Trump et l’autisme : que disent (vraiment) les études sur la prise de paracétamol pendant la grossesse ?

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Corvo
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Trump et l’autisme : que disent (vraiment) les études sur la prise de paracétamol pendant la grossesse ?

Message par Corvo »

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Faisant fi des conclusions de travaux récents et de grande envergure, le président américain et son secrétaire à la Santé ont réchauffé l’hypothèse fragile du lien entre autisme et consommation de paracétamol chez les femmes enceintes.

A la fin de l’été, le secrétaire étasunien de la Santé – l’antivaccin et franchement complotiste Robert Kennedy Jr. – avait promis «pour septembre» une annonce sur une pratique médicale «qui, presque certainement, cause l’autisme». Ce week-end, au cours de la cérémonie d’hommage à Charlie Kirk, Trump lançait à la foule : «Demain (lundi 22 septembre), nous allons faire la plus grande annonce médicale de l’histoire du pays…»

En fait d’annonce historique et de quasi-certitude, la Maison Blanche a servi du réchauffé, au goût amer de science mal ficelée. Kennedy Jr. a en effet procédé à une mise en accusation (timide) de la consommation de paracétamol par les femmes enceintes : «La FDA (Agence étasunienne du médicament) [va publier] un avis destiné aux médecins et entamera le processus visant à modifier l’étiquetage de sécurité du paracétamol», résume un communiqué officiel, mâtiné de nombreuses précautions oratoires.
«La FDA réagit ainsi à des études cliniques et de laboratoire antérieures qui suggèrent un lien potentiel entre l’utilisation de l’acétaminophène pendant la grossesse et des effets néfastes sur le développement neurologique. La FDA reconnaît également qu’il existe des études contradictoires qui ne montrent aucun lien […] Compte tenu des publications contradictoires et de l’absence de preuves causales claires, le HHS souhaite encourager les cliniciens à faire preuve de discernement dans l’utilisation de l’acétaminophène pour traiter la fièvre et la douleur pendant la grossesse, en prescrivant la dose efficace la plus faible pendant la durée la plus courte possible lorsque le traitement est nécessaire.»

En conférence de presse, Trump s’est voulu plus définitif : «Bobby veut être très prudent dans ses propos. Je ne suis pas aussi prudent», a-t-il lancé, appuyant sa conviction sur quelques anecdotes : «Selon une rumeur – et j’ignore si c’est le cas – ils n’ont pas de paracétamol à Cuba car ils n’ont pas de quoi s’offrir de paracétamol. Hé bien, ils n’ont quasiment pas d’autisme !»

Une étude danoise de 2016 qui a longtemps pesé lourd dans la balance
De fait, difficile de faire passer cette hypothèse fragile pour une vérité scientifique. Au cours des deux dernières décennies, l’augmentation des cas recensés de troubles du spectre autistique aux Etats-Unis – en partie, au moins, liée à l’amélioration des capacités diagnostiques – a stimulé la recherche de causes dites «environnementales» au phénomène. Diverses équipes ont ainsi essayé d’identifier si l’exposition à diverses substances in utero, notamment des médicaments utilisés par les femmes enceintes, pouvait accroître le risque de troubles autistiques dans l’enfance.

Largement consommé, le paracétamol a bien évidemment été passé aux cribles des analyses statistiques, et une littérature conséquente existe déjà sur le sujet. Les premières études publiées sur ce sujet, essentiellement menées sur de petits effectifs, ont débouché sur des conclusions contradictoires. Au regard de quelques études favorables à l’hypothèse, un collectif international de chercheurs et de cliniciens avait néanmoins recommandé, en 2021, de limiter au maximum l’exposition des femmes enceintes au paracétamol. Trois études récentes étaient alors citées (des travaux étasuniens sur 996 femmes, espagnols sur 2644, et surtout danois portant sur 64 322 grossesses). Parue la même année, une méta analyse espagnole de six études semblait elle aussi conclure à un effet du paracétamol. Mais, dans le détail, elle intégrait cinq études sur de petits effectifs ne concluant pas à un lien avec l’autisme et la fameuse cohorte danoise, dont l’importance relative écrasait impitoyablement les résultats des autres… Or ses conclusions n’étaient pas nécessairement d’une solidité à toutes épreuves.

