Derrière le podcast de Louis Sarkozy, le média belge «21News», financé par Lagardère et Vincent Bolloré
Posté : 18 septembre 2025 15:25
Ils sont partout !!!...
Lancé par une figure locale de la politique wallonne, le site internet a récemment opéré une levée de fonds d’un million d’euros, auprès notamment du groupe français Lagardère. L’émission dans laquelle le fils de Nicolas Sarkozy reçoit des figures de la droite sera aussi distribuée par Europe 1.
Face-à-face, l’omniprésent nepo baby de la droite française et le président-tronçonneur argentin. L’interview de Javier Milei par Louis Sarkozy avait de quoi interloquer lorsqu’elle est apparue, subitement, le 3 septembre, sur le réseau social X ou dans des recommandations YouTube. Encore plus mystérieuse reste cependant sa provenance : un média belge inconnu au bataillon baptisé 21News. Comment le fils Sarkozy, désormais candidat à la mairie de Menton, et récente star d’un reportage déjà culte de Paris Match dans lequel il parade en maillot de bain sur la plage, présentant ses tatouages inspirés de Napoléon, s’est-il retrouvé à animer un podcast wallon ? Il y reçoit en tout cas des figures de droite, du ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, au député européen Les Républicains François-Xavier Bellamy, en passant, donc, par Milei ?
Derrière 21News (21, pour le XXIe siècle), qui compte un site internet assez sommaire et ce podcast de Louis Sarkozy (dénommé En toute liberté), on trouve surtout un homme, Etienne Dujardin. Juriste, chroniqueur pour divers médias belges, il est aussi élu local à Woluwe-Saint-Pierre, dans la région de Bruxelles, sous l’étiquette du Mouvement réformateur (MR), un parti de droite libérale dont le chef de file est Georges-Louis Bouchez. Cette figure tonitruante de la politique wallonne régulièrement mise en avant sur 21News était d’ailleurs le deuxième invité du podcast de Louis Sarkozy.
Organisation de marches anti euthanasie
Mais Etienne Dujardin se défend de l’idée que 21News soit une émanation médiatique du Mouvement réformateur : «Mon objectif en tant qu’entreprise commerciale de presse est tout le contraire d’être proche éditorialement d’un parti, explique-t-il à Libération. Il n’y a pas de proximité entre MR et 21News. Tous les médias parlent de Georges-Louis Bouchez qui est très vendeur, qui est à la tête du premier parti [de Belgique francophone, ndlr].» S’il a créé le site il y a près d’un an, en octobre 2024, c’est tout de même avec l’ambition de faire entendre des idées de droite libérale dans un paysage médiatique belge qu’il estime trop peu pluraliste.
La ligne ? «On défend la liberté et notamment la liberté d’entreprendre», poursuit-il. Jusqu’à lorgner la pensée libertarienne de Javier Milei, voire de certaines références du podcast américain comme Joe Rogan ? «Non, répond Dujardin. 21News n’est pas un média libertarien. Si vous voulez un exemple français, je dirai la ligne du Figaro, du Point, d’Europe 1 ou de l’Opinion.» Reste qu’Etienne Dujardin s’est aussi fait connaître en Belgique par des positions plus conservatrices que libérales, dès 2014 par l’organisation de marches anti euthanasie comme coordinateur du collectif des «Dossards jaunes».
La connexion avec le plus jeune fils de Nicolas Sarkozy s’est en tout cas faite rapidement : «Je le suivais sur LCI, je l’ai trouvé très bon dans l’exercice, impactant, retrace Etienne Dujardin. Je l’ai contacté pour qu’il réalise une chronique dans 21News, ce qu’il a accepté.» Est alors né au printemps En toute liberté, qu’on sent inspiré par le récent boom des podcasts de conversation politique outre-Atlantique, de ceux qui ont pesé dans le résultat de la dernière présidentielle américaine. «C’est vrai qu’en Europe on sent un retard par rapport aux USA sur ces formats», confirme Etienne Dujardin, ajoutant : «On veut inviter tout le monde. Des gens de gauche, de droite, des entrepreneurs, des artistes, des sportifs, pour des entretiens de fond, avec bienveillance, qui permettent aux invités de s’exprimer dans un format long sans être coupé tout le temps.»
L’audience du podcast reste cependant assez confidentielle : sur YouTube, le premier épisode, l’interview de Bruno Retailleau, a cumulé quelque 58 000 vues jusqu’ici – pas un carton. Mais cela reste toujours mieux que les entretiens suivants, qui tournent autour des 20 000 vues en moyenne. Le compte YouTube de 21News comptabilise, lui, un peu moins de 3 000 abonnés. Maigre. En toute liberté devrait néanmoins voir son public s’agrandir, le podcast étant désormais aussi distribué par Europe 1.
