Les médecins étrangers à nouveau dans la rue pour dénoncer leur précarité
Posté : 12 février 2025 06:31
Aujourd'hui les hôpitaux seront vidés de leurs médecins.
Les résultats du concours qui devait permettre aux praticiens diplômés hors de l’UE (Padhue) un parcours de régularisation, dévoilés de 31 janvier, ont ravivé leur colère. Ils manifestent ce mercredi 12 février à Paris pour dénoncer, encore une fois, leur situation.
Encore une fois, ils seront dans la rue ce mercredi 12 janvier. Encore une fois, ces médecins étrangers qui exercent pour la plupart au sein d’établissements hospitaliers depuis des mois voire des années, vont dénoncer leur précarité administrative et financière. Car malgré les annonces, les praticiens à diplôme étranger hors UE (les Padhue) ne voient aucune amélioration dans leur situation. L’étincelle provient cette fois des résultats des épreuves de vérification des connaissances (EVC) de 2024 – première étape vers leur régularisation – dévoilés le 31 janvier : sur les 4 000 postes annoncés, 3 235 candidats ont été reçus au concours en liste principale (638 en liste secondaire). Les syndicats dénoncent ainsi une suppression de postes et le fait que les notes couperet varient d’une spécialité à l’autre, sans que les candidats n’en aient été informés avant de passer les épreuves.
«Nous sommes sidérés par ce manque de transparence, tempête Kahina Hireche Ziani du syndicat SOS Padhue. Un chirurgien viscéral a été refoulé avec une note de 14,25 /20 ! Ses supérieurs lui ont assuré qu’il resterait dans son établissement, mais il est maintenu dans la précarité.» Ce concours très sélectif ouvre la voie à un parcours de consolidation de connaissances, fait de stages et de passages en commissions, pour ensuite obtenir une autorisation d’exercice. En attendant, les Padhue, à qui sont souvent confiées des responsabilités, officieusement, doivent enchaîner les contrats précaires sous-payés. S’ajoute aussi, pour certains, l’angoisse liée au renouvellement de leur titre de séjour.
Abdelhalim Bensaïdi, lui, a décidé de déposer un recours devant le tribunal administratif. «J’exerce depuis six ans en France, je veux continuer mais plus avec un statut précaire», martèle le diabétologue à l’hôpital de Nanterre, recalé avec un peu plus de 11 /20. Il est par ailleurs vice-président d’Ipadecc, l’association à l’origine de l’appel à manifester à Paris mercredi.
«Les jurys des différentes spécialités sont souverains pour arrêter leurs délibérations finales et arrêter la liste des lauréats sans avoir à pourvoir l’intégralité des postes initialement ouvertes au recrutement», a fait valoir le Centre national de gestion, en charge du concours, le 4 février. «Les critères et les notes minimales requises doivent être annoncés avant les épreuves, et non après la délibération», fulmine Ipadecc dans un communiqué. «Les candidats doivent pouvoir se préparer en connaissance de cause ! insiste Abdelhalim Bensaïdi. Si j’avais su la note minimale et le nombre de postes finalement pourvus en médecine générale, j’aurais tenté la gériatrie pour avoir plus de chances.»
Réforme annoncée pour 2025
L’exécutif se félicite, dans un communiqué, d’une augmentation de 50 % des admis sur liste principale par rapport à 2023 (ils étaient alors 2 205). Le ministre délégué à la Santé, Yannick Neuder, souligne même sa volonté «d’aller plus loin» pour «simplifier la procédure» dès 2025. Et ainsi réformer le concours «en créant notamment une voie interne pour les candidats exerçant déjà en établissement de santé en France». Une demande formulée depuis plusieurs années par les représentants de Padhue, qui pointent une iniquité entre les candidats qui passent le concours depuis l’étranger et les autres qui travaillent déjà dans les hôpitaux français et ont donc moins de temps pour réviser. Ils demandent également un recensement des Padhue en exercice en France pour adapter les ouvertures de postes – les syndicats les estiment entre 4 000 et 5 000.
