"Les Habits neufs de l'empereur"...
De Gaulle, Chirac, Sarkozy… Ceux qui, chez LR, visent la présidentielle puisent dans les habits d’antan de leur famille politique pour mordre sur l’électorat de Marine Le Pen.
La droite LR, c’est un magasin de fringues vintage dans lequel errent une poignée de présidentiables autodésignés qui se cherchent un style. Un magasin spécialisé en accoutrement de présidents. Il y a les grands uniformes de De Gaulle pour incarner le recours et la réserve de la République ; les queues-de-pie des portraits officiels qui disent la lignée historique des grands hommes ; les costards de Chirac aux larges épaules Guy Laroche et Christian Dior, habits de président BG mais sans personnalité stylistique, l’avantage du passe-partout qui ne choque personne ; le gris classique et le chapeau d’homme mystérieux de Mitterrand pour rassurer tout en intriguant, proximité et distance, les deux ingrédients de l’autorité naturelle ; les mocassins à talonnettes à glands de Sarkozy pour faire plus grand, plus riche, plus successful. Toutes les sortes d’accoutrements d’incarnations sont dans ce dressing LR, parti destiner à fabriquer un Président.
Les trois acheteurs du moment qui déambulent dans ce fatras sont Bruno Retailleau, Laurent Wauquiez et Xavier Bertrand. Chacun se construit un personnage. Et en ce moment critique, à quelques jours de la chute certaine de François Bayrou, l’attitude de chacun d’eux vis-à-vis de ce vote constitue un élément important du style qu’ils entendent proposer d’abord au «peuple de droite», tenté par l’offre autoritaire du RN, puis, si la sélection naturelle des sondages au fil des mois d’ici fin 2026 en décide, à l’ensemble des Français. Parce que pour l’imaginaire de droite, la présidentielle reste ce moment fondateur, cette rencontre, comme disait De Gaulle, entre le peuple, un homme et les circonstances.
Plaire aux électeurs partis au RN
Xavier Bertrand, Président de la région Hauts-de-France affirme que s’il était député il ne voterait pas la confiance à François Bayrou. En gaulliste social élu chez lui contre le RN il fait celui qui ne goûte guère l’idée que la politique de la France se fasse au détriment des classes populaires. Ex-président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez se compose, lui, un personnage de droite à l’emporte-pièce, porte-parole d’une supposée majorité silencieuse conservatrice et exaspérée par le «cancer de l’assistanat». Wauquiez a perdu à plates coutures l’élection interne à LR pour désigner le patron du parti, mais ça ne fait rien, il a rendez-vous avec le peuple, pas avec un parti. C’est ça qui est pratique avec le gaullisme. Il pose ses conditions drastiques au vote de la confiance du 8 septembre. Une bonne partie des parlementaires LR se tâte quant à leur attitude à adopter ce jour-là.
Bruno Retailleau, le troisième présidentiable, lui, se taille un habit cintré d’un classique bourgeois et conservateur bien droitier, mais responsable. Président du parti, il semble avoir perdu le contrôle de ses troupes. Il est le seul à vouloir voter la confiance à un gouvernement (quoi de plus normal) dont il fait partie et grâce auquel il a pu se faire connaître du grand public.
Les trois prétendants ont en tête le Rassemblement national, gros morceau de la droite. Le parti d’extrême droite risque d’avoir un sérieux problème d’incarnation dans les prochains mois. Marine Le Pen empêchée judiciairement et Jordan Bardella, celui qui n’a pas fini sa première année de géo, qui pourrait bien apparaître pour ce qu’il est à mesure que l’échéance présidentielle approche : un joli costume vide. Il faut donc se dépêcher d’investir le champ du RN. Bertrand par l’angle social, Wauquiez par l’angle autoritaire et Retailleau par l’angle réac. La stratégie présidentielle, et elle seule, bien plus que pour tous les autres mouvements politiques, explique les attitudes, les positionnements de chacun des trois leaders. Chacun occupe son temps à se construire – pauvreté idéologique affligeante – le personnage, la stature, le style supposé attendu par les Français au printemps 2027.
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Dans le vestiaire de la droite française : des costumes trop grands pour ses leaders
- Corvo
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