Girouette un jour RN toujours...
La gauche applaudit l’annonce d’Emmanuel Macron mais en demande plus, tandis que l’extrême droite s’offusque, oubliant ses positions passées, favorables à cette reconnaissance.
Déjà 147 pays reconnaissent l’Etat de Palestine. La France sera le 148e, comme l’a annoncé Macron hier. Mieux vaut tard que jamais, diront les optimistes. Le président Macron s’offre ainsi une jolie salve d’encouragements venus de la gauche. Le phénomène est assez inédit, reconnaissons-le. Mais l’annonce du chef de l’Etat l’est tout autant. Depuis, les leaders de gauche saluent cette décision mais poussent Macron à aller plus loin. «Pourquoi en septembre et pas maintenant ? Et l’embargo sur les armes ? Et la rupture de l’accord de coopération ?» demande Jean-Luc Mélenchon, tout en saluant une «victoire morale» de son camp sur le sujet. «Nous voulons une politique globale et cohérente. Nous voulons l’arrêt immédiat du génocide. Nous voulons un engagement clair et immédiat contre le crime», ajoute-t-il.
Chez les roses et les verts, la tonalité est la même. «Il faut désormais mettre en œuvre tous les moyens pour mettre un terme au génocide et à la famine qui règnent à Gaza, ainsi qu’au nettoyage ethnique en cours en Cisjordanie», réclame Marine Tondelier. «Elle doit être assortie de sanctions tant que durera le génocide en cours», ajoute Olivier Faure. Et puis comme élu échaudé craint l’eau froide, certains réclament la reconnaissance immédiate. «Pourquoi attendre septembre alors que dans l’horreur quotidienne de Gaza, c’est maintenant qu’il faut agir ? questionne Manuel Bompard.
Oui, il faut reconnaître immédiatement l’Etat de Palestine. Mais nous voulons un Etat pour les vivants, pas un Etat pour les morts.»
«L’honneur de la France»
D’autres regrettent à l’inverse que le Président n’ait pas encore un peu attendu. La France aurait pu être, avec un peu d’effort, le dernier pays à le faire - après Israël et les Etats-Unis de Donald Trump, évidemment. Du côté de l’extrême droite, on trouve ainsi que la décision de Macron est «précipitée», Jordan Bardella considérant qu’elle «accordera au Hamas, mouvement terroriste islamiste, une légitimité institutionnelle et internationale inespérée».
Le RN est pourtant historiquement favorable à la création d’un Etat palestinien.
Mais le parti d’extrême droite ayant réussi, depuis le 7 octobre 2023, à faire passer son racisme pour une défense du peuple juif, il préfère aujourd’hui se renier.
Bardella a oublié que lui-même, alors jeune militant FN, défendait cette reconnaissance. En 2014, quelques semaines avant le vote à l’Assemblée d’une résolution non contraignante du groupe PS invitant le gouvernement Valls à reconnaître l’Etat palestinien, son maître à penser d’alors se montrait enthousiaste. «
L’honneur de la France, c’est de reconnaître un Etat palestinien. Tout vote en ce sens est une avancée», jugeait Florian Philippot. Une parole que son protégé Bardella relayait volontiers. Après le vote, le député FN Gilbert Collard avait estimé qu’avec cette résolution, les socialistes «embrassent le Hamas, le terrorisme».
Des arguments repris en 2025 car depuis des années, l’extrême droite s’oppose à toutes les mesures prises en faveur de cette étape diplomatique.
Dos à dos
A la même époque, Marine Le Pen renvoyait quant à elle Israël et Hamas dos à dos. «
Israël a le droit d’assurer sa sécurité et la Palestine a le droit à la souveraineté», disait-elle sur BFM TV, prônant une solution à deux Etats.
Aujourd’hui, la même Le Pen estime que la décision de Macron est «une faute politique et morale».
Mais ne soyons pas sectaires. Il n’y a pas qu’à l’extrême droite que l’on mange son chapeau. L’ancien député écolo et ex-président macroniste de l’Assemblée François de Rugy - aujourd’hui membre du parti d’Edouard Philippe, Horizons - s’est lui aussi insurgé, estimant que «reconnaître un Etat qui n’a ni frontières, ni gouvernement exerçant la moindre souveraineté, cela n’a pas de sens ni de portée réelle». «L’urgence est à la fin de la guerre à Gaza et à la libération de tous les otages, pas à la reconnaissance par la France d’un Etat palestinien inexistant», a-t-il ajouté. En 2014, le même Rugy, alors coprésident du groupe écolo à l’Assemblée, défendait le vote par ses ouailles de la proposition de résolution pour reconnaître l’Etat palestinien. «C’est une invitation au dialogue et à l’apaisement», disait-il alors.
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