Qu'est-ce que Temu, l'inquiétante application shopping la plus téléchargée en France ?
Posté : 31 octobre 2023 14:17
"«Shop like a billionnaire» («achetez comme un milliardaire», en français). Ce slogan pompeux est celui de Temu, le site d’e-commerce du groupe PDD Holdings. Son application, elle, est disponible en France depuis le mois d’avril. Elle trône aujourd’hui en première position des applications gratuites les plus téléchargées du pays. De quoi faire de l’ombre au mastodonte de la fast fashion Shein (numéro 3 sur l’AppStore), et Amazon (6e place). Sur l’application mobile, on trouve de tout : bijoux, instruments de musique, produits électroniques, accessoires pour animaux... Mais surtout, de la mode à des prix imbattables. Comptez 1,97 euros pour le haut femme le moins cher, 2,48 euros pour une robe ou encore 37 centimes un lot de boucles d’oreilles. Le principe cartonne : selon un récent communiqué de Médiamétrie, Temu comptait 9,5 millions d'utilisateurs au mois de juin rien qu’en France. Des chiffres qui font pousser des ailes à cette société qui, lors du SuperBowl 2023, s’offrait 30 secondes de spot publicitaire pour 7 millions de dollars."
"Contrefaçon, conditions de travail des ouvriers...les premiers points noirs
Malgré tout, il y a un hic : comme sur Shein, les vêtements et accessoires de contrefaçon y coulent des jours heureux. Ainsi, un cardigan de la marque danoise Ganni se retrouve sur Temu dans une version sans manches. Le design, les couleurs, et même le logo : tout est copié-collé, avec un prix de vente ultra-accessible. On y croise aussi des pulls d’anciennes collections Zara, reproduits presque à l’identique. Le tout avec des frais de port minimes (ou carrément nuls), ainsi qu’une livraison la plus souvent offerte.
Ces géants savent qu'il est compliqué pour une jeune marque de s'engager dans des procédures
GÉRALDINE BLANCHE, SPÉCIALISTE DU DROIT DE LA MODE ET CHERCHEUSE À L'ÉCOLE DE DROIT DE SCIENCES PO PARIS
«La contrefaçon fait partie de leur business model, nous confie Géraldine Blanche, spécialiste du droit de la mode et chercheuse à l'école de droit de Sciences Po Paris. Ils n'ont pas besoin de tonnes d'équipes de designer, surtout aujourd’hui, avec l’intelligence artificielle qui s’occupe de tout. Ces géants savent qu’il est compliqué pour une jeune marque de s’engager dans des procédures. Donc même si quelqu’un décide de les poursuivre et que ça leur coûte, ça reste tout de même intéressant pour eux. Avec des volumes gigantesques, on ne perd pas de temps et d'argent». Quitte aussi à faire l’impasse sur les conditions de travail des ouvriers. Un rapport du comité spécial de la Chambre des représentants des États-Unis sur le parti communiste chinois accusait Temu, au mois de juin, d'avoir contourné les sanctions prévues par la loi américaine sur la prévention du travail forcé des Ouïghours. Autant de points faibles qui peuvent venir décourager les clients à aller plus loin : «J’ai acheté deux ou trois fois mais j’ai arrêté car il y a eu une alerte sur ce site pour de la fraude à la carte bleue», ajoute Laeticia.
Suspicion d’espionnage
Autre point noir : la suspicion d’espionnage. Une information fournie par le média CNN qui, au mois d’avril, révélait dans une enquête que le groupe Pinduoduo (société sœur de Temu) avait pu s'immiscer dans des smartphones Android et ainsi «accéder aux contacts, calendriers, notifications et albums photos des utilisateurs sans leur consentement». De son côté, la société américaine d’analyses Grizzly Research indiquait que Temu pouvait détenir un logiciel espion «intelligemment caché, qui constitue une menace de sécurité urgente». Et de préciser : «Les appels vers des données et des fonctions d'appareils externes qui violent la vie privée des utilisateurs sont bien plus agressifs que n'importe quelle application d'achat grand public bien connue»."
https://madame.lefigaro.fr/style/news/q ... e-20231024
"Contrefaçon, conditions de travail des ouvriers...les premiers points noirs
Malgré tout, il y a un hic : comme sur Shein, les vêtements et accessoires de contrefaçon y coulent des jours heureux. Ainsi, un cardigan de la marque danoise Ganni se retrouve sur Temu dans une version sans manches. Le design, les couleurs, et même le logo : tout est copié-collé, avec un prix de vente ultra-accessible. On y croise aussi des pulls d’anciennes collections Zara, reproduits presque à l’identique. Le tout avec des frais de port minimes (ou carrément nuls), ainsi qu’une livraison la plus souvent offerte.
Ces géants savent qu'il est compliqué pour une jeune marque de s'engager dans des procédures
GÉRALDINE BLANCHE, SPÉCIALISTE DU DROIT DE LA MODE ET CHERCHEUSE À L'ÉCOLE DE DROIT DE SCIENCES PO PARIS
«La contrefaçon fait partie de leur business model, nous confie Géraldine Blanche, spécialiste du droit de la mode et chercheuse à l'école de droit de Sciences Po Paris. Ils n'ont pas besoin de tonnes d'équipes de designer, surtout aujourd’hui, avec l’intelligence artificielle qui s’occupe de tout. Ces géants savent qu’il est compliqué pour une jeune marque de s’engager dans des procédures. Donc même si quelqu’un décide de les poursuivre et que ça leur coûte, ça reste tout de même intéressant pour eux. Avec des volumes gigantesques, on ne perd pas de temps et d'argent». Quitte aussi à faire l’impasse sur les conditions de travail des ouvriers. Un rapport du comité spécial de la Chambre des représentants des États-Unis sur le parti communiste chinois accusait Temu, au mois de juin, d'avoir contourné les sanctions prévues par la loi américaine sur la prévention du travail forcé des Ouïghours. Autant de points faibles qui peuvent venir décourager les clients à aller plus loin : «J’ai acheté deux ou trois fois mais j’ai arrêté car il y a eu une alerte sur ce site pour de la fraude à la carte bleue», ajoute Laeticia.
Suspicion d’espionnage
Autre point noir : la suspicion d’espionnage. Une information fournie par le média CNN qui, au mois d’avril, révélait dans une enquête que le groupe Pinduoduo (société sœur de Temu) avait pu s'immiscer dans des smartphones Android et ainsi «accéder aux contacts, calendriers, notifications et albums photos des utilisateurs sans leur consentement». De son côté, la société américaine d’analyses Grizzly Research indiquait que Temu pouvait détenir un logiciel espion «intelligemment caché, qui constitue une menace de sécurité urgente». Et de préciser : «Les appels vers des données et des fonctions d'appareils externes qui violent la vie privée des utilisateurs sont bien plus agressifs que n'importe quelle application d'achat grand public bien connue»."
https://madame.lefigaro.fr/style/news/q ... e-20231024