Etendre sa zone d’influence
Comme l’a initialement repéré l’observateur de la politique et des médias belges Michel Henrion, le récent partenariat avec la galaxie des médias de Vincent Bolloré est plus compréhensible au vu des dernières évolutions du capital de 21News et de sa société-mère MediaDW. Jusqu’ici seulement accompagné par l’homme d’affaires belge Pierre Rion, Etienne Dujardin a procédé durant l’été à une levée de fonds d’un peu plus d’un million d’euros auprès d’une dizaine d’investisseurs privés et de chefs d’entreprises. Parmi eux, le groupe Lagardère (qui n’a pas répondu aux sollicitations de Libération), propriété de Bolloré et maison-mère d’Europe 1. Sans révéler les parts du capital désormais détenues par Lagardère, Etienne Dujardin indique néanmoins que le groupe est «minoritaire et qu’on a un ancrage belge très majoritaire». Depuis le 1er août, deux dirigeants de la galaxie Bolloré représentent donc Lagardère au conseil d’administration de MediaDW, Damien Hammouchi (directeur du développement à Canal +) et Lodoïs Moreau (directeur de la performance financière et des acquisitions chez Lagardère). Louis Sarkozy a aussi été nommé administrateur.
Le président de ce conseil d’administration est, quant à lui, un autre homme bien connu du monde des médias français. Etienne Bertier fut longtemps le bras droit du magnat tchèque Daniel Kretinsky (propriétaire du groupe CMI, également créancier de Libération), avant de s’en éloigner depuis quelques années. En 2024, il a aussi conseillé le milliardaire d’extrême droite Pierre-Edouard Stérin dans son ambition, finalement avortée, de racheter l’hebdomadaire Marianne.
Du côté de 21News, pas de Stérin ou de Kretinsky en vue, a priori. Etienne Bertier, habitant de Woluwe-Saint-Pierre, ne représente que lui-même dans cette affaire, comme il le confirme à Libération : «Je connais Etienne Dujardin depuis quelque temps, c’est quelqu’un de persistant dans ses ambitions de créer son média. Il m’a demandé de rentrer dans son conseil d’administration.» Dujardin confirme : «Il [Etienne Bertier, ndlr] connaît très bien le monde de la presse, c’est pour cela qu’on lui a demandé de nous rejoindre.»
Cette nouvelle structure et l’apport des investisseurs français et belges devraient alors permettre à 21News de recruter de nouveaux journalistes et d’étendre sa zone d’influence vers la Flandre. «Les Néerlandophones souhaitent soutenir notre idée de média bilingue, indique ainsi Etienne Dujardin. 21News sera en deux langues d’ici la fin de l’année.» Avec l’ambition de diffuser ses idées de droite libérale et conservatrice à travers l’Europe, grâce au soutien de Lagardère et donc de Vincent Bolloré.
https://www.liberation.fr/economie/medi ... YQUEYGHVY/
Lancé par une figure locale de la politique wallonne, le site internet a récemment opéré une levée de fonds d’un million d’euros, auprès notamment du groupe français Lagardère. L’émission dans laquelle le fils de Nicolas Sarkozy reçoit des figures de la droite sera aussi distribuée par Europe 1.
Face-à-face, l’omniprésent nepo baby de la droite française et le président-tronçonneur argentin. L’interview de Javier Milei par Louis Sarkozy avait de quoi interloquer lorsqu’elle est apparue, subitement, le 3 septembre, sur le réseau social X ou dans des recommandations YouTube. Encore plus mystérieuse reste cependant sa provenance : un média belge inconnu au bataillon baptisé 21News. Comment le fils Sarkozy, désormais candidat à la mairie de Menton, et récente star d’un reportage déjà culte de Paris Match dans lequel il parade en maillot de bain sur la plage, présentant ses tatouages inspirés de Napoléon, s’est-il retrouvé à animer un podcast wallon ? Il y reçoit en tout cas des figures de droite, du ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, au député européen Les Républicains François-Xavier Bellamy, en passant, donc, par Milei ?
Derrière 21News (21, pour le XXIe siècle), qui compte un site internet assez sommaire et ce podcast de Louis Sarkozy (dénommé En toute liberté), on trouve surtout un homme, Etienne Dujardin. Juriste, chroniqueur pour divers médias belges, il est aussi élu local à Woluwe-Saint-Pierre, dans la région de Bruxelles, sous l’étiquette du Mouvement réformateur (MR), un parti de droite libérale dont le chef de file est Georges-Louis Bouchez. Cette figure tonitruante de la politique wallonne régulièrement mise en avant sur 21News était d’ailleurs le deuxième invité du podcast de Louis Sarkozy.
Organisation de marches anti euthanasie
Mais Etienne Dujardin se défend de l’idée que 21News soit une émanation médiatique du Mouvement réformateur : «Mon objectif en tant qu’entreprise commerciale de presse est tout le contraire d’être proche éditorialement d’un parti, explique-t-il à Libération. Il n’y a pas de proximité entre MR et 21News. Tous les médias parlent de Georges-Louis Bouchez qui est très vendeur, qui est à la tête du premier parti [de Belgique francophone, ndlr].» S’il a créé le site il y a près d’un an, en octobre 2024, c’est tout de même avec l’ambition de faire entendre des idées de droite libérale dans un paysage médiatique belge qu’il estime trop peu pluraliste.
