Le vol censé transporter mardi soir des migrants, dans le cadre d’un projet du gouvernement britannique pour décourager l’immigration illégale, a été annulé après des recours de dernière minute.
Source:Le Figaro.
L’usage veut que la monarchie ne se risque pas en politique. De manière très inhabituelle, donc, le prince Charles est sorti indirectement de sa réserve sur le sujet sensible de l’immigration. C’est dire si le projet du gouvernement de renvoyer au Rwanda des migrants arrivés illégalement au Royaume-Uni suscite une forte polémique.
En privé, selon la presse, l’héritier de la Couronne se serait dit «consterné» par cette approche «épouvantable».
À la veille du premier vol prévu, la justice britannique avait rejeté un appel de dernière minute d’associations de défense des réfugiés et d’un syndicat, qui voulaient bloquer le projet de Boris Johnson. La cour d’appel de Londres a suivi la Haute Cour, qui avait statué vendredi que ce premier départ pouvait avoir lieu. Puis la Haute Cour a également rejeté un autre recours lundi soir, intenté par l’association Asylum Aid. Enfin, mardi, des recours de dernière minute ont eu raison de ce premier vol après l’intervention de la Cour européenne des droits de l’Homme.
«Dernier billet annulé. Personne ne part au Rwanda», a tweeté l’association d’aide de soutien aux réfugiés Care4Calais, tandis que des sources gouvernementales ont confirmé à l’agence de presse britannique PA que l’avion prévu ne décollerait pas. L’audience finale sur l’ensemble de ce projet gouvernemental aura lieu en juillet.
En raison des recours judiciaires, le nombre de passagers censés embarquer sur le premier vol n’avait cessé de baisser, passant de 37 à 11, voire 8 ou 9 personnes. Parmi ceux-ci, quatre Iraniens, deux Irakiens, deux Albanais et un Syrien.
«On ne nous découragera pas de faire ce qu’il faut et de mettre en oeuvre nos plans pour contrôler les frontières de notre pays», a réagi mardi soir la ministre de l’Intérieur Priti Patel, ajoutant que l’équipe juridique du gouvernement «examine chaque décision prise sur ce vol et la préparation du prochain vol commence maintenant». Le gouvernement rwandais a, lui, affirmé qu’il n’était «pas découragé» par l’annulation du vol.
«Le Rwanda reste pleinement engagé à oeuvrer pour que ce partenariat fonctionne», a déclaré à l’AFP la porte-parole du gouvernement, Yolande Makolo.
Pour l’heure, quelque 130 migrants se seraient vu notifier un départ potentiel vers le Rwanda. Priti Patel, a déclaré que la «grande majorité» de ceux qui arrivent par des voies illégales - bateaux ou camions - sera susceptible d’être renvoyée au Rwanda. Le programme concernera toutefois essentiellement des adultes, et les familles arrivant au Royaume-Uni ne seront pas séparées.
Un dangereux précédent:
Londres a passé un accord avec le Rwanda pour y envoyer des demandeurs d’asile, à 6 000 kilomètres du royaume, contre un paiement initial de 140 millions d’euros, avec ensuite d’autres versements en fonction du nombre de migrants accueillis par le pays africain.
Le gouvernement britannique explique qu’il s’agit de dissuader les arrivées clandestines, toujours plus nombreuses, avec déjà plus de 10.000 traversées de la Manche depuis le début de l’année. Selon Boris Johnson, cette stratégie - elle rappelle celle menée par l’Australie - contribuera «à briser le modèle commercial de ces criminels impitoyables».
Au Rwanda, les migrants pourront faire une demande d’asile. Si elle est acceptée, ils pourront y rester, avec jusqu’à cinq ans d’accès à l’éducation et aux aides. Si elle est refusée, ils pourront demander d’autres voies d’immigration mais risqueront d’être expulsés. Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, le HCR, s’alarme ainsi qu’ils puissent être renvoyés dans leur pays avec des menaces de persécution.
Le patron du HCR, Filippo Grandi, a estimé que ce plan «a tout faux» et qu’il crée un dangereux précédent.
https://www.lefigaro.fr/international/b ... a-20220613