Ben voyons !
Officiellement, Reconquête, le parti d’Éric Zemmour, ne dispose pas d’organisme de formation. Mais comme l’a découvert Mediacités, ses élus sont nombreux à faire appel au Cefel, une structure très discrète liée à l’Issep et qui facture au prix fort ses prestations à l’État ou aux collectivités.
Autour de chaque parti politique gravite un organisme de formation d’élus. S’ils sont agréés par le ministère de l’Intérieur, ces instituts peuvent former des conseillers régionaux, municipaux ou départementaux en mobilisant des fonds publics. Pour un parti politique, ce système permet d’améliorer les compétences des élus encartés ou proches, qui partagent les mêmes objectifs. Il permet également de financer sa structure de formation. Dans le paysage politique français, deux partis font exceptions : Horizons, de l’ancien Premier ministre Edouard Philippe, qui vient de se faire refuser un agrément pour son organisme en cours de constitution, et Reconquête, le parti d’Éric Zemmour. Du moins, officiellement, pour celui‐ci…
Comme Mediacités l’a découvert, les élus zemmouristes sont nombreux à faire appel au Centre européen de formation des élus locaux (Cefel), un organisme agréé et domicilié dans la Loire. Autre découverte : cette société, qui facture au prix fort ses formations [lire plus bas], est liée à l’Issep, le « Sciences Po » d’extrême-droite que Marion Maréchal a ouvert à Lyon, dans le quartier de la Confluence, par l’intermédiaire d’une agence de communication. Par ailleurs, le directeur général du Cefel n’est autre que le président de l’école de l’égérie de la droite nationaliste [lire également plus bas].
Le mensonge de Sylvain Roussillon
En apparence, le Cefel n’a pourtant rien de zemmouriste. L’organisme est présidé par Marie‐Laure Godin, une élue divers droite, vice‐présidente du département des Hauts‐de‐Seine. Dans le bureau, on trouve des élus de tous bords comme Lauriano Azinheirinha, ancien conseiller départemental UDI des Alpes‐Maritimes et proche du maire de Nice Christian Estrosi, Jérôme Besnard, conseiller municipal LR d’une commune de Seine‐Maritime, Jean‐Christophe Vallet, maire d’un village de Côte‑d’Or, ou Catherine Chammas, une élue divers gauche de la Loire. Nous n’avons identifié qu’une seule proche de l’extrême-droite au sein de l’organigramme du centre de formation : Valérie Laupies, ex‐élue FN de Provence‐Alpes‐Côte d’Azur (Paca) ralliée au parti de Florian Philippot.
Mais le Cefel compte donc un directeur général, non salarié, très marqué politiquement : Sylvain Roussillon. Ce collaborateur d’élus locaux affiche un long CV. Il a travaillé pour Marie‐Laure Godin dans les années 1990, puis Raymond Barre, quand il était maire de Lyon, ou encore avec l’ancien président UMP du département la Loire, Pascal Clément, ministre de la Justice sous Jacques Chirac. Son parcours et ses activités politiques l’ancrent à l’extrême-droite, dans la tendance royaliste de l’Action française. Il est aujourd’hui secrétaire général du groupe « Libertés identité souveraineté », qui regroupe quatre élus zemmouristes de la région Auvergne‐Rhône‐Alpes. Auparavant, il occupait le même poste au sein du groupe RN, entre 2016 et 2021. Il est enfin devenu président de l’Issep à sa création, en 2017.
Il y a quatre ans, dans un article consacré à la formation des conseillers régionaux d’Auvergne-Rhône-Alpes, nous avions déjà mentionné le Cefel. Nous nous interrogions notamment sur le coût élevé de ses formations et sur ses clients, presque exclusivement des élus RN. À l’époque, Sylvain Roussillon nous avait juré avoir quitté le Cefel après avoir rejoint le groupe politique d’extrême-droite à la Région, en février 2016. « Les deux fonctions n’étaient pas compatibles », nous avait‐il soutenu. Un mensonge : en 2023, Sylvain Roussillon cumule toujours un emploi au conseil régional avec la direction générale du Cefel.
