À Paris, une salle pour consommateurs de drogue ciblée par l’extrême droite
Posté : 11 décembre 2022 07:22
POLITIQUE - Ce samedi 10 décembre dans la matinée, plusieurs dizaines de militants d’une formation d’extrême droite plutôt confidentielle (Argos) ont pris pour cible la salle de consommation à moindre risque pour les usagers de drogues, située dans le 10e arrondissement de Paris.
« Je condamne fermement ces violences. Nous ne céderons rien face à ces tentatives d’intimidation et ces menaces fascistes », a réagi sur Twitter la maire socialiste du secteur, Alexandra Cordebard, témoignant de son « soutien » à l’association Gaïa qui gère le lieu.
Auprès du HuffPost, l’entourage de l’élue dénonce un épisode « choquant et violent » visant « un lieu de soin » géré par des professionnels de la santé et du social, ouvert en 2016.
« Ça s’est passé aux alentours de 8 h 30. La police est rapidement intervenue, donc ils ont vite été dispersés. Ils ont déversé du faux sang et des seringues devant l’enceinte. C’est un coup de pression qui vise à intimider », poursuit-on de même source, citant également quelques « dégradations » commises par ces militants d’extrême droite.
« Fermeture symbolique »
Raison pour laquelle l’association en charge de cette structure annonce au HuffPost vouloir porter plainte. « Au-delà du fait que c’est quand même particulier de jeter des seringues et du faux sang sur un établissement de soin, cet événement témoigne du grand décalage qui existe entre ce qu’on fait et la perception que certains peuvent en avoir », déplore un médecin exerçant dans ce centre.
« Les usagers que l’on reçoit viennent pour consommer un substitut dans des conditions sécurisées, et sont accompagnés par des médecins, infirmiers et travailleurs sociaux », poursuit notre interlocuteur, qui précise que les militants du groupe Argos « n’ont rien fermé du tout contrairement à ce qu’ils affirment sur les réseaux sociaux ».
Dans la foulée, le groupe a en effet publié sur Twitter un clip de revendication, sur fond de fumigènes, de musique électro et d’autopromotion. « Une cinquantaine de jeunes activistes d’Argos se sont rendus dans le 10e arrondissement de Paris pour procéder à une fermeture symbolique de la salle de shoot », écrivent-ils dans un communiqué, dénonçant une « prolifération de la culture de la drogue en Europe » qui serait « aidée par une immigration hors de contrôle ».
Argos est un groupuscule officiellement lancé au mois d’octobre, sur les cendres de Génération identitaire, dissous en mars 2021. Comme l’écrivait alors StreetPress, ces militants se disent en lutte face à une « offensive anti-française, anti-européenne et anti-blanche ».
« On laisse faire ? »
Reprenant les codes esthétiques et le goût de l’agit-prop qui ont fait la marque de Génération identitaire, le groupuscule compte par ailleurs plusieurs anciens membres de l’organisation dissoute, dont plusieurs ont été identifiés par StreetPress.
Sans surprise, l’action menée par Argos a provoqué de nombreuses réactions indignées, surtout à gauche. « La multiplication des agressions par la mouvance identitaire, à Paris, Lyon ou ailleurs devait être un sujet de préoccupation majeure. L’extrême droite violente (GUD, Zouaves, Action française) se réarme. On laisse faire ? », s’est indigné sur Twitter le député socialiste Jérôme Guedj, quand son collègue LFI Thomas Portes a dénoncé une « nouvelle attaque de militants d’extrême droite ».
« Ce qui s’est passé est inacceptable. Nous poursuivrons cette politique de santé publique qui fait ses preuves. Nous continuerons de soutenir le travail indispensable des associations. Nous ne lâcherons rien face à ces intimidations », a de son côté dénoncé la maire de Paris, Anne Hidalgo.
En mai 2021, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale avait publié une étude tirant un bilan positif de salles de consommation de drogue à moindre risque.
« Les salles de Paris et Strasbourg montrent les mêmes résultats qu’ailleurs dans le monde : elles diminuent les pratiques d’injection à risque, le nombre d’injections dans l’espace public, le risque d’overdoses, le risque d’aller aux urgences et la probabilité de commettre des délits », résumait à l’AFP Marie Jauffret-Roustide, sociologue de l’Inserm qui a coordonné une partie de cette étude.
L’association qui gère ce lieu de soin annonce au « HuffPost » porter plainte. Derrière ce « coup de pression », un groupuscule né sur les cendres de Génération identitaire.
https://www.huffingtonpost.fr/politique ... 11359.html
P'tit supplément :
Le projet Argos est né au cœur de l’été et a été annoncé à la rentrée. Lancé par des anciens du groupuscule dissous Génération identitaire, il en reprend les codes et les méthodes, mais s’ouvre aux autres chapelles de l’extrême droite.
...
La communication d’Argos est même soigneusement expurgée de toute mention du mot « identitaire ». Ils multiplient les signaux aux autres courants de la droite radicale. Outre les poncifs sur « la défense de la civilisation européenne », l’accent est mis notamment sur cette volonté « communautaire » qui fait florès chez les fafs. Et ça fonctionne : l’initiative de cette « jeunesse alternative » semble par exemple plaire aux éléments zemmourisants des jeunes d’Action française, dont certains d’ailleurs avaient déjà des yeux de Chimène pour GI. Le compte Twitter spécialisé en OSINT, Sources Ouvertes, a identifié plusieurs de ces militants royalistes sur des photos du nouveau groupe.
https://www.streetpress.com/sujet/16661 ... eme-droite
« Je condamne fermement ces violences. Nous ne céderons rien face à ces tentatives d’intimidation et ces menaces fascistes », a réagi sur Twitter la maire socialiste du secteur, Alexandra Cordebard, témoignant de son « soutien » à l’association Gaïa qui gère le lieu.