En 2024, une étude sur 2,48 millions d’enfants conclut à l’absence de lien
Les études sur le sujet peuvent en effet être affectées par un biais considérable : de nombreux événements médicaux survenant au cours de la grossesse sont susceptibles, en eux-mêmes, d’accroître le risque d’autisme. Or ils sont couramment traités par le paracétamol. Dans cette hypothèse, le paracétamol serait donc consommé pour limiter des phénomènes statistiquement liés à l’apparition de l’autisme, mais ne contribuerait pas au phénomène.

Cette interprétation est, précisément, celle des auteurs de la plus grosse étude de cohorte existant à ce jour sur le sujet. Publiée dans le Jama en 2024, l’étude portait sur le suivi de 2,48 millions d’enfants suédois (ainsi qu’un sous-effectif au sein de fratries, pour prendre en compte des facteurs génétiques et sociaux). Les auteurs y concluaient à l’absence de lien de cause à effet entre la prise de ce médicament et les troubles du spectre autistique. Certes, expliquent-ils, les femmes qui consomment du paracétamol sont légèrement plus susceptibles que les autres d’avoir des enfants présentant des troubles autistiques… mais au sein d’une même fratrie, la prévalence de l’autisme ne change pas lorsque du paracétamol a été consommé au cours d’une des grossesses.

Mis en regard, ces deux faits s’avèrent extrêmement instructifs, et signifient ceci : au nombre des femmes particulièrement susceptibles de consommer du paracétamol durant leur grossesse, on trouve plus de personnes présentant des risques d’avoir un enfant présentant des troubles du spectre autistique. Mais l’apparition du trouble est indépendante du fait qu’elles recourent effectivement au paracétamol. Autrement dit, le facteur décisif serait le terrain individuel (qui rend plus propice à consommer le médicament) et non le médicament lui-même, puisque la prévalence de l’autisme ne varie statistiquement pas dans une même fratrie en dépit de consommation différente durant la grossesse.

«De multiples biais peuvent expliquer les associations observées dans des études antérieures, expliquaient les chercheurs. Une source de confusion [peut être liée aux] raisons pour lesquelles le paracétamol a été pris, par exemple en raison d’une infection, d’une fièvre, d’une migraine, ou d’une douleur liée à une maladie auto-immune, [qui] peuvent être des facteurs de risque de troubles neurodéveloppementaux et peuvent donc entraîner des associations fallacieuses.»

A noter que le 2 septembre, une étude de cohorte portant sur plus de 217 000 enfants japonais a également conclu à l’absence de lien statistiquement significatif entre l’exposition maternelle au paracétamol et les troubles du spectre autistique. Mais ces derniers résultats sont, sans guère de surprise, absents de la (très courte) liste des références présentées le 22 septembre par RFK Jr. à la Maison Blanche.

Une synthèse fragile médiatisée fin août
Outre-Atlantique, beaucoup de commentateurs s’attendaient également à ce que le ministre de la Santé rebondisse sur un article paru mi-août, dans lequel les auteurs concluaient à «une association» entre paracétamol et autisme – tout en étant forcé d’admettre «que les limites de l’observation empêchent d’établir un lien de causalité définitif».

Cette synthèse d’études, réalisée par quatre chercheurs, identifiait sept publications d’intérêt sur le sujet «paracétamol et autisme». Parmi elles : l’étude danoise de 2016 (toujours), la méta analyse espagnole de 2021 (pourtant redondante avec la première et plusieurs autres, comme expliqué précédemment), et l’étude suédoise de 2024. Mais une lecture attentive de la publication laisse songeur, tant les auteurs s’efforcent d’ignorer les biais des premiers travaux et de minimiser la portée du dernier. Parmi les quatre signataires de l’article se trouve un chercheur qui, en 2023, avait été proposé comme témoin expert par des avocats dans le cadre d’un procès contre les fabricants de paracétamol. Le juge chargé de l’affaire avait toutefois exclu les différents experts proposés par l’accusation au regard de leur manque de rigueur dans l’analyse des études sur le sujet.

Des institutions très critiques de l’annonce
Pour appuyer sa décision, le communiqué diffusé lundi 22 septembre par le secrétariat à la Santé étasunien ne cite, étrangement, que deux sources scientifiques : l’article du collectif international de 2021, et de petits travaux étasuniens de 2020… eux-mêmes cités par le collectif (l’étude sur 996 grossesses, mentionnée plus haut).

En avril, RFK Jr. avait déjà annoncé son intention de donner la priorité au financement de la recherche sur l’existence de causes environnementales de l’autisme, au détriment d’études sur des facteurs individuels – non sans s’attirer les critiques de nombreux représentants de la communauté scientifique. L’association Children’s Health Defense, dirigée par RFK Jr. de 2015 à 2023, promeut depuis plusieurs années la thèse de la culpabilité du paracétamol à côté de diverses thèses anti-vaccinales.