Au 56, rue Denuzière
Un autre proche de Marion Maréchal apparaît dans les parages du Cefel : Thibaut Monnier. Selon nos informations, l’organisme de formation est lié, par convention [voir l’extrait du document ci‐dessous], à l’IFF (« l’Institut français de formation »). Sur son site, cette société se présente comme une spécialiste de la communication et propose diverses prestations comme la réalisation de clips promotionnels, de sites internet ou l’animation de réseaux sociaux. Elle est présidée par Thibaut Monnier, le directeur général de l’Issep, et, comme nous l’avons vérifié, elle partage la même adresse que l’école de Marion Maréchal : le 56, rue Denuzière, à deux pas de la darse de la Confluence.
2023-10-Extrait convention Cefel
Extrait de la convention passée entre le Cefel et l’IFF. Document Mediacités.
D’après la convention passée avec l’IFF (qui figure au dossier d’agrément du centre de formation), le Cefel organise certaines de ses formations à l’adresse de l’Issep. L’école de Marion Maréchal facture‐t‐elle la mise à disposition de ses salles de cours ? Contacté, Sylvain Roussillon, à cheval entre les deux entités (pour rappel, il préside l’Issep et dirige le Cefel), nous a raccroché au nez [lire l’encadré En coulisses].
Au Cefel, le directeur général n’est pas le seul militant d’extrême-droite. Parmi ses formateurs, on trouve ainsi Franck Buleux, qui a écrit Pourquoi Éric Zemmour ?, un ouvrage publié en amont de la dernière élection présidentielle pour soutenir la candidature du polémiste. Sur les questions environnementales, le centre fait appel à Philippe Charlez, éditorialiste à l’hebdomadaire réactionnaire Valeurs actuelles. Il intervient également à l’Issep. Autre formateur, Bastien Doutrelant, ancien du Front national, a l’habitude de travailler avec les communes d’extrême-droite comme l’avait révélé une enquête de Mediapart. Citons enfin Laurent Lemasson, directeur des publications du très droitier think tank Institut pour la justice.
Les clients du Cefel sont aussi issus pour une bonne part d’entre eux de l’extrême-droite. Il y ont recours par l’intermédiaires de deux dispositifs : un financement direct par les collectivités ou une prise en charge par le « Droit individuel de formation‐élus » ou « DIF‐élus ». Selon nos calculs, entre mai 2019 et janvier 2021, 44 élus se sont formés au Cefel via le DIF‐élus. Mis à part un élu de Sarcelles et un groupe de cinq conseillers municipaux divers droite d’Athis-Mons (Essonne), tous les autres étaient des élus du Rassemblement national, le plus souvent des cadres.
Sur ces 38 élus RN, plus de la moitié ont soutenu Éric Zemmour à l’occasion de la présidentielle 2022, à l’instar de Marion Maréchal et Sylvain Roussillon. Même tropisme en 2021, où, mis à part des formations groupées aux élus de Pierre‐Bénite, Saint‐Genis‐Laval et Artas (Isère), ce sont essentiellement des élus RN qui ont fréquenté les séances du Cefel.
90 000 euros la session
Le DIF‐élus se révèle être un choix rentable pour l’organisme : sur la période 2019–2020, les 44 élus cités plus haut ont assuré 306 000 euros de chiffre d’affaires ! Surprise : certains élus ont suivi des formations payées par le DIF‐élus quelques semaines après avoir suivi la même formation payée par le contribuable de la région Auvergne‐Rhône‐Alpes…
C’est le cas de l’ancienne conseillère régionale Sophie Robert, candidate RN aux élections municipales de 2020 à Saint‐Etienne et proche de Marion Maréchal (elle a notamment participé à l’inauguration de l’antenne espagnole de l’Issep). Elle a fait payer par le DIF‐élus 2 550 euros une formation « Logique comptable et gestion des collectivités territoriales » entre le 21 et le 23 novembre 2019. Un mois plus tard, les 14 et 15 décembre, elle a été formée par le Cefel sur la « Logique comptable et gestion des collectivités territoriales ». Cette fois‐ci, les cours ont été facturés au contribuable de la région Auvergne‐Rhône‐Alpes. S’il s’agissait d’une seule et même formation en deux temps, il aurait été plus simple de la faire financer par un seul des deux dispositifs de financement.
