Visiblement, la réflexion et la pertinence ne sont pas suffisamment tendance pour que vous la suiviez ...
le harcèlement moral au travail est une réalité qui est certes dévoyée par certains, mais qui est véritablement subie par d'autres, dont les séniors pour des raisons évidentes ; il suffit de savoir que les agissements sont souvent insidieux ou sournois, les brimades exclusivement verbales, et qu'il ne faut pas compter sur des témoignages de collègues encore présents dans l'entreprise, pour comprendre que les preuves sont difficiles à obtenir.
"Des méthodes de voyous" par Thomas B.
Cadre de direction, j'avais 55 ans et j'étais en pleine forme quand, mon entreprise ayant changé de main, mon nouvel employeur me convoque et me demande si je ne suis pas fatigué et si je ne souhaite pas m'arrêter. Je réponds que je suis heureux de travailler et que je souhaite continuer aussi longtemps que possible. Mon employeur, visiblement contrarié, ne tarde pas à mettre en place tous les moyens pour me faire craquer, il me fixe des objectifs absurdes, me coupe des informations de l'entreprise et me harcèle pour me faire craquer.
Je tiens bon, car j'ai besoin de travailler. Enfin, je suis convoqué pour un entretien préalable pour une faute grave inventée de toutes pièces, et prestement licencié. Après 5 ans, j'ai gagné mon procès aux prud'hommes, mais je suis resté sans emploi depuis mes 55 ans. La durée des procédures, l'indifférence des tribunaux pour ce type de comportement, encourage ces méthodes de voyous.
Il faudrait que ces procédés, semble-t-il relativement courants, soient sévèrement et rapidement sanctionnés par les prud'hommes et le code du travail.
"J'ai glissé lentement pendant un an" par Isabelle F.
Je n'ai pas perdu mon emploi, pas plus que je ne l'ai quitté, en fait c'est lui qui m'a tourné le dos ! A 53 ans, ce qui fait encore baisser la moyenne nationale. Et ceci à la suite d'un "plan de sauvegarde de l'emploi". En y contribuant afin d'établir de nouveaux "process" plus concurrentiels, j'ignorais qu'à un retour de congés je serai... mise à l'écart. Il m'a fallu alors apprendre une nouvelle langue et un nouveau comportement : "l'ANPE/Assedic land". J'ai lu et relu avec une nausée permanente tous mes "merit-review" aussi excellents les uns que les autres. J'ai glissé lentement pendant un an.
Les centaines de courrier envoyés ont dû recevoir une petite dizaine de réponses toutes calibrées à l'identique. J'avais bien entendu revu mon salaire à la baisse mais mon âge, je ne le pouvais pas ! Qui va investir sur un senior synonyme en France de "vieux c... trop cher et ingérable", sans voir une connaissance immédiatement opérationnelle. Un seul emploi m'a été proposé par l'APEC, il s'agissait d'une offre de vente pyramidale pratique illégale en France. Et puis "la crise" avec son cortège de frilosités bien compréhensibles. Je suis en fin de droits en juillet 2010 et ai décidé de monter ma propre activité créatrice, car une vieille créatrice... ça n'existe pas.
"J'aurais pu faire profiter un jeune de mon expérience", par Bernard V.
A 57 ans et demi, j'étais au placard depuis deux ans sans strictement aucune mission. (...) J'ai donc répondu positivement à la proposition de mon employeur de négocier une rupture conventionnelle. J'ai été correctement indemnisé. Je me suis senti néanmoins humilié de devoir aller au Pôle Emploi et, surtout, j'ai été effaré, n'ayant jamais connu le chômage, de la façon quasi irrespectueuse dont j'étais traité. Heureusement j'ai été très vite dispensé de recherche d'emploi car, je crois, je n'aurais pas supporté bien longtemps d'être "suivi" par quelqu'un qui, globalement, ne comprenait rien à mon parcours. Il me reste une impression de gâchis. Je suis en forme et j'aurais pu faire profiter un jeune de mon expérience.
Licencée après une maladie, par Martine G.
J'ai 55 ans, j'ai été licenciée en 2001,au retour d'une longue maladie (un cancer) car mon employeur "pensait qu'il ne pouvait plus me faire confiance". J'étais "global category manager" dans une grande entreprise, j'ai donc cherché à rebondir, mais il etait clair que je presentais alors pas mal de handicaps aux yeux des employeurs, chasseurs de têtes et autres : je suis une femme, je venais d'être malade et je devais subir ma derniere greffe osseuse, j'etais dans la cinquantaine, j'avais un gros salaire : 100 000 euros annuels, une voiture de fonction etc.
