La France se situe du côté des mauvais élèves de la zone euro.
Source:Le Figaro.
Alors que le gouvernement s'apprête à partir en vacances, l'Insee est venu vendredi matin assombrir l'ambiance, en rappelant la violence de la crise économique traversée par le pays. Au deuxième trimestre, suite à l'instauration du confinement, l'économie hexagonale s'est brutalement effondrée.
Le produit intérieur brut (PIB) a plongé de 13,8 %, soit le plus fort recul d'activité connu depuis l'après-guerre. Au cœur de la tempête, en avril, l'économie française ne fonctionnait plus qu'à 50 % de son rythme normal. Certains secteurs comme le bâtiment ou la restauration était entièrement à l'arrêt.
Depuis ce plancher, le pays remonte peu à peu la pente. En juin, les créations d'entreprises ou la consommation des ménages ont retrouvé leur niveau de février. La reprise est même plus rapide qu'anticipée. Pour le deuxième trimestre, l'Insee tablait sur une chute du PIB de 17 %.
Bruno Le Maire, le ministre de l'Économie, a attribué ce mieux, ou plutôt « moins pire », à sa politique. « Nous ne sommes pas impuissants face à la crise. Si nous prenons les bonnes décisions, pour soutenir la demande, les entreprises, sauver les emplois avec le chômage partiel, cela donne des résultats », a-t-il assuré sur LCI. En termes macroéconomiques, le pire serait donc désormais derrière nous.
Le choc n'a en revanche pas fini de se propager dans l'économie réelle : de nombreuses faillites sont attendues à la rentrée, tandis que la Banque de France table sur un taux de chômage de 11,8 % au premier semestre 2021, contre 7,8 % un an plus tôt.
La comparaison internationale inquiète aussi. Le coronavirus a frappé tous les pays, mais les conséquences sur l'économie ne sont pas toutes de même ampleur. En moyenne dans la zone euro, le PIB a plongé de 12,1 % au deuxième trimestre. La France se situe donc du côté des mauvais élèves. Pour Philippe Martin, le président délégué du Conseil d'analyse économique, rien d'étonnant.
« Le meilleur indicateur de prédiction de la chute du PIB pendant le confinement était l'intensité des mesures de restriction. Les confinements français et espagnols ayant été particulièrement sévères, le plongeon du PIB de ces deux pays était attendu », rappelle l'économiste.
Deux groupes en Europe:
« Aujourd'hui, il y a clairement deux groupes en Europe, précise Charles-Henri Colombier de COE-Rexecode. Les pays du Nord, dont l'Allemagne ou l'Autriche, qui ont confiné moins longtemps ou moins drastiquement, devraient subir des baisses de PIB de l'ordre de 5 % en 2020. Pour le deuxième peloton, qui regroupe la France, l'Italie ou l'Espagne, le choc sera au minimum de 8 %. L'été permettra de préciser le tableau, car il donnera une idée de l'impact d'absence de saison touristique sur la croissance », avance l'économiste.
Les chefs d'entreprise ne tablent pas sur un retour rapide de l'activité. Ils ont en effet drastiquement revu à la baisse leurs investissements (- 18 % au deuxième trimestre). « L'investissement est la part la plus volatile du PIB. Dans une crise, avant de réinvestir, les chefs d'entreprise se fient à deux indicateurs : leur trésorerie et leurs anticipations de carnets de commandes », rappelle Philippe Martin.
Or ces anticipations dépendent de la consommation. « Ce qui va déterminer l'évolution de la macroéconomie les prochains mois, ce sont les choix des ménages, avance ainsi Xavier Ragot, le président de l'OFCE. Une consommation inférieure de deux points à la normale, car les gens vont moins au restaurant ou dans les magasins, c'est 250 000 chômeurs supplémentaires ».
Les Français ont mis de côté pendant le confinement quelque 70 milliards d'euros. Ils ont donc de quoi relancer l'économie ; mais la dernière enquête de l'Insee sur le moral des ménages n'incitait pas à l'optimisme. Depuis six ans, jamais les ménages n'avaient déclaré vouloir autant épargner.
L'épreuve de vérité viendra à l'automne. Mécaniquement, sauf nouvelles catastrophiques sur le front sanitaire, la croissance devait en effet rebondir au troisième trimestre. Pour la France, l'Insee table ainsi sur un saut de 19 % entre juillet et septembre. Puis de 3 % pour les derniers mois de l'année. « Tout l'enjeu du gouvernement est d'éviter que cette récession s'enkyste et se transforme en crise persistante, insiste Philippe Martin.
Pour cela, il faut casser le cercle vicieux de la baisse de confiance des ménages qui limite la consommation, puis les carnets de commandes et l'investissement des entreprises, provoquant in fine une hausse du chômage qui nourrit à son tour l'inquiétude des ménages. » Dans ce contexte, l'exécutif joue gros avec l'annonce de son plan de relance, prévue le 25 août. Il va lui falloir créer un effet d'entraînement avec un dispositif dont les grands axes - relance verte, réindustrialisation, aides aux plus modestes - sont déjà bien connus.
https://www.lefigaro.fr/conjoncture/plo ... e-20200731