Pour Alexandra Gonzalez
Pour Olivier Truchot
Condamnation de Nicolas Sarkozy : BFMTV convoque une journaliste pour "son positionnement jugé trop en défense des magistrats"
Selon une information de "Mediapart", que Puremédias est en mesure de confirmer, Camille Langlade, directrice de la rédaction de BFMTV, a convoqué Alexandra Gonzalez, cheffe adjointe du service police-justice, pour lui reprocher ses interventions au cours de l'édition spéciale consacrée à la condamnation de Nicolas Sarkozy.
Quand les faits dérangent les chaînes info Deux jours après que l'Arcom a été saisie sur le traitement par CNews de la condamnation de Nicolas Sarkozy – transformée en procès des juges – "Mediapart" a révélé dans un article, publié ce jeudi 2 octobre 2025, que la cheffe adjointe du service police-justice de BFMTV, Alexandra Gonzalez, a été convoquée vendredi 26 septembre 2025 par Camille Langlade. Une information que Puremédias est en mesure de confirmer.
La directrice de la rédaction de BFMTV lui a fait grief de "son positionnement lors du direct, jugé trop en défense des magistrats et du jugement prononcé contre Nicolas Sarkozy". Reconnu coupable d'association de malfaiteurs, l'ancien président de la République a écopé d'une peine de cinq ans de prison ferme avec mandat de dépôt à effet différé dans l'affaire dite du financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007.
Alexandra Gonzalez rappelle les faits
Sur quoi reposent ces reproches ? Quand Olivier Truchot pointait le fait que le juge considérait que "la note de Moussa Koussa sur le financement libyen (révélée par "Mediapart' dans l'entre-deux tours de la présidentielle 2012, ndlr) était probablement un faux",
Alexandra Gonzalez – qui est aussi présidente de la Société des journalistes de BFMTV – n'a pourtant fait que recentrer le débat sur ce qui devrait faire consensus. "
Qui a mené l'enquête pendant dix ans ? Qui a conduit cette instruction qui a mené à ce qu'il y ait un procès ? Ce ne sont pas des journalistes. C'est le parquet national financier qui a ouvert une enquête des mois après (les révélations de 'Mediapart', ndlr)".
"Sur la base d'une note qui aujourd'hui est jugée fausse", l'a interrompue Olivier Truchot, abondant dans le sens de Jonas Haddad, porte-parole adjoint des Républicains présent en plateau.
Alexandra Gonzalez de défendre l'État de droit : "
Ce qui compte, c'est quand même dix ans d'instruction menée par des juges indépendants, pas par des journalistes. Elle ne repose pas sur une note qui est fausse. Et qu'aurait-on dit de journalistes qui ont connaissance d'un document qui leur est donné à ce moment-là de le retenir parce qu'on est dans l'entre-deux tours ? Un journaliste, quand il a une information, il ne retient pas l'information, c'est notre rôle de journaliste. C'est une déontologie de journaliste",
a soutenu Alexandra Gonzalez, qui pensait – à tort – trouver un appui auprès d'Alain Duhamel.
"
Sortir une présomption aussi grave entre les deux tours, je ne l'aurais pas fait. J'aurais attendu le résultat de l'élection", a signifié l'éditorialiste. "Ou alors on se dit que l'électeur doit avoir toute l'information", a rétorqué Alexandra Gonzalez. "Oui mais quand (ces informations) sont fausses !", a réagi Alain Duhamel. Puremédias vous propose de visionner la séquence. Si le tribunal, à rebours des précédentes décisions de justice, a glissé dans son jugement sur les financements libyens que la note publiée par "Mediapart" en 2012 était "probablement un faux",
Fabrice Arfi, co-responsable du pôle "enquêtes" du média d'investigation, maintient que ce n'est pas le cas... décisions de justice à l'appui. "
La justice française a considéré que ce document (issu des archives libyennes datant de décembre 2006, ndlr) n'était pas un faux. Pendant quatre ans, la justice a enquêté sur ce document à la demande de Nicolas Sarkozy. Nous avons été relaxés de faux et usage de faux en première instance, en appel et devant la Cour de cassation."
"
On engueule une journaliste qui fait bien son boulot juste pour faire plaisir à Nicolas Sarkozy, ami de Rodolphe Saadé"
Pour se prémunir de sorties de route ou de la diffusion de fausses informations à l'antenne, le service police-justice de BFMTV avait pourtant préparé – à l'attention de la rédaction, des programmateurs et des présentateurs – une note récapitulative des éléments factuels du dossier avant et après le jugement. Elles indiquaient, comme Alexandra Gonzalez l'a glissé ici ou là en réponse à ceux qui prétendaient que le casier judiciaire de Nicolas Sarkozy était vierge, qu'il avait été définitivement condamné dans l’affaire Bismuth. Ou que l'exécution provisoire retenue contre l'ancien chef de l'État ne relevait pas d'un traitement exceptionnel. Son contenu n'aurait, précise "Mediapart", pas été cité par les présentateurs pour contredire ou au moins contrebalancer les éléments de langage martelés par les invités soutenant Nicolas Sarkozy.
Contactée par "Mediapart", BFMTV a répondu qu'elle n’avait "pas de commentaire à apporter sur le travail journalistiquement indépendant et irréprochable de la rédaction". La chaîne et Alexandra Gonzalez, jointes également par Puremédias, n'ont pas donné suite à nos sollicitations.
En interne, selon les éléments que nous avons pu recueillir, cet événement creuse un peu plus le fossé entre les journalistes et leur direction. Un cadre de la rédaction de la chaîne de déplorer : "
On engueule une journaliste qui fait bien son boulot juste pour faire plaisir à Nicolas Sarkozy, ami de Rodolphe Saadé. Ce n'est plus tenable".
Les audiences sont un autre facteur d'explication de ce climat dégradé. BFMTV (2,9%), stable sur un an, est distancée d'un point – un record – par CNews, à son plus haut niveau historique en cette rentrée. Créditée d'une part d'audience de 3,9%, CNews effectue, comme l'an passé, un bond de 0,7 point sur un an. La chaîne, dirigée par Fabien Namias, n'a pas profité de manière aussi significative que sa concurrente de la forte actualité politique et sociale (confiance rejetée au Premier ministre François Bayrou le 8 septembre, "Bloquons tout" le 10, journée de mobilisation syndicale le 18) et souffre de la comparaison avec la dynamique de CNews. Elle conserve néanmoins le leadership sur les 25-49 ans, sa cible de prédilection (3,3% contre 2,3% pour sa concurrente).
https://www.msn.com/fr-fr/actualite/fra ... 2e102&ei=6