2023-10-Sophie Robert-Marion Marechal
Sophie Robert, 6e au premier rang, à côté de Marion Maréchal, en juillet 2020. Photo : compte X @MarionMarechal.
Ce n’est pas le seul exemple qui a attiré notre attention. Ainsi, les conseillers régionaux zemmouristes Christophe Boudot et Isabelle Surply ont suivi deux fois la formation « Construire et valoriser son leadership » à un mois d’écart en juin et juillet 2020. Facturée 3 000 euros à la Région d’une part, et 6 400 euros au DIF‐élus d’autre part. Avec le DIF‐élus, le Cefel aura formé douze autres élus lors la même session, ce qui lui a rapporté près de 90 000 euros.
Matelas financier
De fait, le Cefel ne connaît pas la crise : il affiche 219 000 euros de chiffre d’affaires en 2019, près de 350 000 euros en 2020 et même 443 000 euros en 2021. Les trois quarts de cette somme rémunère les formateurs, le reste sert à payer d’autres charges, dont d’importantes dépenses de communication (46 000 euros en 2021). Le matelas financier du Cefel a également gonflé, puisque fin 2021, il disposait de plus de 100 000 euros en banque.
Ces résultats se révèlent d’autant plus importants que le nombre de clients du Cefel reste modeste : seulement 320 élus formés en 2020, 305 en 2021, dont la moitié de conseillers régionaux. Mais il faut dire que les formations du Cefel sont parmi les plus chères du marché…
La formation des élus revient régulièrement sur le devant de la scène. Sur le sujet, à la région Auvergne‐Rhône‐Alpes, les conseillers écologistes font l’objet d’une enquête préliminaire ouverte par le parquet de Lyon, après un signalement effectué par la majorité de Laurent Wauquiez. La Chambre régionale des comptes a par ailleurs épinglée le Cidefe, l’organisme de formation proche du Parti communiste, comme nous l’avions raconté sur Mediacités. En 2019, nous avions déjà enquêté sur les différents organismes de formation des élus de la région Auvergne‐Rhône‐Alpes, mais le passage sur le Cefel était resté en partie inachevé. Grâce à l’obtention de nouveaux documents, aux données de formations communiquées par la région Auvergne‐Rhône‐Alpes – qui a financé pour plus de 200 000 euros de formations au Cefel entre 2020 et 2021 -, et à la publication des données du DIF‐élus, nous avons pu poursuivre nos investigations.
Nous nous sommes heurtés à un mur d’opacité du côté des responsables du Cefel : aucun élu contacté, dont sa présidente Marie‐Laure Godin, n’a voulu nous répondre, malgré de nombreuses sollicitations. Nous avons toutefois eu un échange téléphonique avec Sylvain Roussillon, le directeur général du Cefel : il a duré moins de quinze secondes.
https://www.mediacites.fr/enquete/lyon/ ... o-zemmour/?
Derrière l’école lyonnaise de Marion Maréchal, le très lucratif organisme de formation des élus pro‐Zemmour
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Re: Derrière l’école lyonnaise de Marion Maréchal, le très lucratif organisme de formation des élus pro‐Zemmour
Peut-on leur reprocher la formation de leurs élus ou de leurs futurs cadres?...Un business...Certainement oui..Mais je suppose que personne ne leur pose un calibre sur la tempe pour suivre cette dernière...Aussi payante qu'elle puisse l'être.
Aux mains de l'Etat,la force s'appelle Droit....Aux mains de l'individu,elle se nomme le crime....
Si tu m'as pris pour un clown tu t'es trompé de Carnaval...
...La mort avant le déshonneur!
