gare au gorille a écrit : ↑07 juin 2025 00:28
Fonck1 a écrit : ↑05 juin 2025 18:39
il faudra dire cela à leurs électeurs des classes populaires racistes...donc, presque tous leurs électeurs
Boff, les électeurs RN ne sont pas plus racistes que les autres. Ils sont juste un peu moins dans le déni des réalité que les neuneux.
Un peu quand même non ?...
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Pour résumer, il n’est pas possible de qualifier de racistes l’entièreté de l’électorat multiple du FN/RN. En revanche, considérer qu’une partie de ce conglomérat, celle dont on s’attendrait à qu’elle vote plutôt à gauche, n’est pas ou peu raciste est tout aussi impossible. Cet électorat, constitué principalement de petits-moyens, possède de réelles motivations xénophobes et hiérarchise sa réalité en fonction de critères discriminants, basés sur la couleur de peau, la culture ou la religion (et également la classe sociale). Le FN/RN apparaît alors comme le seul parti capable de valoriser une identité perçue et vécue comme en danger et en manque de reconnaissance. Plus globalement, dans une société qui devient de plus en plus raciste, il est logique que l’appartenance à une norme blanche, déclarée majoritaire, et cela d’une façon qui ne saurait souffrir de discussion, et sans que l’on soit vraiment capable de définir cette norme par ailleurs, il est logique donc que l’appartenance à cette norme blanche – le bon ou la bonne Française – forme une pierre angulaire du classement et in fine de la séparation des individus. Enfin, sur ce point précis, on peut noter l’existence de sociabilisations proprement racistes chez les électeurs et électrices FN/RN (Faury, op. cit. ; Marchand-Lagier, 2017), soit des personnes qui tissent des liens en ayant comme signe de reconnaissance et d’inclusion la stigmatisation d’une ou plusieurs catégories de la population. A lieu ainsi un catapultage entre une société qui se laisse de plus en plus envahir par ses démons racistes et des sociabilisations abîmées par une paupérisation et tournées vers le rejet de certaines catégories de la population. La première trouve dans les secondes des formes d’expression concrètes qui lui donnent un corps, un ancrage social et les secondes une « ambiance de société », un cadre d’expression et de représentations qui souligne la justesse de leurs actes et pensées racistes.
Pour le dire de façon plus concise, tandis que les idées d’extrême-droite se diffusent, les personnes qui s’entendent pour rejeter, au hasard, les musulman-es ou assimilé-es tel-les quel-les, se sentent de plus en plus à l’aise pour assumer leur racisme.
Voter FN/RN… un acte raciste ?
J’aimerais finir par une réflexion plus personnelle, à partir des résultats et des constats exposés plus haut. Est-il imaginable que le FN/RN soit considéré comme un parti non raciste ? Le travail de normalisation, bien aidé par une participation médiatique qui va bien au-delà des médias appartenant aux milliardaires d’extrême droite, explique en partie la perception d’un parti comme les autres. Pourtant, cette normalité de façade ne résiste pas à la moindre analyse : par exemple, de nombreux et nombreuses candidates du FN/RN se sont illustré-es par des actes et/ou déclarations condamnables (lire l’article de Basta! à ce sujet) . Chacun-e peut également constater la diffusion d’un racisme de combat dans la société française, le racisme « bon-enfant » des blagues lourdes du tonton ayant été dépassé par un racisme politisé à l’extrême (dans tous les sens du terme), se réclamant défendre une société et une identité en danger. Alors quand des électeurs et électrices se refusent à voir des signaux clairs d’un parti toujours raciste, on peut s’interroger sur l’existence d’un biais cognitif, qui associerait besoin de rationalisation et de normalisation avec une sélection et/ou lectures faussées d’informations politiques. En d’autres termes, on vote FN/RN parce que ce parti est désormais normal et qu’on ignore ces « sorties » racistes ou les justifie par l’existence d’une menace (l’immigré, le musulman).
