Il est mal Pierre-Édouard il est mal... C'est l'extrême droite qui va faire la gueule.
Pierre-Edouard Stérin à court de cash : ses projets vers la casse ?
Ces derniers mois, le milliardaire réactionnaire a coupé les vivres à une série de projets politiques.
Le manque de liquidités, des changements de gouvernance et la structure fragile de son groupe ébranlent les ambitions du magnat.
Les sourires s’étirent et les animateurs badinent : ce lundi 25 août, l’équipe de Radio Courtoisie annonce avec fierté les changements de la rentrée à ses auditeurs. Studio refait à neuf, caméras dernier cri, grilles de programme réinventée… L’extrême droitière «radio libre du pays réel» a cassé sa tirelire pour moderniser ses locaux historiques du 61, boulevard Murat dans le XVIe arrondissement de Paris. Mais derrière la façade enjouée, les responsables de l’antenne sont amers. Pour financer leurs travaux, ils comptaient sur un financement de Périclès, l’incubateur de start-up, think tanks et autres influenceurs identitaires lancé par le milliardaire exilé fiscal Pierre-Edouard Stérin, qui ambitionne de créer un «écosystème politique et économique» favorable à la victoire de ses idées réactionnaires. Un virement conséquent de plusieurs centaines de milliers d’euros avait été promis en juillet. Il n’est jamais arrivé.
Contacté, le directeur général de Périclès, Arnaud Rérolle, refuse de commenter l’affaire, assumant communiquer «sur certaines initiatives soutenues, sans prétendre à l’exhaustivité, comme tout acteur privé». Le président de Radio Courtoisie, Pierre-Alexandre Bouclay, répond à côté en assurant que sa boutique ne s’appuie «que sur ses propres fonds». Il a fallu, selon les informations de Libé, l’aide d’une des précieuses douairières qui font le modèle économique de la radio, pour ne pas se mettre dans le rouge.
Une baisse drastique de l’activité
Périclès mauvais payeur ? Dans le Landerneau extrême droitier, la réputation de Pierre-Edouard Stérin, d’abord perçu comme la poule aux œufs d’or, est en train de se ternir. Les virements n’arrivent plus, ou très en retard. En début de semaine dernière, plusieurs porteurs de projet ont vu brutalement annoncé, par mail, l’arrêt net de leur financement. Rien d’anormal, répond Rérolle : «Pour les projets échelonnés, ceux-ci dépendent d’objectifs à atteindre qui déterminent la poursuite ou non de notre soutien. Donc il nous arrive de cesser notre soutien si ces objectifs ne sont pas atteints.» Cette hécatombe de financements, confirmée à Libé par plusieurs acteurs de la mouvance, trouve en réalité sa cause ailleurs : dans les difficultés financières que traverse Otium Capital, le fonds d’investissement de Pierre-Edouard Stérin.
Une source haut placée au sein du family office du milliardaire le confirme à Libé : «
Otium a dû baisser le rythme de ses investissements car deux opérations de vente qui devaient nous rapporter du cash ont pris du retard. Or, l’argent de Périclès vient de Pierre-Edouard, et l’argent de Pierre-Edouard, c’est Otium. Donc dans les situations où il y a moins de cash, c’est normal de faire des arbitrages et de prioriser des projets.» Exit, donc, la promesse de déployer «plus de 20 millions d’euros par an», en tout près de 150 millions d’euros sur une décennie – chiffres par ailleurs largement gonflés, puisqu’il ne s’agit pas d’argent réellement dépensé, mais potentiellement engagé sur plusieurs années.
L’entourage du milliardaire incrimine la conjoncture, maussade pour l’ensemble des fonds d’investissement, dont Otium souffrirait davantage que les autres en raison de son modèle économique. Valorisé à près de 1,7 milliard d’actifs, le fonds tourne en gardant un niveau de trésorerie minimal, le cash disponible étant immédiatement réinvesti. Ce dernier provient en règle générale soit de la remontée de dividendes (la plupart du temps réinjecté dans les jeunes entreprises afin de permettre leur croissance), soit en empruntant (ce qui, selon plusieurs sources internes, deviendrait compliqué en raison du niveau d’endettement du fonds, à hauteur d’environ 400 millions d’euros, selon une enquête du Nouvel Obs), soit par la vente d’entreprises.
Ce qu’Otium peine à faire, ayant cette année raté deux grosses ventes, dont celle des parfums Dossier, qui auraient dû permettre des rentrées d’argent liquide. En résulte une baisse drastique de l’activité : alors qu’en 2024, le fonds revendiquait 255 millions d’euros investis, il n’en a engagé que 72 millions au premier semestre de 2025 et semble bien en peine d’atteindre son objectif de 300 millions investis à la fin de l’année.
«C’est étrange de caler l’agenda d’Otium sur celui de la politique»
Si ces difficultés n’ont pas encore percé le mur du son médiatique, le petit monde ayant eu l’occasion de traiter avec le fonds voit les signaux se multiplier. En avril, Otium, représenté par le fonds Montyon Capital, s’est brutalement retiré du rachat de l’équipementier automobile GMD. «Ils ont décidé d’un seul coup de ne plus s’y intéresser en donnant pour motif que le monde de l’automobile n’allait pas bien», confirme une source chez GMD, pour qui ce brusque abandon tient plus à la difficulté à allonger la somme nécessaire qu’à la forme du marché automobile.
En interne, l’ambiance serait plus que pesante. Dans ce contexte, la vente d’Hadrena, anciennement Otium Leisure, spécialisé dans le secteur des loisirs de proximité, est perçue comme la «vente des bijoux de famille» par une source interne. Celle des parts du milliardaire dans le club de rugby Biarritz Olympique, déficitaire, dans lequel il a investi 3,5 millions d’euros et qui affichait encore l’ambition, cet été, de s’offrir la star Antoine Dupont, transpire une certaine fébrilité.
Stérin a également prévu de se séparer de sa villa de Saint-Jean-de-Luz.
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