Et j'ai postulé, postulé...pour en finir avec des refus systematiques (à peine polis). Je suis devenue en 2003, comme la plupart d'entre nous, consultante freelance. En 2006 j'ai voulu travailler de façon recurrente et plus soutenue pour mes 10 dernieres années de cotisation. Alors,à 51 ans, je me suis lançée dans la gestion de patrimoine dans une banque d'affaire. J'ai étudié, passé le mastère et aujourd'hui je gère un (trop petit) portefeuille et gagne 1200 euros brut par mois sans aucun frais ! Je veux partir... mais toutes mes demandes (lorsque les recruteurs ont la correction d'y repondre) se soldent par l'éternel "votre profil ne correspond pas".
"Mon poste a été externalisé", par Jean M.
Cadre informatique dans une grande entreprise automobile de l'ouest parisien, j'ai été viré le 1er avril 2008 après 38,5 années d'ancienneté à 58 ans et demi. Malgré la satisfaction que je donnais (vu mes primes de performance), ma connaissance de l'entreprise et du réseau relationnel crée, ma fonction a été externalisée vers un sous-traitant international. Nous avons été environ un millier dans ce cas. Bien sûr, cela s'est fait presque en douceur, belle prime de départ (100 000 euros, préavis non travaillé de 6 mois, et des syndicats tête basse, qui ne gèrent plus que les départs...)
Même si vous vouliez rester jusqu'à 60 ans, difficile de ne pas sauter sur l'occasion, même si être chômeur pendant un an et demi n'a rien de réjouissant (aucune proposition par l'ANPE), et que cela ne donnera aucun travail aux jeunes puisque l'externalisation se fait en Roumanie ou vers un autre paradis libéral.
"Plus de 300 CV envoyés, pas de réponse" par Daniel G.
Agé de 56 ans, je suis demandeur d'emploi depuis un an après un licenciement de mon poste de directeur marketing et commercial jugé "sans cause réelle et sérieuse" par les prud'hommes. (...) Concernant ma recherche d'emploi, c'est une catastrophe ! Plus de 300 CV envoyés et rien de rien ! La plupart du temps pas de réponse. Par contre pas une journée ne se passe sans recevoir une proposition de mise à mon compte car ce CV est formidable... Encore un an avant la fin de droit, je vis seul, pas de famille... 500 euros de loyer, et 450 euros de RSA ! 3 ou 4 ans avant la retraite... Je fais comment ?
"Livrée à moi-même sept ans avant la retraite" par Agnès G.
Je viens d'avoir 56 ans et je suis devenue bonne à jeter dans un vaste plan dit de cessation anticipée d'activité. Après une dizaine d'années d'exercice comme médecin anesthésiste-réanimateur hospitalier j'ai fait carrière dans l'industrie pharmaceutique. Cette industrie n'a plus besoin de moi et m'a rendue volontaire pour la quitter. Me voilà donc livrée à moi-même pendant 7 ans avant de pouvoir exercer mes droits à la retraite.
D'aucuns diront : "Oh la grincheuse elle touche un peu moins de 70% de son salaire pour rester chez elle". Pouvais-je espérer un tel avenir avec mes compétences de médecin spécialiste ? J'étais prête à reprendre une activité clinique (...) Mais l'entreprise nous a fait signer un engagement de non reprise d'activité sans autre justification que celle de ne pas prendre le travail des plus jeunes.
Licenciée à 58 ans et demi par Marie P.
J'ai 58 ans et demi, je suis en activité depuis 37 ans, prestataire en rédaction technique depuis 10 ans, l'entreprise qui m'emploie en CDI depuis 3 ans me licencie économiquement cette semaine. Et ceci malgré mon petit salaire qui est une des nombreuses concessions faites depuis 10 ans pour limiter les barrières à mon embauche.
Ce que je remarque, c'est que presque tout le monde semble trouver cela normal, voire enviable ! Pour ma part, j'ai encore le goût et l'énergie pour continuer, mais je serai probablement, malgré moi, à la charge des Assedic pendant les 2 prochaines années. Si au moins ma disparition du marché du travail libérait une place pour un plus jeune...