Ce n’est pas la première fois que l’exécutif montre une image d’ouverture, rappellent-ils. Emmanuel Macron lui-même avait appelé, il y a un an, à régulariser «ceux qui tiennent à bout de bras» l’hôpital. «Rien n’avance depuis que l’association a été créée, il y a trois ans, souffle le représentant d’Ipadecc. Je ne compte même plus les mobilisations.»
Deux décrets passés en décembre ont certes créé un nouveau statut qui doit permettre d’exercer en France pendant treize mois, renouvelable une fois, en attendant de passer le concours. Il nécessite de passer par des commissions régionales, moyennant de nouvelles lenteurs administratives. Difficilement applicables sur le terrain, encore moins pour ceux travaillant déjà en France, pointent les syndicats. «Nous demandons que soit écrit noir sur blanc que les Padhue en poste ayant eu la moyenne soient retenus immédiatement pour entamer le parcours de consolidation», insiste Abdelhalim Bensaïdi.
Grève de la faim
Comble de la situation : nombre d’établissements ne pourraient pas tenir sans ces praticiens précarisés. «Dans les centres hospitaliers de villes moyennes, les Padhue permettent tout simplement de ne pas fermer les services», a reconnu fin janvier auprès de Libé Eric-Alban Giroux, directeur d’un hôpital de Mayenne. Mais, essorés par la précarité, certains finissent par jeter l’éponge. Quitte à partir dans d’autres pays européens comme l’Allemagne ou la Suisse. «J’y ai moi-même aiguillé des praticiens, où ils ont pu être régularisés, se désole Kahina Hireche Ziani. En France il n’y a pas d’issue, certains en viennent à avoir des pensées suicidaires.»
Alors cette manifestation n’est qu’une première étape, affirment les associations. Des représentants doivent être reçus mercredi par le ministère, «nous verrons ce qu’il en ressort», admet Abdelhalim Bensaidi, peu optimiste. Sinon, il y aura le tribunal administratif. Au-delà de la grève classique, certains réfléchissent aussi à une grève de la faim. «Nous ne lâcherons pas la cause.»
https://www.liberation.fr/societe/sante ... 2UJGP6NP4/
Les résultats du concours qui devait permettre aux praticiens diplômés hors de l’UE (Padhue) un parcours de régularisation, dévoilés de 31 janvier, ont ravivé leur colère. Ils manifestent ce mercredi 12 février à Paris pour dénoncer, encore une fois, leur situation.
Encore une fois, ils seront dans la rue ce mercredi 12 janvier. Encore une fois, ces médecins étrangers qui exercent pour la plupart au sein d’établissements hospitaliers depuis des mois voire des années, vont dénoncer leur précarité administrative et financière. Car malgré les annonces, les praticiens à diplôme étranger hors UE (les Padhue) ne voient aucune amélioration dans leur situation. L’étincelle provient cette fois des résultats des épreuves de vérification des connaissances (EVC) de 2024 – première étape vers leur régularisation – dévoilés le 31 janvier : sur les 4 000 postes annoncés, 3 235 candidats ont été reçus au concours en liste principale (638 en liste secondaire). Les syndicats dénoncent ainsi une suppression de postes et le fait que les notes couperet varient d’une spécialité à l’autre, sans que les candidats n’en aient été informés avant de passer les épreuves.
«Nous sommes sidérés par ce manque de transparence, tempête Kahina Hireche Ziani du syndicat SOS Padhue. Un chirurgien viscéral a été refoulé avec une note de 14,25 /20 ! Ses supérieurs lui ont assuré qu’il resterait dans son établissement, mais il est maintenu dans la précarité.» Ce concours très sélectif ouvre la voie à un parcours de consolidation de connaissances, fait de stages et de passages en commissions, pour ensuite obtenir une autorisation d’exercice. En attendant, les Padhue, à qui sont souvent confiées des responsabilités, officieusement, doivent enchaîner les contrats précaires sous-payés. S’ajoute aussi, pour certains, l’angoisse liée au renouvellement de leur titre de séjour.
