


Dans « La Bérézina », la journaliste Marylou Magal, qui a suivi la campagne présidentielle du candidat d’extrême droite pour l’Express, raconte l’ascension aussi fulgurante que la chute fut brutale. Faut-il pour autant parler du candidat Éric Zemmour au passé ?
Sucré puis salé. Marylou Magal revient longuement sur la partie faste de l’aventure du polémiste Éric Zemmour en politique pour, ensuite, décrypter la chute. À l’automne 2021, l’éditorialiste « vient combler un vide du côté de la droite traditionnelle et une déception du côté du Rassemblement national. Un espace qu’il a pu investir », décrit la journaliste qui signe La Bérézina, Éric Zemmour, autopsie d’une déroute électorale (éditions du Rocher).
Pas encore candidat, l’éditorialiste télé « suscite un engouement médiatique et militant ». Mais pour l’autrice, le fait qu’Eric Zemmour « soit monté très haut, très tôt dans les sondages fait qu’il a commis un certain nombre d’erreurs stratégiques, techniques et sur le fonds également ».
« Bulle cognitive »
La journaliste parle de « bulle cognitive » dans laquelle se sont enfermés le candidat et ses soutiens pendant la présidentielle. « C’est une campagne qui a suscité un engouement très particulier auprès de ses militants. C’est un rythme effréné avec un meeting par semaine, les meetings étaient toujours très pleins, une ambiance assez survoltée, quelque chose qu’on n’avait plus l’habitude de voir en politique qui avait tendance à désenchanter son public. »
Un miroir aux alouettes. Des soutiens « tellement mobilisés, que finalement tout son électorat, à peu de chose près, était dans les meetings ». Pas de « vote caché » donc, que l’équipe du candidat revendiquait à la fin de la campagne présidentielle pour contredire les sondages en berne.
« Des théories très politiques »
Éric Zemmour est aussi passé à côté de l’électorat populaire. « Il est resté sur des théories très politiques, comme l’union des droites, qui parlent pas à un électorat populaire. Là ou Marine Le Pen a mené une campagne sur le pouvoir d’achat, sur des problématiques du quotidien. » L’éditorialiste, « omme tout intellectuel, propose à ses lecteurs et à ses électeurs un système de pensée ». Dans son cas, « tout tourne autour de l’immigration et de l’identité. Mais lorsque cette grille de lecture se confronte au réel et à des choses sur lesquelles elle ne peut pas s’appliquer, ça ne fonctionne pas ».
« La femme qui est derrière sa campagne »
L’autrice évoque aussi longuement, un personnage central dans la candidature d’Éric Zemmour : Sarah Knafo. « Il la présente comme sa compagne et la femme qui est derrière sa campagne. » Personnage omniprésent et clivant. « C’est elle qui tient tout le mécanisme et c’est par elle qu’il faut passer et ça a d’ailleurs été un des motifs de rupture au sein de l’équipe parce que plusieurs personnes de la campagne ont considéré qu’elles n’avaient pas accès au candidat. »
Un échec mais…
Un échec cuisant ? « 7 % à la présidentielle, certes, c’est un échec mais pas un échec cuisant non plus pour une personne qui crée un parti ex-nihilo. Et il y a eu une infusion des thématiques d’Éric Zemmour (identité, immigration…). On entend évoquer le « grand remplacement » (théorie complotiste et sans fondements) sur des plateaux de télé grand public, ça ne choque plus personne. Donc, il y a la défaite électorale mais il y a le cheminement des idées et une certaine victoire idéologique de la part de ce camp. »
Quant aux législatives, « il a beaucoup hésité à y aller », rapporte la journaliste. C’est finalement à cause du reproche fait aux têtes d’affiche du parti de « laisser les petits candidats aller au casse-pied », que les cadres de Reconquête « se sont plus mobilisés ».
Et maintenant ?
Reconquête, le parti créé par Éric Zemmour, « est en train de se structurer », explique Maylou Magal qui disait quelques jours avant l’affaire Lola politiquement exploitée par le camp du polémiste : « Le parti verse beaucoup dans des actions d’agit prop. » Exemple récent : les manifestations organisées par les soutiens d’Éric Zemmour après le meurtre de la fillette Lola. Affaire dans laquelle la principale mise en cause, Algérienne, était sous le coup d’une obligation de quitter le territoire. Ses partisans ont aussi manifesté à Callac dans les Côtes-d’Armor, contre un projet d’accueil de réfugiés.
Politiquement, le parti « prépare les élections européennes 2024 » – autrefois qualifiées de « présidentielle du pauvre » par Éric Zemmour. « Reste à savoir qui de Marion Maréchal ou Éric Zemmour sera tête de liste et comment le parti va réussir à vivoter pendant deux ans sans échéance électorale ».
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