Corvo a écrit : ↑25 octobre 2025 17:11
papibilou a écrit : ↑25 octobre 2025 15:38
1 quand on montre dans un spectacle de poupées blanches empalées, vous devez avoir raison, ça n'a aucun caractère racialiste. C'est simplement qu'elle n'en a pas trouvé d'autres sur le marché. J'ai juste tapé : Rebecca Chaillon poupées. Allez vois et dites moi si c'est malhonnête.
2 Oui, j'ai une conception radicale de la laïcité. Je rêve d'une laïcité grâce à laquelle on ne pourra pas deviner la religion des personnes dans la rue. Je reprends souvent une expression du chat de Gelluck "on ne montre pas son cul-te dans la rue à tout le monde". Tout ça parce que je suis athée, anticlérical et que j'estime que l'expression d'une foi doit être réservée à chez soi ou au lieu de prières. Désolé, mais mes rêves ne font de mal à personne et je ne rêve que de paix entre les hommes. Je sais c'est très con.
C'est toujours mieux de davoir de quoi on parle.
Avignon : Rébecca Chaillon et sa «Carte noire nommée désir» au cœur d’une bataille identitaire
Ironisant sur les stéréotypes racistes accolés aux femmes noires dans la société contemporaine, accueilli en triomphe dans le festival in,
le spectacle a suscité les réactions agressives, verbales et physiques, de certains spectateurs.
Pendant ce temps, la fachosphère fustige une œuvre qu’elle n’a pas vue,
Eric Zemmour en tête.
Ces derniers jours, au Festival in d’Avignon, des spectateurs ont crié leur mécontentement pendant une pièce accueillie comme un chef-d’œuvre par une partie de la presse et du public. L’un d’eux a même frappé une comédienne sur la main. Une routine déplorable mais une routine, penserait-on a priori, celle du monde tumultueux du spectacle vivant qui en a vu bien d’autres en matière d’«interaction» violente et anti-démocratique entre scène et salle : un homme montant sur le plateau pour tordre le doigt de la chorégraphe Maguy Marin, un autre criant «Mange ton caca !» au metteur en scène Johan Simons… Sauf que la pièce en question, ici, s’intitule Carte noire nommée désir, qu’elle est interprétée par huit artistes afro-descendantes devant un public majoritairement blanc, et qu’elle revisite pendant 2h40 les clichés les plus lourds liés aux représentations de la femme noire dans la société française contemporaine, notamment son hypersexualisation.
Dès lors, plus de «routine» du spectacle vivant derrière ces violences mais plutôt une routine sociétale, celle des «agressions racistes», ont déduit plusieurs spectateurs, manifestant depuis leur émotion sur les réseaux sociaux. L’équipe du Festival d’Avignon caractérisait de la même façon les événements lundi, par communiqué : «Les interprètes font face lors des représentations mais aussi dans les rues à des agressions verbales et physiques à caractère raciste.» Le directeur de l’événement Tiago Rodrigues a fermement condamné ces comportements en conférence de presse : «
Au Festival d’Avignon, nous ne trouvons pas seulement cela inacceptable mais nous combattons [ces comportements].» Ni l’équipe du festival ni l’équipe artistique de la pièce n’ont souhaité décrire et commenter les faits auprès de Libération.
Contre-offensive en salle
Les tensions ont commencé dès la première représentation à Avignon, jeudi 20 juillet. Lorsque les spectateurs de Carte noire nommée désir entrent en salle, ils découvrent un gradin pour les blancs, un gradin pour les noires. A nous, une hôtesse d’accueil indique le gradin habituel, à ces afro-descendantes et métisses visibles elle indique à voix basse qu’elles peuvent, si elles le souhaitent, s’installer sur ces banquettes en fond de scène, face aux autres spectateurs, devenant ainsi le décor vivant d’un spectacle qui ambitionne justement de parler de «ça» : la ségrégation quotidienne plus ou moins larvée dans une société qui croit en être totalement débarrassée. Certaines spectatrices noires jouent le jeu, d’autres le refusent. On en verra une quitter la salle au milieu de la pièce.
Faut-il vraiment le préciser ? Le geste relève évidemment, à l’image de l’ensemble du spectacle, de la mise en scène purement sarcastique. Libre à chacun de la trouver plus ou moins corrosive ou plus ou moins inspirée, mais quiconque aurait un problème idéologique majeur avec cet «humour noir» et le discours qu’il sert ici est invité, via une annonce diffusée pendant la durée de l’installation du public, à en discuter paisiblement avec l’équipe autour d’un verre à l’issue de la représentation. Un homme criera pourtant au «déni de démocratie» pendant la représentation du 21 juillet, rapporte le site Sceneweb. Le 20, date où nous étions, et alors que Rebecca Chaillon frotte interminablement le plateau pour le rendre plus blanc que blanc, un autre spectateur s’écrie : «Il y a une éthique au théâtre ! A Avignon, on dit ce qu’on pense !» La contre-offensive, massive, fuse immédiatement en salle, en chœur : «Ta gueule.»