Demeure toutefois les personnes qui ne s’intéressent pas à la politique et ne suivent pas son actualité ; il est envisageable que ces personnes se soient faites avoir par cette longue opération de dédiabolisation ou de normalisation. Malgré tout, même si tel est le cas, comment imaginer que le RN, en tant qu’héritier du FN, puisse être compris comme autre chose que le « parti des racistes », pour grossir le trait ? Cela se confirme par des électeurs et électrices, éloignées de la vie politique mais se tournant naturellement vers le FN/RN pour exprimer leur rejet de l’immigration et des populations considérées comme non françaises ou pas assez (Barrault-Stella, Berjaud, 2017 ; Faury, op. cit.).
Plus tôt dans ce billet, j’ai écrit qu’il y avait assez d’éléments concrets ou, disons-le plus clairement, de preuves empiriques pour savoir si les électorats du FN/RN étaient racistes ou pas.
Au vu donc de ces éléments, je pense que la réponse est oui, dans l’ensemble, mais pas totalement, les électeurs et électrices du FN/RN sont racistes. Ce racisme n’est pas uniforme et peut aller d’une crainte de l’immigration et un rejet de l’Islam à un engagement dans un soit-disant combat de civilisation, ne serait-ce que par des mots et la défense de certaines constructions de la société, notamment le grand remplacement. Il existe certainement des électeurs et électrices qui baignent dans la confusion et se font berner par le FN/RN. Néanmoins, dans un premier temps, il s’agit sans doute d’une minorité et, dans un second temps, ce choix suscite forcément des interrogations. Comment l’expliquer quand il existe des alternatives connues, que sont la LFI et le PCF ? Si on écarte la LFI, parce que ce parti est présenté comme le parti de l’antisémitisme, de la « bordelisation » et du retour de la violence en politique, pourquoi ne pas choisir le PCF, vieux parti respectable, défendant le peuple populaire depuis ses débuts, avec à sa tête un chef qui montre des dispositions contre le libéralisme culturel ? A priori, le PCF aurait tout pour plaire. Bref, je pense que dans ce cas le racisme est l’élément explicatif le plus fort pour expliquer le vote FN/RN.
Par ailleurs, voter FN/RN revient à accorder de la légitimité à un parti raciste. A la fin du compte, même en ignorant tout ou presque de la vie politique – et on ne me fera pas croire que les électeurs et électrices ignorent que le RN est l’hériter direct du FN – , la conséquence est la contribution à un mouvement idéologique qui vise à créer un séparatisme au sein de la société, entre le bon ou la bonne française et le reste. S’il apparaît décisif de ne pas ridiculiser ou insulter cet électorat de « fâché pas fachos », ou de « racistes légers », ou simplement de personnes ayant été trompé-es par la normalisation du FN/RN, la responsabilité de leur acte ne doit pas non plus leur être épargnée – une infantilisation qui serait bien mal venue. Les erreurs et les fautes mêmes sont excusables, mais il ne faut pas contribuer à légitimer le racisme en refusant de le voir là où il est. Par ailleurs, l’expérience m’a prouvé que même en expliquant, avec des sources, des preuves et des arguments, ces électeurs et électrices reviennent avec une critique de l’assistanat (« non mais ces gens gagnent plus d’argent que moi en faisant rien »), de l’Islam (« les musulmans refusent de s’intégrer ») et de l’immigration (« on peut pas accueillir toute la misère du monde »). Je crains que le pari du FN/RN soit gagnant, à savoir nourrir une détestation plus forte de l’égalité ethno-raciale que la détestation des inégalités économiques et sociales.
Maintenant, il reste beaucoup de boulot à abattre et à répéter pour présenter le FN/RN comme un parti qui est non seulement raciste, ça c’est l’évidence, mais en plus bien de droite,
c’est-à-dire contre les intérêts des classes populaires et moyennes."
https://ptvirgule.hypotheses.org/4487