A la suite des annonces estivales du ministre, la directrice scientifique de l’Autism Science Foundation avait jugé «malhonnête et trompeur de réduire les causes de l’autisme à une seule chose», et insisté sur le fait que «toute association entre l’acétaminophène et l’autisme repose sur des données scientifiques limitées, contradictoires et incohérentes, et est prématurée compte tenu des connaissances scientifiques actuelles». De leur côté, le Collège des obstétriciens et des gynécologues américains et la Société pour la médecine materno-fœtale avaient réitéré leur position sur le paracétamol, à savoir qu’il reste considéré comme un moyen sûr de traiter la douleur et la fièvre lorsqu’il est utilisé avec modération.

Traiter la fièvre durant la grossesse permet, de surcroît, de limiter les risques pour le fœtus. Et l’on privilégie pour cela le paracétamol car de nombreux autres anti-inflammatoires, comme l’ibuprofène ou le naproxène, sont considérés à risque après la vingtième semaine de grossesse (effets fœtaux potentiels notamment sur les reins ou les testicules, sur la quantité de liquide amniotique, etc.).

https://www.liberation.fr/checknews/tru ... KH47GTR2M/
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Mesoke
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Re: Trump et l’autisme : que disent (vraiment) les études sur la prise de paracétamol pendant la grossesse ?

Message par Mesoke »

Le pire dans cette affaire c'est que Kennedy milite pour affirmer que les vaccins causent l'autisme. Et là maintenant c'est le paracétamol, faudrait savoir.

Le tout à chaque fois basé sur du vide niveau argumentation scientifique, sur de l'idéologie plutôt que sur des preuves. Sauf qu'on parle là du gouvernement qui dirige le plus de scientifiques au monde pour réaliser des recherches sur le sujet ...

L'autisme a des causes multifactorielles. C'est, comme plein de trucs, en partie de l'inné génétique et en partie de l'acquis environnemental. La grande étude danoise publiée il y a peu et qui a suivi des millions de jeunes danois pour chercher des corrélation entre ceux qui ont été diagnostiqués autiste et des tas de facteurs n'a rien donné au sujet des vaccins ou du paracétamol. Donc pourquoi ressortir cette info maintenant, juste quand est publié ce qui se fait de mieux comme preuve scientifique ?
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Fonck1
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Re: Trump et l’autisme : que disent (vraiment) les études sur la prise de paracétamol pendant la grossesse ?

Message par Fonck1 »

ces mecs sont cinglés.
où alors leur but est d'occuper la plèbe , mais je penche plutôt sur le fait qu'ils sont cinglés.
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scorpion3917
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Re: Trump et l’autisme : que disent (vraiment) les études sur la prise de paracétamol pendant la grossesse ?

Message par scorpion3917 »

J aurais tendance à dire que tous les médocs ont des effets secondaires plus ou moins graves.
Mais peut on affirmer que le doliprane provoque l'autisme....
La seule chose qui permet au mal de triompher est l inaction des hommes de bien.
Edmund Burke.
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Fonck1
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Re: Trump et l’autisme : que disent (vraiment) les études sur la prise de paracétamol pendant la grossesse ?

Message par Fonck1 »

scorpion3917 a écrit : 24 septembre 2025 15:59 J aurais tendance à dire que tous les médocs ont des effets secondaires plus ou moins graves.
Mais peut on affirmer que le doliprane provoque l'autisme....
oui, c'est même sur les notices.
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Mesoke
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Re: Trump et l’autisme : que disent (vraiment) les études sur la prise de paracétamol pendant la grossesse ?

Message par Mesoke »

scorpion3917 a écrit : 24 septembre 2025 15:59 J aurais tendance à dire que tous les médocs ont des effets secondaires plus ou moins graves.
Mais peut on affirmer que le doliprane provoque l'autisme....
On peut facilement mourir d'une surdose de paracétamol, qui cause une rapide détérioration des reins à haute dose. D'ailleurs la fenêtre thérapeutique du paracétamol, c'est à dire la quantité qu'on peut en ingérer entre le minimum qui provoque un effet thérapeutique et le maximum qui cause un risque de surdose, est très faible. C'est un médicament très utilisé, mais potentiellement rapidement dangereux si on n'en respecte pas le dosage.
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