Stéréotype de la «nounou noire»
Plus tard, les interprètes parodient un jeu télévisé participatif type Questions pour un champion avec ici l’équipe «ménage», là l’équipe «cantine». Soudain, une interprète s’élance dans les gradins pour dérober les sacs et objets des «blancs», évidemment sans leur consentement, puisqu’il s’agit d’un grand jeu de colonisation inversée, a-t-elle expliqué, les «pillés» en verront bientôt les bénéfices ! Un homme rechigne à laisser ses lunettes. «Il y a de la résistance, je vois !» crie-t-elle au public, toujours dans son personnage. La même comédienne recevra le lendemain une claque sur la main après qu’un spectateur, «âgé d’une soixantaine d’années», a refusé à plusieurs reprises de laisser son sac, rapporte encore le site Sceneweb : «L’une des comédiennes s’exclame alors : «Voilà on peut frapper une actrice pendant un spectacle et partir tranquillement, c’est ce qu’on appelle le privilège blanc».» L’équipe artistique a finalement choisi de couper cette scène interactive pour la remplacer par la lecture d’un texte. Les dates restantes ont été encadrées par un vigile.
Toutes sont accueillies par une standing ovation d’une majeure partie du public.
Un attaché de presse présent dans la salle lors de cette frappe s’est désolé sur son compte Facebook de n’être pas intervenu pour empêcher le mauvais joueur de quitter la salle et s’en est excusé auprès de la compagnie.
Une artiste belge lui répond qu’ « à Bruxelles, ce spectateur se serait fait pisser dans la bouche. »
Un autre témoin des faits déplore «la réaction très agressive (de ce) spectateur, agacé par la séquence de simulation de sac volé ou par trop de vérités ?. Réaction venue signifier exactement ce qui était démontré sur scène !» Quoi donc? Un racisme flagrant? Sur sceneweb, un commentateur peine à comprendre le lien logique: « N’est ce pas un spectateur simplement agacé que l’on s’empare de son sac et qui a réagi un peu trop fermement ? Quel rapport avec la » race » ( sic)? » Pour l’heure, Rébecca Chaillon a préféré parler, sur sa page Facebook, de «violentes réactions», manifestant aussi son émotion d’avoir découvert une grande pancarte de soutien devant le théâtre : «
Tous les messages, partages sur les réseaux sociaux, le bouche à oreille, les débats menés avec l’entourage, les groupes, le soutien du festival… Comment dire ? Ça fout la chiale de sentir que certain·e·s sont là, nous entendent, nous accompagnent. Merci !»
Les marques de solidarité du milieu culturel pleuvent depuis, notamment de la part de l’équipe du théâtre de l’Odéon à Paris qui doit accueillir la pièce à l’automne.
Mais pendant ce temps, un autre public aux valeurs bien plus lisibles que celui d’Avignon s’est réveillé : la fachosphère bien sûr, qui n’a pas cru bon d’assister à ce spectacle «wokiste» et «financé par nos impôts» pour interpréter, avec une littéralité confondante, les images et extraits qui circulent sur le Web.
Eric Zemmour s’est évidemment fendu d’un tweet, jeudi 27 juillet, pour se scandaliser de ce «racisme anti-blanc y compris au sein du public qu’on sépare entre femmes noires d’un côté mises en majesté, et le reste du public, blanc, auquel on fait vivre un petit apartheid». Comme si cette scène en forme de pied-de-nez relevait d’un rêve de société. Pire, l’homme politique y tient la preuve que les afro-descendants veulent «génocider les blancs, à commencer par les bébés». La preuve ? La photo du spectacle sur laquelle une comédienne noire embroche des bébés en plastique blanc. Dans Carte noire nommée désir, une comédienne incarne, le temps d’un tableau, le stéréotype de la «nounou noire» employée par les riches blancs et embroche des poupons en plastique (des blancs et des noirs).
Faut-il encore le préciser ? Rien n’indique que cette scène relève d’un projet de société.
C’est une mise en scène bouffonne, évidemment, des cauchemars racistes de certains blancs, qu’on pensait dater d’il y a cent ans.
Tout cela, Eric Zemmour le sait bien. Mais dans la guerre culturelle d’aujourd’hui, tout est affaire de récupération.
Mis à jour le 27 juillet 2023 à 18h56 après le tweet d’Eric Zemmour
https://www.liberation.fr/culture/scene ... 6A7Q66MLU/