'ont pas leur place... Pas impossible que des gens de gauche comptent parmi ces signataires. Il est même probable que beaucoup d'entre eux ont signé d'autres pétitions dénonçant la brutalité du capitalisme, les méthodes barbares des patrons, la casse sociale… L'auraient-ils oublié au moment d'appeler à la mort sociale d'un homme dont, certes, ils ne partagent ni les idées ni l'humour, mais qui risque tout de même de perdre son emploi à la suite de leur action ?
Il en est ainsi de l'évolution du débat d'idées dans notre pays. Première étape : criminalisation des idées qui ne sont pas les nôtres. En cas de persistance du mal, obstruction des débats où elles pourraient s'exprimer. Si malgré les barricades, elles demeurent dans le cerveau malade de quelques esseulés, il suffit de leur couper les vivres à défaut de la tête. Voici donc l'argument ultime des nouveaux censeurs. Vous n'êtes pas d'accord avec moi ? Je ne chercherai même pas à vous contredire. Je vais m'employer à vous faire perdre votre boulot. Sans entretien préalable. Le droit social ? Pas pour mes ennemis.
Travailleurs de tous les pays, unissez-vous contre ces nouveaux exploiteurs à la susceptibilité épidermique ! Souvenons-nous de la phrase du révolutionnaire Proudhon : « Ironie, vraie liberté. »