Abdelhalim Bensaïdi, lui, a décidé de déposer un recours devant le tribunal administratif. «J’exerce depuis six ans en France, je veux continuer mais plus avec un statut précaire», martèle le diabétologue à l’hôpital de Nanterre, recalé avec un peu plus de 11 /20. Il est par ailleurs vice-président d’Ipadecc, l’association à l’origine de l’appel à manifester à Paris mercredi.
«Les jurys des différentes spécialités sont souverains pour arrêter leurs délibérations finales et arrêter la liste des lauréats sans avoir à pourvoir l’intégralité des postes initialement ouvertes au recrutement», a fait valoir le Centre national de gestion, en charge du concours, le 4 février. «Les critères et les notes minimales requises doivent être annoncés avant les épreuves, et non après la délibération», fulmine Ipadecc dans un communiqué. «Les candidats doivent pouvoir se préparer en connaissance de cause ! insiste Abdelhalim Bensaïdi. Si j’avais su la note minimale et le nombre de postes finalement pourvus en médecine générale, j’aurais tenté la gériatrie pour avoir plus de chances.»
Réforme annoncée pour 2025
L’exécutif se félicite, dans un communiqué, d’une augmentation de 50 % des admis sur liste principale par rapport à 2023 (ils étaient alors 2 205). Le ministre délégué à la Santé, Yannick Neuder, souligne même sa volonté «d’aller plus loin» pour «simplifier la procédure» dès 2025. Et ainsi réformer le concours «en créant notamment une voie interne pour les candidats exerçant déjà en établissement de santé en France». Une demande formulée depuis plusieurs années par les représentants de Padhue, qui pointent une iniquité entre les candidats qui passent le concours depuis l’étranger et les autres qui travaillent déjà dans les hôpitaux français et ont donc moins de temps pour réviser. Ils demandent également un recensement des Padhue en exercice en France pour adapter les ouvertures de postes – les syndicats les estiment entre 4 000 et 5 000.
Ce n’est pas la première fois que l’exécutif montre une image d’ouverture, rappellent-ils. Emmanuel Macron lui-même avait appelé, il y a un an, à régulariser «ceux qui tiennent à bout de bras» l’hôpital. «Rien n’avance depuis que l’association a été créée, il y a trois ans, souffle le représentant d’Ipadecc. Je ne compte même plus les mobilisations.»
Deux décrets passés en décembre ont certes créé un nouveau statut qui doit permettre d’exercer en France pendant treize mois, renouvelable une fois, en attendant de passer le concours. Il nécessite de passer par des commissions régionales, moyennant de nouvelles lenteurs administratives. Difficilement applicables sur le terrain, encore moins pour ceux travaillant déjà en France, pointent les syndicats. «Nous demandons que soit écrit noir sur blanc que les Padhue en poste ayant eu la moyenne soient retenus immédiatement pour entamer le parcours de consolidation», insiste Abdelhalim Bensaïdi.
Grève de la faim
Comble de la situation : nombre d’établissements ne pourraient pas tenir sans ces praticiens précarisés. «Dans les centres hospitaliers de villes moyennes, les Padhue permettent tout simplement de ne pas fermer les services», a reconnu fin janvier auprès de Libé Eric-Alban Giroux, directeur d’un hôpital de Mayenne. Mais, essorés par la précarité, certains finissent par jeter l’éponge. Quitte à partir dans d’autres pays européens comme l’Allemagne ou la Suisse. «J’y ai moi-même aiguillé des praticiens, où ils ont pu être régularisés, se désole Kahina Hireche Ziani. En France il n’y a pas d’issue, certains en viennent à avoir des pensées suicidaires.»
Alors cette manifestation n’est qu’une première étape, affirment les associations. Des représentants doivent être reçus mercredi par le ministère, «nous verrons ce qu’il en ressort», admet Abdelhalim Bensaidi, peu optimiste. Sinon, il y aura le tribunal administratif. Au-delà de la grève classique, certains réfléchissent aussi à une grève de la faim. «Nous ne lâcherons pas la cause.»
https://www.liberation.fr/societe/sante ... 2UJGP6NP4/