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Re: Derrière l’école lyonnaise de Marion Maréchal, le très lucratif organisme de formation des élus pro‐Zemmour
tous les partis politiques et syndicats n'ont ils pas aussi leurs organismes de formation
d'ailleurs un élu écologiste n'a t il pas été condamné pour détournement de fonds avec son organisme de formation
https://atlantico.fr/article/decryptage ... es-gaetner
certains font des sujets comme une poule qui vient de découvrir une cuillère
comme si c'était quelque chose de nouveau
il est normal de se soucier de la formation de ses futurs élus lorsque l'on est crédité de 9 % d'intention de vote aux européennes qui garantit d'avoir plusieurs députés
d'ailleurs un élu écologiste n'a t il pas été condamné pour détournement de fonds avec son organisme de formation
https://atlantico.fr/article/decryptage ... es-gaetner
certains font des sujets comme une poule qui vient de découvrir une cuillère

comme si c'était quelque chose de nouveau

il est normal de se soucier de la formation de ses futurs élus lorsque l'on est crédité de 9 % d'intention de vote aux européennes qui garantit d'avoir plusieurs députés
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Re: Derrière l’école lyonnaise de Marion Maréchal, le très lucratif organisme de formation des élus pro‐Zemmour
T'as raison! C'est normal " un business" qui recycle l'argent public pour faire vivre des structures qui ont de "formation" que le nom. C'est le fameux "panier de crabes" de la formation qui est régulièrement placé sous les projecteurs quand il s'agit de la formation professionnelle des entreprises, pour ses coûts, son inefficacité et son public souvent les cadres...mais Mediacités soulève le voile de la formation des élus.
Avec des doubles formations...par exemple et ces instituts douteux, aux sigles pompeux (pompe à finances, surtout) à la gestion douteuse et aux résultats douteux. L'ISSEP de la Marion qui périclite mais qui héberge son satellite le CEFEL qui rrecycle la manne publique
Ah l'ARA qui rit

Pour ouvrir les yeux à ceux qui économise leur énergie critique à l'ARA, mais aussi d'ailleurs, je conseille de lire cet article de Mariane
https://www.marianne.net/politique/form ... les-partis
"La Lettre" sort aussi un article sur l'agrément refusé à un Institut de formation un peu trop "idéologique"
Un business en effet. Juteux certes, pour entretenir au prix fort un réseau d'amitiés partisanes avec des fonds publics.L'Etat retire son agrément à l'institut de formation proche de Mélenchon
Le catalogue de l'institut Formateur des collectivités, lié à La France insoumise, était jugé trop politique et pas assez aux prises avec les problématiques des élus locaux. L'organisme a fait une nouvelle demande d'agrément auprès de l'instance ministérielle rattachée à la ministre Dominique Faure.
Quant à la qualité technique des élus sortis de ces "instituts"

Mais parlons de l'ARA, mes biens chers frères éclairés, et de Marion/Zemmour et leur business
Quant à vivarais, ça fait longtemps qu'il est débranché! Son refrain "Circulez, y a rien à voir" est pitoyable.
- Crapulax
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Re: Derrière l’école lyonnaise de Marion Maréchal, le très lucratif organisme de formation des élus pro‐Zemmour
Est-ce que cette école est attaquée en justice pour détournement de fonds publics?T'as raison! C'est normal " un business" qui recycle l'argent public pour faire vivre des structures qui ont de "formation" que le nom. C'est le fameux "panier de crabes" de la formation qui est régulièrement placé sous les projecteurs quand il s'agit de la formation professionnelle des entreprises, pour ses coûts, son inefficacité et son public souvent les cadres...mais Mediacités soulève le voile de la formation des élus.
Et tu sais..Il existe des tas d'écoles très honnéreuse qui délivrent des diplômes non-reconnus par l'Etat...J'en connais dans le management sportif par exemple...Dans lesquelles tu retrouves des élèves avec des "noms"...En fait le diplôme ne sert à rien mais alors les "relations"...Assurent l'avenir professionnel des élèves...
Aux mains de l'Etat,la force s'appelle Droit....Aux mains de l'individu,elle se nomme le crime....
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...La mort avant le déshonneur!
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