La ligne ? «On défend la liberté et notamment la liberté d’entreprendre», poursuit-il. Jusqu’à lorgner la pensée libertarienne de Javier Milei, voire de certaines références du podcast américain comme Joe Rogan ? «Non, répond Dujardin. 21News n’est pas un média libertarien. Si vous voulez un exemple français, je dirai la ligne du Figaro, du Point, d’Europe 1 ou de l’Opinion.» Reste qu’Etienne Dujardin s’est aussi fait connaître en Belgique par des positions plus conservatrices que libérales, dès 2014 par l’organisation de marches anti euthanasie comme coordinateur du collectif des «Dossards jaunes».
La connexion avec le plus jeune fils de Nicolas Sarkozy s’est en tout cas faite rapidement : «Je le suivais sur LCI, je l’ai trouvé très bon dans l’exercice, impactant, retrace Etienne Dujardin. Je l’ai contacté pour qu’il réalise une chronique dans 21News, ce qu’il a accepté.» Est alors né au printemps En toute liberté, qu’on sent inspiré par le récent boom des podcasts de conversation politique outre-Atlantique, de ceux qui ont pesé dans le résultat de la dernière présidentielle américaine. «C’est vrai qu’en Europe on sent un retard par rapport aux USA sur ces formats», confirme Etienne Dujardin, ajoutant : «On veut inviter tout le monde. Des gens de gauche, de droite, des entrepreneurs, des artistes, des sportifs, pour des entretiens de fond, avec bienveillance, qui permettent aux invités de s’exprimer dans un format long sans être coupé tout le temps.»
L’audience du podcast reste cependant assez confidentielle : sur YouTube, le premier épisode, l’interview de Bruno Retailleau, a cumulé quelque 58 000 vues jusqu’ici – pas un carton. Mais cela reste toujours mieux que les entretiens suivants, qui tournent autour des 20 000 vues en moyenne. Le compte YouTube de 21News comptabilise, lui, un peu moins de 3 000 abonnés. Maigre. En toute liberté devrait néanmoins voir son public s’agrandir, le podcast étant désormais aussi distribué par Europe 1.
Etendre sa zone d’influence
Comme l’a initialement repéré l’observateur de la politique et des médias belges Michel Henrion, le récent partenariat avec la galaxie des médias de Vincent Bolloré est plus compréhensible au vu des dernières évolutions du capital de 21News et de sa société-mère MediaDW. Jusqu’ici seulement accompagné par l’homme d’affaires belge Pierre Rion, Etienne Dujardin a procédé durant l’été à une levée de fonds d’un peu plus d’un million d’euros auprès d’une dizaine d’investisseurs privés et de chefs d’entreprises. Parmi eux, le groupe Lagardère (qui n’a pas répondu aux sollicitations de Libération), propriété de Bolloré et maison-mère d’Europe 1. Sans révéler les parts du capital désormais détenues par Lagardère, Etienne Dujardin indique néanmoins que le groupe est «minoritaire et qu’on a un ancrage belge très majoritaire». Depuis le 1er août, deux dirigeants de la galaxie Bolloré représentent donc Lagardère au conseil d’administration de MediaDW, Damien Hammouchi (directeur du développement à Canal +) et Lodoïs Moreau (directeur de la performance financière et des acquisitions chez Lagardère). Louis Sarkozy a aussi été nommé administrateur.
Le président de ce conseil d’administration est, quant à lui, un autre homme bien connu du monde des médias français. Etienne Bertier fut longtemps le bras droit du magnat tchèque Daniel Kretinsky (propriétaire du groupe CMI, également créancier de Libération), avant de s’en éloigner depuis quelques années. En 2024, il a aussi conseillé le milliardaire d’extrême droite Pierre-Edouard Stérin dans son ambition, finalement avortée, de racheter l’hebdomadaire Marianne.
Du côté de 21News, pas de Stérin ou de Kretinsky en vue, a priori. Etienne Bertier, habitant de Woluwe-Saint-Pierre, ne représente que lui-même dans cette affaire, comme il le confirme à Libération : «Je connais Etienne Dujardin depuis quelque temps, c’est quelqu’un de persistant dans ses ambitions de créer son média. Il m’a demandé de rentrer dans son conseil d’administration.» Dujardin confirme : «Il [Etienne Bertier, ndlr] connaît très bien le monde de la presse, c’est pour cela qu’on lui a demandé de nous rejoindre.»
Cette nouvelle structure et l’apport des investisseurs français et belges devraient alors permettre à 21News de recruter de nouveaux journalistes et d’étendre sa zone d’influence vers la Flandre. «Les Néerlandophones souhaitent soutenir notre idée de média bilingue, indique ainsi Etienne Dujardin. 21News sera en deux langues d’ici la fin de l’année.» Avec l’ambition de diffuser ses idées de droite libérale et conservatrice à travers l’Europe, grâce au soutien de Lagardère et donc de Vincent Bolloré.
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