C'est stupéfiant !
Cinq leçons stupéfiantes tirées des comptes du Rassemblement national
Rémunération de Marine Le Pen, emprunt auprès des sympathisants, réduction des effectifs, affaires judiciaires, etc. La plongée dans les comptes du parti d’extrême droite, qui viennent d’être publiés, apporte son lot de surprises.
Au Rassemblement national, on préfère commenter les comptes de la France que ceux du parti.
Alors que Marine Le Pen vient de publier dans Les Echos une tribune sur le nécessaire désendettement du pays, le député de Moselle et trésorier du parti Kévin Pfeffer refuse de répondre aux questions de Challenges sur les comptes 2022 du RN, dont les détails viennent d’être mis en ligne sur le site de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP). Ceux-ci sont pourtant riches d’enseignements. Challenges en a identifié cinq.
Leçon n°1 :
Marine Le Pen touche 12 500 euros net par mois
Le sujet est tabou au sein du parti d’extrême droite. Depuis 2017, Marine Le Pen perçoit quelque 5 000 euros de remboursement forfaitaire de frais chaque mois de la part du RN, soit 60 000 euros par an. Durant la dernière campagne présidentielle, bien que n’étant plus présidente du parti, elle a continué de toucher cette somme, selon les révélations de Libération et L’Express.
Nouveauté en 2022 :
à lire l’annexe sur les rémunérations allouées aux dirigeants non salariés du parti, ces « remboursements de frais » semblent avoir été transformés en 60 000 euros de « rémunération forfaitaire nette après charges sociales » (voir document ci-dessous). En additionnant ses revenus de député et de conseiller départemental, Marine Le Pen touche donc désormais plus de 12 500 euros net par mois. Elu président du RN en novembre 2022, Jordan Bardella a, lui, bénéficié de 7 163 euros de remboursements de frais et d’un véhicule avec chauffeur.
Leçon n°2 :
Le RN est toujours le parti le plus endetté de France
Avec une dette de 29 millions d’euros, le Rassemblement national restait le parti le plus en difficulté financièrement en 2022. Grâce au bon score de ses candidats aux élections législatives, le parti perçoit toutefois depuis 2023 une subvention publique annuelle de 10 millions d’euros. Ce qui lui a permis de rembourser le solde de son fameux emprunt russe de 6,4 millions d’euros, ainsi que ses dettes vis-à-vis des Urssaf et de l’agence de communication Riwal.
Le parti s’est aussi engagé à prendre en charge les sommes prélevées par le Parlement européen à Jean-Marie Le Pen et Bruno Gollnisch dans le cadre de l’affaire des assistants parlementaires européens.
Leçon n°3 :
La manne de 19,6 millions d’euros du grand emprunt
Pour se renflouer, le parti a largement fait appel à l’épargne des Français ces dernières années. Depuis 2017, il a collecté pas moins de 19,6 millions d’euros à coups d’« emprunt patriotique » et autre « grand emprunt » via plus de 2 000 contrats de prêts de particuliers. Une trentaine de prêts dépasse 100 000 euros et deux sont au-delà de 500 000 euros. Selon les comptes publiés, le parti devait encore rembourser 17 millions d’euros en 2022 et 513 prêts n’ayant pas pu être honorés dans les temps ont « vu leur durée contractuellement prolongée ».
Leçon n° 4 :
Le parti s’est serré la ceinture
Face à cet endettement colossal, le Rassemblement national a sévèrement réduit son train de vie. Les salaires et traitements représentent aujourd’hui 1,7 million d’euros, contre 2,5 millions d’euros en 2018, tandis que les charges locatives atteignent 650 000 euros, contre 1 million d’euros en 2018. En quatre ans, l’effectif du parti est passé de 53 à 30 personnes, dont 8 cadres, et le déménagement du siège de Nanterre à Paris dans des locaux bien plus étroits a permis de réduire les loyers de 30 %. Côté recettes, les cotisations des militants s’élèvent à 1,5 million d’euros, contre 1,1 million d’euros en 2018 et 2,4 millions d’euros en 2016.
Leçon n° 5 :
L’affaire des « kits de campagne » pourrait coûter 3,2 millions d’euros
Si le Rassemblement national a fait mine de se féliciter il y a un an de la décision de la Cour d’appel de Paris dans l’affaire dite des « kits de campagne », le verdict pèse en réalité lourd dans ses comptes. En plus des 250 000 euros d’amende pour recel d’abus de biens sociaux, le RN devra assumer les sanctions financières infligées au micro-parti Jeanne de Marine Le Pen, condamné pour escroquerie et désormais fusionné au RN, pour un total de 1,4 million d’euros. Le parti s’est pourvu en cassation mais a déjà provisionné « pour risque » 1,39 million d’euros. A cela, s’ajoute le redressement fiscal du même micro-parti Jeanne à hauteur de 1,8 million d’euros confirmé à l’automne par le Conseil d’Etat pour les ventes des fameux « kits de campagne ».
https://www.challenges.fr/politique/cin ... or=CS3-89-[Cinq%20le%C3%A7ons%20stup%C3%A9fiantes%20tir%C3%A9es%20des%20comptes%20du%20Rassemblement%20national]