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Sov Strochnis a écrit : Pas de vidéos, pas de quoi juger. Je veux bien croire ces témoignages, je ne remets pas en cause l'existence de ces expériences, mais qu'elles aient pu avoir un rapport avec une libération d'une "conscience" en dehors du corps.
Pour vraiment juger un témoignage ou une théorie il faut avoir en possession:
- les données brutes, en l'occurence les données seraient: enregistrements audio et visuel des lieux. Données des appareils du patient. On pourrait donc savoir si le patient raconte son histoire alors qu'il n'y a personne d'autres dans la salle que le médecin (pour éviter les " ah tiens, l'infirmier qui rentre juste là je l'ai vu", à partir de là on ne saura jamais si c'est du flan...). L'enregistrement des données demande un protocole rigoureux, car le protocole détermine les données récoltées (j'ai donc dit visuel et auditif, mais si mon protocole n'indique pas "enregistrement des vibrations dans l'espace" nous n'aurions donc pas ces données qui pourraient se réveler importantes (c'est un exemple).)
- l'analyse des données et leur interprétation par des spécialistes.
Donc, forcément si on n'a qu'un résumé des interprétations sans voir les données, on ne saura jamais de quoi il retourne. Sinon voici c'qui s'passe dans la majorité des cas:
Je crois que le problème c'est qu'ON NE PARLE PAS LE MEME LANGAGE :
Si je tiens à coller le texte ci-dessous, c'est que je n'arrive pas à trouver les mots pour expliquer qu'il manque aux scientifiques et aux gens trop "logiques" les qualités de l' "artiste" pour entrer dans la compréhension de la spiritualité qui n'est pas un monde de preuve mais de ressenti... Que tout cela ce passe à l'intérieur de nous et se passe bien de preuve. Mais comment faire comprendre cela au monde "matériel".
Extrait :
...Ces positions semblent démontrer que Delsarte vise plutôt à prouver par « démonstration », en
soumettant diverses « propositions » à son « critérium d'examen» (tableau 4-1) alors que Steiner
cherche à éprouver1 les processus intérieurs accompagnant son investigation. Pourtant, dans
d'autres circonstances, Delsarte affirme qu'un élève de sa méthode « est un observateur
silencieux des phénomènes qui l'entourent et se manifestent au-dedans de lui-même. » (in Porte,
1992, 260).
1. Eprouver dans le sens de << ressentir >> comme dans celui de << mettre à l'épreuve >>.
Se situant tous deux sur le plan de l'art, ils cherchent à dépasser la forme pour en percevoir les
principes : Delsarte en examinant le corps «du point de vue de l'art » (1859, 105) où l'art est le «
télescope d'un monde surnaturel » (1865, 224) et Steiner en s'inspirant des travaux scientifiques
de Goethe sur la métamorphose des plantes où tout « est anime, vivifie, par un profond sentiment
artistique » (1919b, 32). Dépassant le strict domaine de la science et prolongeant le regard du
scientifique, l'art devient un pont vers « le monde surnaturel » pour l’un, et vers le monde «
suprasensible » pour l'autre.
SiSi l'art est intimement lié à la spiritualité chez l'un comme chez l'autre, les stratégies sont
différentes. Chez Delsarte l'évocation de l'art tend à susciter une émotion dans l'auditoire. Il est
mêlé à l'expérience mystique : mi et prière « se confondent dans un ineffable amour» (1865, 220)
et l'oeuvre possède des vertus rédemptrices agissant sur les Esprits, les âmes et sur toute la
nature (tableau 3-3). Quant à Steiner, il cherche plutôt à stimuler chez son auditoire un sentiment
artistique dans le but de percevoir un monde intermédiaire rythmique et musical reliant l'homme
terrestre à l'homme céleste.
Si les propos de Delsarte semblent plus dogmatiques, on peut toutefois deviner chez lui une
influence apparaissant d'une façon plus explicite chez Steiner. Se fondant sur l'incarnation du
Christ et sur la relation établie entre corps et Parole (tableaux 3-9 et 4-9), leurs approches
révèleraient en effet une influence johannite, courant ésotérique du christianisme : « Au
commencement était le Verbe... » (Prologue de l'évangile de St Jean).
3) Quelle vision du corps et du geste cette position leur offre-t-elle ?
L'application de leur modèle à l'organisation physique confirme les observations précédentes. Si
par le prisme ternaire de son « critérium d'examen » (1859, 104), le corps devient pour Delsarte
une « méthode » déterminant trois « appareils », vocal, dynamique et buccal, l’approche de
Steiner, plus systémique, attribue au système rythmique représente par le coeur (1921, 162) le
rôle d'intermédiaire entre les systèmes neuro-sensoriel et moteur (1923, 56). Le premier offre
donc dit corps une vision anatomique et statique rendant plus difficile la synthèse alors que le
second en analyse le dynamisme autour de notions de systèmes, de rythmes et de polarités dans
une vision plus énergétique.
