Tweets racistes contre la première Miss America d'origine indienne
La plus belle femme des Etats-Unis est d'origine indienne. Nina Davuluri, 24 ans, grande brune à la peau mate et aux cheveux lisses, a été élue Miss America 2014 dimanche soir, succédant ainsi à la blonde aux yeux bleus Mallory Hagan. Elle portait l'écharpe de New York, son état natal, dont elle voulait représenter le melting pot, le métissage ethnique et culturel dont la ville à la pomme a fait sa marque de fabrique.
Elle n'est que la deuxième représentante du continent asiatique au palmarès de ce concours créé en 1921, après Angela Perez-Baraquio, Miss America 2001, originaire des Philippines.
«Je suis si heureuse que cette institution prenne en compte la diversité», a déclaré la gagnante lors de sa première conférence de presse a l'issue du concours, à l'heure où la communauté asio-américaine compte 18,2 millions d'individus aux Etats-Unis (soit 5,7% de la population). Née de parents indiens à Syracuse (au nord-est de New York), elle a fait de sa différence culturelle son principal atout pendant la compétition, jusqu'à offrir aux jurés une danse bollywoodienne lors de la cruciale «épreuve de talent» (ou talent routine), lors de laquelle chaque finaliste doit se démarquer par un savoir-faire particulier.
Etudiante américaine modèle
Si Nina Davuluri assume pleinement ses origines, mettant en scène, dans sa vidéo de présentation, sa famille indienne dans des habits traditionnels, elle veut aussi être perçue comme une Américaine modèle. «Mes parents sont indiens, mais moi je suis de Syracuse», déclare-t-elle dans cette vidéo, qui retrace notamment son parcours d'étudiante à la Michigan University, où elle a décroché un diplôme en sciences cognitives, et son ambition de devenir médecin. Elle souhaite aujourd'hui entrer dans une école de médecine grâce à la bourse de 50 000 dollars qu'elle vient de décrocher en se faisant sacrer Miss America - depuis 1945, le concours octroie des bourses aux participantes, victorieuses ou pas.
Miss New York présente sa famille indienne
«Tu as l'air d'une terroriste»
Mais Nina n'a pas convaincu l'ensemble des Américains. De nombreux commentaires racistes ont pullulé sur Twitter après son élection, témoignant de la xénophobie existant au sein de la jeunesse américaine. Quand ce n'est pas sa couleur de peau ou son nom aux consonances étrangères, c'est son soi-disant lien aux terroristes et à Al-Qaida qui est mis en cause. Ce à quoi la Miss a répondu : «Il faut que je sois au-dessus de tout cela. Je me suis toujours considérée comme une Américaine avant tout.»
«Ca s'appelle Miss America. Dégage de là New York, tu as l'air d'une terroriste.»
It's called Miss America. Get outta here New York you look like a terrorist. #bye #americanforamerica
— Emily (@emi_adkins) September 16, 2013
Joshua Lyle : «D'abord un président venu d'on ne sait quel pays d'Afrique, et maintenant une miss America dont je ne peux même pas prononcer ni épeler le nom... Terrosriste»
First a president from God knows where, Africa and now a miss America lady that I can't say or spell her name... Terrorist
— Joshua Lyle (@JLyle2_PGA) September 16, 2013
Brock May : «Une Asiatique (la finaliste Rebecca Yeh, Miss Minnessota, est d'originie chinoise, ndlr) et une Indienne ?? Je pensais que c'était Miss America !?»
An Asian and an Indian?? I thought this was Miss America!?
— Brock May (@BrockMay21) September 16, 2013
Une finaliste d'origine chinoise
L'Asiatique dont Brock May parle, Rebecca Yeh, a elle aussi fièrement revendiqué ses origines mélangées durant toute la compétition. Dans sa vidéo de présentation, elle n'a pas hésité à prononcer quelques mots en chinois.
Miss Kansas : la Miss America dont rêvait l'Amérique profonde
Son CV n'a rien à envier à celui de John Rambo. Sauf que Theresa Vail existe pour de vrai. Dimanche soir, cette femme sergent de l'US Army a échoué en finale de l'élection de Miss America, remportée par la brune Nina Davuluri.
Un fantasme de redneck ? En quelque sorte. A 22 ans, Theresa Vail, alias Miss Kansas, tentait sa chance dimanche soir lors de la finale de l'élection de Miss America. Sergent dans l'US Army, elle était seulement la deuxième femme militaire à se présenter à ce concours so glamour. Il faut dire que dans sa vie quotidienne, Theresa Vail n'est pas une grande adepte des talons hauts et des décolletés pigeonnants. Et si elle parle couramment le chinois, elle n'a rien, mais alors rien du tout d'une étudiante d'Harvard. Ou d'une petite fille riche des Hamptons.
Sa spécialité ? La chasse au cerf qu'elle a appris à dépecer à mains nues, après avoir tué l'animal avec son arc et ses flèches. Un peu comme Katniss Everdeen, l'héroïne de Hunger Games. Mais en plus musclée. "C'est un membre de mon unité qui m'a suggéré de m'inscrire à ces concours de beauté ", racontait la jeune femme à la chaine conservatrice Fox News, à la veille de la finale. "Beaucoup de gens me voient comme un modèle et je me suis dit que si je gagnais une telle élection, ma voix pourrait porter à un niveau national".
"Je veux que les femmes prennent le pouvoir"
Un peu malgré elle, Theresa est devenue dimanche soir l'égérie d'une frange de l'Amérique intolérante, furieuse de voir la brune d'origine indienne Nina Davuluri repartir avec la couronne. "Les juges libertaires de Miss America refuseront de l'admettre, mais Miss Kansas a perdu parce qu'elle représentait vraiment les valeurs de l'Amérique", commentait après coup Todd Starnes, l'un des éditorialistes de Fox News.
Une drôle de publicité pour cette jeune femme, fille de militaire, qui avoue avoir été "maltraitée" par ses petits camarades d'école à l'âge de 10 ans. Et aujourd'hui fervente supportrice de la NRA (National Riffle Association). "Je veux que les femmes prennent le pouvoir, surmontent les stéréotypes et brisent les barrières", explique-elle, fière des inscriptions guerrières qui recouvrent une partie de son corps. Si elle l'avait emporté dimanche, elle aurait été la première Miss America tatouée de l'histoire. Le jury, dans sa grande sagesse, a préféré la diversité.
Cette polémique illustre bien le malaise de l'Amérique actuelle : Sur les côtes et dans les états autours des Grands Lacs, on trouve des gens plutôt progressistes, ouverts, tolérants et qui votent plutôt Démocrates. Dans l'Amérique profonde on trouve pas mal d'ultra-conservateurs, racistes, homophobes, intolérants, etc. Et ça vote en majorité pour les Républicains. Et le drame, c'est que le fossé entre ces 2 amériques ne cessent de se creuser.
Certain commentateurs disent que le pays n'avait jamais été aussi divisé depuis la Guerre de Sécession...





