"Hollande est trop à l'écoute pour trancher"

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tisiphoné
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"Hollande est trop à l'écoute pour trancher"

Message par tisiphoné » 09 novembre 2013 17:22

Pour le neuropsychiatre, Boris Cyrulnik, le chef de l'État joue la comédie de l'authenticité, mais reste définitivement un hésitant authentique. Entretien.

Le Point : François Hollande manque-t-il de force ?

Boris Cyrulnik : La force peut venir de la psychopathologie, un terme que je n'apprécie pas trop, car il est souvent mal compris, mais qui peut servir d'étiquette. Les hommes et les femmes forts n'ont pas le sentiment de l'autre, ils ne sont pas freinés par l'empathie ou le doute. Les chefs d'État, les gouvernants, les décideurs sont souvent des psychopathes, soumis à une seule représentation du monde : la leur. Ils vivent dans leur monde, donc ils considèrent avoir raison et être forts. La force en politique est à la fois nécessaire et abusive. Nécessaire, parce qu'elle permet de diriger. Abusive, car elle implique de taire les opinions critiques. Ce qui, chez François Hollande, ressemble à une absence de force est, selon moi, le signe de son empathie. Les autres existent pour lui, il les écoute et en tient compte. Je le crois être un homme équilibré mais cafouilleux.

Un homme cafouilleux peut-il diriger ?

François Hollande ne tranche pas, au contraire de Nicolas Sarkozy, grand trancheur, lui. Les hommes qui passent à l'acte donnent l'impression d'avoir du caractère, parce qu'ils choisissent d'imposer leur opinion. François Hollande ne manque pas de volonté, mais il est embarrassé d'un excès de scrupules. Il est plus scientifique que chef d'État. Son sens de la nuance lui joue manifestement de mauvais tours, ce qui fait cependant de lui un être moral.

En laissant s'exprimer de vives dissensions dans son gouvernement, en laissant enfler les critiques, en changeant rapidement et souvent d'avis, le président ne manque-t-il pas crûment d'autorité ?

Quand on est démocratiquement élu, il vaut mieux cesser d'être démocrate, ce que Hollande continue pourtant d'être. Laisser faire marque en effet un manque d'autorité. J'observe qu'il a, pour accéder à ce poste, mené une campagne faussement vigoureuse, il jouait la comédie de la vigueur, de la décision, de la fermeté. Je l'écoutais, le lisais, l'étudiais, et j'étais frappé par cette comédie de l'autorité. Or le jeu du comédien est anormalement cohérent, seule l'hésitation est la preuve de l'authenticité. Le candidat Hollande nous a leurrés en nous proposant ce que nous espérions. Désormais, il gouverne avec authenticité, mais en souffrant d'une absence de vigueur et de fermeté. J'ai eu l'occasion de le rencontrer dans un théâtre et puis il m'a écrit une lettre dans laquelle il me demandait de préfacer un livre écrit par une personne qu'il aime...

Qui était cet auteur ?

Je ne me souviens plus (sourires). La gentillesse de cette lettre était patente ; seulement, est-ce une vertu politique, la gentillesse ?

Les sondages sont négatifs, les critiques acerbes. Estimez-vous qu'il y a en lui une forme de résistance à poursuivre impavidement sa route ?

Il applique la stratégie du roseau. Il plie, il courbe, mais ne rompt pas. Il affronte peu afin de ne pas être déraciné. Il n'est pas un tueur qui un jour se fera tuer.

Gentil, empathique et fort souple, nous dites-vous. Un modèle unique à la tête d'un pays...

Oui, je crois que François Hollande est un chef d'État unique en son genre. C'est d'ailleurs étonnant qu'en faisant montre d'une telle souplesse il soit parvenu là où il est. Je n'oublie pas qu'il doit peut-être à la sexualité pittoresque de DSK d'y être parvenu.


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