Delsarte et Steiner affichent la même volonté de ne pas réduire leur investigation à une approche
matérialiste. L'homme tripartite est au centre du Compendium de Delsarte (Figure 1) où
l'organisation physique est étudiée « en vue de l'âme »(1859, 104). Par « le regard de l'esprit » de
Goethe (1919a, 29) l'approche de Steiner vise à « révéler », « rendre visible » dans ses gestes «
l'homme dans sa totalité », « l'âme de l'homme ».
Adoptant le point de vue de l'art, ils accordent au geste une fonction sémantique, mais leurs
visions du corps se distinguent (tableau 6). Delsarte utilise la métaphore et décrit le corps par un
déplacement de sens comme « un alphabet encyclopédique » (1859, 104). Steiner quant à lui
utilise la métonymie, assimilant le corps par un déplacement de référent à un immense « organe
de la parole », un « grand larynx ». Sa stratégie consiste plutôt à déplacer la fonction du corps
vers celle de la parole alors que celle de Delsarte se fonde sur la structure sémantique du corps,
dans une approche moins dynamique et plus rigide que la sienne.
Si la relation entre corps et parole est à l'origine de leurs conceptions, Delsarte se méfie de la
parole qui est pour lui « toujours postérieure au geste » (in Porte, 1992, 261) alors que Steiner
invite à y rechercher l'origine du geste. Mais par le corps, tous les deux cherchent à redonner à la
parole sa force vibratoire et créatrice à une époque où la pensée se fait de plus en plus abstraite.
Il semble en fait que Delsarte et Steiner sont à deux étapes d'une même démarche visant à
remonter aux sources divines du langage, car lorsque Delsarte affirme : « si la parole est le corps
de la pensée, le silence est le pêne de la parole » (in Porte, 1992, 260), il ne semble pas être très
éloigné du a monde rythmique et musical » qu'évoque Steiner « où des êtres divins diffusent leurs
messages » (1923, 58). Pour tous les deux, le geste permet la rencontre entre deux mondes
extrêmes, terrestre et céleste.
CONCLUSION
Si l'analyse des conférences de Delsarte et de Steiner a permis de mettre en évidence que leurs
investigations font effectivement appel à l'art pour concilier démarche scientifique et expérience
spirituelle, elles quitteraient le champ reconnu aujourd'hui comme scientifique. En effet, si la
reconnaissance en tant que science leur était encore possible à l'époque de Delsarte dans le
domaine des sciences humaines, elle ne l'est déjà plus à celle de Steiner. Tout en se voulant
rationnelle, leur investigation se décentre d'une objectivation purement matérialiste et subit une
transformation visant à intégrer le versant subjectif de la nature humaine, le regard de l'artiste pro.
longeant celui du scientifique.
L'ambition de Delsarte et de Steiner est de s'adresser à l'âme de l'homme entre deux mondes
extrêmes. Toutefois, l'analyse des stratégies qu'ils utilisent laisse entrevoir la difficulté d'une telle
synthèse. Si le discours de Steiner semble en conserver le dynamisme, celui de Delsarte révèle
qu'il est en lutte avec le matérialisme. Cela ne doit pas faire oublier que près de cinquante ans
séparent leurs discours, et que l'époque où Delsarte prend la parole voit le succès du positivisme
alors que Steiner, issu du mouvement théosophique, met constamment en guide ses auditeurs
contre les dangers du matérialisme comme du spiritualisme.
Si la science impose sa suprématie à partir du XIXe siècle, le débat qui s'engage, lorsqu'elle prend
l'homme pour objet, dépasse son propre domaine et concerne toutes les sensibilités. Au centre
de ce débat, se pose la difficulté à concilier l'objectivité dont se réclame la démarche scientifique
et la subjectivité inhérente à l'homme. Or, sans faire l'apologie de leurs méthodes, nous retenons
de Delsarte et de Steiner une attitude que l'on pourrait attendre de tout théoricien de la motricité
se voulant scientifique. En e et, après avoir clairement défini le modèle sur lequel ils se fondent,
ils précisent leur position au sein de ce modèle.
L'éducation physique contemporaine, justement parce qu'elle revendique sa scientificité, ne doit
pas se préserver d'une telle attitude l'invitant à mener une véritable réflexion épistémologique,
philosophique, voire même métaphysique sur les modèles de l'homme que véhiculent les
connaissances sur lesquelles elle se fonde. Les doctrines de Delsarte et Steiner, dont l'ambition
est de s'adresser à l'homme dans sa totalité, sont de nature à enrichir cette réflexion en l'ouvrant
à d'autres aspects de la motricité, ceux que lui offrent les points de vue de l'art et de la spiritualité