Une majorité de Français jugent notre système social trop généreux
Posté : 21 juin 2025 18:11
Une majorité de Français jugent notre système social trop généreux
Il n'y a guère de surprise. Sauf que ce sondage confirme que le RN est le partis des cas sociaux.EXCLUSIF - Une étude Ifop dont Le Figaro Magazine a pris connaissance montre que les propositions visant à limiter le montant global des prestations, à réformer l’aide médicale d’État et à durcir le régime d’indemnisation du chômage recueillent une approbation massive.
Peu efficace, injuste et trop coûteux : le jugement des Français sur notre système social est sans appel. Emmanuel Macron avait été tout aussi sévère en 2018 en affirmant devant ses conseillers : « On met un pognon de dingue dans les minima sociaux et les gens ne s’en sortent pas. » La séquence, diffusée sur Twitter par l’Élysée, était censée illustrer la volonté présidentielle d’en finir avec cette gabegie. Un quinquennat et demi plus tard, l’opinion considère que la révolution annoncée reste à faire.
L’étude Ifop commandée par Contribuables associés dont nous avons eu l’exclusivité montre même que jamais les Français n’ont été aussi nombreux à la souhaiter, puisque 36 % d’entre eux expriment la volonté d’une « réforme profonde » du système, contre 26 % en 2017. L’option d’un simple « aménagement » de certains des dispositifs existants n’est plus partagée que par 55 % de nos concitoyens, contre 72 % en 2017.
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56 % des personnes interrogées par l’Ifop jugent le niveau des prestations sociales en France trop élevé, soit 6 points de plus qu’en 2018. 76 % sont d’accord pour dire qu’« il y a trop d’assistanat en France », que « notre modèle social a trop d’effets pervers et n’encourage pas à faire des efforts ». 80 %, contre 78 % en 2017, ont le sentiment de plus contribuer au système social que d’en bénéficier.
«Discours anti-assistanat»
Pour Jérôme Fourquet, directeur du département Opinion de l’Ifop, « cette montée en puissance du discours anti-assistanat est le produit du renforcement de notre modèle social en réponse au chômage de masse qui a commencé à s’installer à la fin des années 1980 ». « La vision binaire de la société fondée sur un affrontement de classes entre les riches et les prolétaires a été progressivement remplacée par une vision tripolaire, analyse-t-il. Une nouvelle catégorie s’est ajoutée aux deux précédentes, celle des gens trop riches pour toucher des aides mais trop pauvres pour vivre correctement. »
La vision binaire de la société fondée sur un affrontement de classes entre les riches et les prolétaires a été progressivement remplacée par une vision tripolaire
Jérôme Fourquet, directeur du département Opinion de l’Ifop
Une population qui a bruyamment manifesté son ras-le-bol à l’occasion du mouvement des « gilets jaunes », fin 2018, comme l’auteur de Métamorphoses françaises * l’a constaté à l’époque : « Les “gilets jaunes” ont occupé les ronds-points parce qu’ils ne supportaient plus de voir autour d’eux des gens qui ne se levaient pas le matin, contrairement à eux, mais qui grâce aux aides diverses et variées, aux allocations logement, à la cantine gratuite, aux bons alimentaires, vivaient finalement à peu près comme eux. »
Logiquement, les catégories les moins aisées sont les plus rétives à une réforme en profondeur. 58 % des personnes touchant moins de 1300 euros par mois et même 65 % de celles percevant moins de 900 euros mensuels se contenteraient d’aménagements ponctuels. L’aspiration à un changement plus radical est la plus forte dans les classes moyennes, dont les revenus se situent entre 1300 et 2500 euros par mois.
Prudence de la classe politique
De ces chiffres découle l’adhésion massive à des mesures assimilées à gauche au libéralisme le plus échevelé, comme la création d’une allocation sociale unique dont le montant serait inférieur au salaire minimum, la transformation de l’aide médicale d’État (AME), réservée aux étrangers en situation irrégulière, en aide médicale d’urgence ou, encore, la suppression des allocations chômage à ceux qui ne cherchent pas vraiment de travail ou refusent des offres « raisonnables » (voir infographie).
À droite, ces mesures ne font pas non plus l’unanimité, même si de Laurent Wauquiez à Bruno Retailleau en passant par David Lisnard, les candidats potentiels à la prochaine présidentielle en ont adopté certaines. Chez les héritiers putatifs d’Emmanuel Macron, Édouard Philippe et Gérald Darmanin, la prudence est de mise. Marine Le Pen, quant à elle, n’oublie pas, contrairement à Éric Zemmour, qu’une partie de son électorat touche les minima sociaux. « Les Français eux-mêmes sont ambivalents, souligne Jérôme Fourquet. Ils n’aiment pas la figure du “cassos”, pour “cas social”, qui abuse du système, mais se disent qu’un accident de la vie peut les conduire eux aussi à en avoir besoin. » Où placer le curseur ? C’est toute la question.