
Le sens de cette formule est multiple. Pendant des décennies, ce fameux précepte existentiel a été la traduction d’un monopole phallocrate sur l’économie pulsionnelle du bureau.
La main en stationnement prolongé sur l’épaule, les remarques salaces entre deux parapheurs, le chantage sibyllin à l’emploi : cet érotisme lourd, à l’arrière-goût de tabac froid et de harcèlement moral, avait tout du romantisme médiéval. Sous le prétexte fallacieux de ne pas désorganiser la marche de l’entreprise, le chef se réservait l’exclusivité du droit de cuissage au moyen de cet interdit s’appliquant à tous, sauf à lui.
Aujourd’hui, dans un contexte hiérarchique plus transversal, l’expression « no zob in job » a pris un sens nouveau.
Au cœur de l’âpre compétition économique mondialisée, la pulsion doit s’orienter tout entière vers le travail, car il ne faut surtout pas dériver ce flux vital vers des objectifs qui n’auraient plus rien à voir avec un taux de rendement à deux chiffres. Pour mettre en place cette politique de ressources humaines à dominante hormonale, certains accouchent d’idées extrêmement réfrigérantes.
Ainsi, Apple et Facebook incitent leurs employées féminines à congeler leurs ovules en vue de différer leur grossesse. En plongeant ainsi son désir immédiat dans l’azote liquide pour se consacrer pleinement à ses dossiers urgents, on consent à voir sa sphère la plus intime prise en charge par le management.