Auprès du HuffPost, l’entourage de l’élue dénonce un épisode « choquant et violent » visant « un lieu de soin » géré par des professionnels de la santé et du social, ouvert en 2016.
« Ça s’est passé aux alentours de 8 h 30. La police est rapidement intervenue, donc ils ont vite été dispersés. Ils ont déversé du faux sang et des seringues devant l’enceinte. C’est un coup de pression qui vise à intimider », poursuit-on de même source, citant également quelques « dégradations » commises par ces militants d’extrême droite.
« Fermeture symbolique »
Raison pour laquelle l’association en charge de cette structure annonce au HuffPost vouloir porter plainte. « Au-delà du fait que c’est quand même particulier de jeter des seringues et du faux sang sur un établissement de soin, cet événement témoigne du grand décalage qui existe entre ce qu’on fait et la perception que certains peuvent en avoir », déplore un médecin exerçant dans ce centre.
« Les usagers que l’on reçoit viennent pour consommer un substitut dans des conditions sécurisées, et sont accompagnés par des médecins, infirmiers et travailleurs sociaux », poursuit notre interlocuteur, qui précise que les militants du groupe Argos « n’ont rien fermé du tout contrairement à ce qu’ils affirment sur les réseaux sociaux ».
Dans la foulée, le groupe a en effet publié sur Twitter un clip de revendication, sur fond de fumigènes, de musique électro et d’autopromotion. « Une cinquantaine de jeunes activistes d’Argos se sont rendus dans le 10e arrondissement de Paris pour procéder à une fermeture symbolique de la salle de shoot », écrivent-ils dans un communiqué, dénonçant une « prolifération de la culture de la drogue en Europe » qui serait « aidée par une immigration hors de contrôle ».
Argos est un groupuscule officiellement lancé au mois d’octobre, sur les cendres de Génération identitaire, dissous en mars 2021. Comme l’écrivait alors StreetPress, ces militants se disent en lutte face à une « offensive anti-française, anti-européenne et anti-blanche ».
« On laisse faire ? »
Reprenant les codes esthétiques et le goût de l’agit-prop qui ont fait la marque de Génération identitaire, le groupuscule compte par ailleurs plusieurs anciens membres de l’organisation dissoute, dont plusieurs ont été identifiés par StreetPress.
Sans surprise, l’action menée par Argos a provoqué de nombreuses réactions indignées, surtout à gauche. « La multiplication des agressions par la mouvance identitaire, à Paris, Lyon ou ailleurs devait être un sujet de préoccupation majeure. L’extrême droite violente (GUD, Zouaves, Action française) se réarme. On laisse faire ? », s’est indigné sur Twitter le député socialiste Jérôme Guedj, quand son collègue LFI Thomas Portes a dénoncé une « nouvelle attaque de militants d’extrême droite ».
« Ce qui s’est passé est inacceptable. Nous poursuivrons cette politique de santé publique qui fait ses preuves. Nous continuerons de soutenir le travail indispensable des associations. Nous ne lâcherons rien face à ces intimidations », a de son côté dénoncé la maire de Paris, Anne Hidalgo.
En mai 2021, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale avait publié une étude tirant un bilan positif de salles de consommation de drogue à moindre risque.
« Les salles de Paris et Strasbourg montrent les mêmes résultats qu’ailleurs dans le monde : elles diminuent les pratiques d’injection à risque, le nombre d’injections dans l’espace public, le risque d’overdoses, le risque d’aller aux urgences et la probabilité de commettre des délits », résumait à l’AFP Marie Jauffret-Roustide, sociologue de l’Inserm qui a coordonné une partie de cette étude.
L’association qui gère ce lieu de soin annonce au « HuffPost » porter plainte. Derrière ce « coup de pression », un groupuscule né sur les cendres de Génération identitaire.
https://www.huffingtonpost.fr/politique ... 11359.html
P'tit supplément :
Le projet Argos est né au cœur de l’été et a été annoncé à la rentrée. Lancé par des anciens du groupuscule dissous Génération identitaire, il en reprend les codes et les méthodes, mais s’ouvre aux autres chapelles de l’extrême droite.
...
La communication d’Argos est même soigneusement expurgée de toute mention du mot « identitaire ». Ils multiplient les signaux aux autres courants de la droite radicale. Outre les poncifs sur « la défense de la civilisation européenne », l’accent est mis notamment sur cette volonté « communautaire » qui fait florès chez les fafs. Et ça fonctionne : l’initiative de cette « jeunesse alternative » semble par exemple plaire aux éléments zemmourisants des jeunes d’Action française, dont certains d’ailleurs avaient déjà des yeux de Chimène pour GI. Le compte Twitter spécialisé en OSINT, Sources Ouvertes, a identifié plusieurs de ces militants royalistes sur des photos du nouveau groupe.
https://www.streetpress.com/sujet/16661 ... eme-droite