Aujourd'hui, les mots d'ordre sont design, nouvelles matières, écologie, gadgets techno. J'ai donc donné de ma personne, ainsi que quelques riverains, pour enquêter sur les sextoys qu'on retrouvera à coup sûr dans nos chambres dans les années à venir.
Et pour les acheter, fini les sexshop glauques : des magasins de jouets pour adultes sympas, accueillants et à la déco réjouissante attirent un public assez large.
« Ces objets ont dédramatisé les pratiques sexuelles avec jouets »
Cette évolution a d'abord été permise par celle des produits : puisque ceux-ci n'ont plus forcément une forme phallique, ils peuvent être exposés légalement en vitrine. C'est ce que m'a dit Lola, de 1969 :
« Je pense que ça a commencé à évoluer quand des marques ont proposé des produits plus design, des couleurs “fun”.
Ça a rendu le sextoy plus ludique et plus glamour, moins effrayant et moins culpabilisant donc plus désirable pour plus de gens. Ces nouveaux objets ont dédramatisé les pratiques sexuelles avec jouets et donc l'achat de ces derniers. »
Le canard Sonya Rykiel, un best-seller, mais un sextoy « nul »
On a commencé en voir à la télé, comme le « rabbit » héros de « Sex and the City ». Mais celui qui a définitivement enlevé au sextoy son stigmate, c'est le fameux canard vibrant de Sonya Rykiel. Succès côté ventes, pour un sextoy qui n'est pas une réussite sur un plan pratique, comme m'explique Fleur Breto, du Passage du Désir :
« Il fait mal, il n'est jamais utilisé, et en plus il coule dans le bain ! A part sa gueule sympa, et le fait qu'on puisse le laisser sur le rebord de la baignoire sans choquer personne, ça n'a vraiment pas d'intérêt.
Au bout de deux ans à expliquer à trente clients par jour que non, on n'a pas de canard vibrant, on a fini par céder. maintenant on le vend. Mais c'est nul. »
C'est vrai qu'on a fait tellement mieux depuis… Certains sextoys sont tellement jolis qu'on aurait envie de les exposer dans son salon. Comme le Enjoy, exposé dans une foire internationale d'art contemporain et vendu à la boutique du Moma de New York, ou le Delight, qui a reçu plusieurs prix de design.
Une utilisation partagée du sextoy qui ajoute du fun à la relation
Autre tournant majeur : en 2000, les sextoys, c'étaient principalement des godes, que les mecs pouvaient éventuellement utiliser, certes, mais plutôt destinées aux filles. En dix ans sont apparus de nombreux produits pour hommes, les cockrings vibrants tout jolis, les masturbateurs design, et même les plugs conçus pour exciter la prostate :
« 65% des sextoys pour hommes sont achetés par des femmes. Et si avant, on pouvait penser qu'on offrait un gode à sa copine, parce qu'on n'était pas assez “performant”, ce n'est plus le cas aujourd'hui, on en fait une utilisation partagée du sextoy et ça ajoute du fun dans les relations ».L
Le sextoy n'a pas échappé à la vague techno. Ainsi l'oeuf vibrant télécommandé a récolté un grand succès à son arrivée sur le marché. Fleur, qui n'est jamais à court d'anecdotes, raconte :
« Un couple m'a dit “on en rêvait, et ça tient toutes ses promesses, ça faisait dix ans qu'on ne s'était pas sautés dessus et déshabillés dans la voiture ! ”. On en vend 5 000 par an !
C'est pourtant l'antithèse du sextoy : on ne s'en sert pas à la maison, il ne mène même pas à l'orgasme, mais qu'est-ce qu'il fait monter la pression ! Jouer avec la télécommande et faire vibrer madame en plein dîner de famille, c'était un gros fantasme de beaucoup. Et puis ça fait aussi penser au “Déclic”, la BD de Manara. »
Sans compter ceux qui maintenant peuvent se télécommander à très longue distance par Internet, même si là, il y a un côté « je te contrôle même quand je suis pas là » qui me gêne un peu.
Au pays des sextoys innovants, il y a aussi des bides retentissants
Enfin toutes les nouveautés n'ont pas été des réussites. Comme le cône, sur lequel il faut venir s'assoir et mimer des poses lascives. Fleur :
« Il est finalement très anti-érotique et fait très scato. Des mecs ont dit à leur nana “tu fais quoi là ? tu coules un bronze ? ”. Bref, on essaye d'oublier. »
Côté sextoy consternant, Lola m'indique aussi le Vortex Vibrations, « un aspirateur de clitoris… Oui, imagine ça ! Il s'agit d'un embout qui se branche sur son aspirateur perso et qui vient chatouiller ledit clitoris ! Quelle idée ! ».
« Avec l'avancée des biotechnologies, peut-être des prothèses nervées ? »
Et si on regarde encore un peu plus loin dans le futur ? Mes deux correspondantes sont d'acccord, ce sera écolo ou ce ne sera pas. Pour Lola :
« On voit arriver de plus en plus de sextoys rechargeables, pour éviter les piles, voire ceux qu'on peut recharger avec une manivelle. Et peut-être suivant cette idée, de nouvelles matières, plus facilement biodégradables (ce qui n'est pas le cas du silicone), et encore plus réalistes au toucher. »
Quant à Fleur, qui venait peut-être de voir « Avatar » juste avant que je ne lui pose la question :
« Avec l'avancée des biotechnologies, peut-être des prothèses nervées ? »
Je vous laisse y réfléchir… Après avoir parlé de tout ça, j'ai forcément eu une envie folle de tester les jouets que je ne connaissais pas encore, et comme je n'avais pas assez de zones érogènes, j'ai demandé à des riverains de m'aider dans cette tâche ardue.
Voici donc une sélection de dix classiques du futur, en commençant par les trois qui ont été testés par des riverains. Les suivants l'ont été par ma pomme et des amis dévoués qui se reconnaitront. Au fait, merci à 1969 et au Passage du Désir d'avoir fourni la marchandise !
Le sextoy Ondine
1L'oeuf vibrant télécommandé Ondine
C'est Judy Minx, actrice porno et sex-éducatrice, qui, en tant que riveraine, a testé la chose. Voici un extrait de son témoignage, à retrouver en intégralité dans Rue69 :
« J'allais retrouver mon partenaire au centre LGBT, rue Beaubourg. Sans oublier de mettre d'abord un préservatif dessus, j'ai enfilé l'oeuf violet dans ma chatte avec l'aide d'un peu de lubrifiant, mis la télécommande dans mon sac à main, et j'ai filé.
A un moment, dans le métro, j'ai senti une vibration. […] j'ai compris que l'oeuf s'était mis en route, j'avais du déclencher le bouton à travers mon sac à main. […]
Arrivée au centre LGBT, j'ai mis la télécommande dans la main de mon partenaire sans lui dire un mot. […] Personne ne savait que j'avais un oeuf dans la chatte et on écoutait diverses personnes parler de prévention, quand tout d'un coup l'oeuf a commencé à vibrer.
La sensation n'était ni agréable ni désagréable. Je ne m'attendais pas à ce que ça soit exceptionnel du point de vue du plaisir purement physique de toute façon : les vibrations, c'est agréable sur le clito, mais à l'intérieur du vagin, c'est un peu bizarre. Et puis la matière du sextoy étant assez rigide, il n'est pas très confortable.
Au bout d'un moment, les vibrations répétitives, ça donne surtout l'impression d'être assise sur une machine à laver… J'avais peur que ma chatte finisse par être toute engourdie, toute anesthésiée, à force de bourdonner comme ça. »